Les connexions Internet au bureau en France et en Allemagne
10 octobre 2013
Le développement d’Internet a conduit à se poser la question de savoir si les salariés peuvent se connecter pendant le temps de travail avec l’ordinateur de l’entreprise. Quelles sont les solutions retenues en France et en Allemagne pour réglementer ces connexions ?
En France, l’article L. 1121-1 du Code du travail interdit à l’employeur d’apporter des restrictions aux libertés des salariés qui ne sont pas justifiées par la tâche des salariés et proportionnées au but recherché. Sur ces bases, les juges considèrent généralement qu’un salarié peut se connecter à des sites Internet avec l’ordinateur fourni par l’entreprise durant ses heures de travail, dès lors que les connexions restent raisonnables. En conséquence, une interdiction totale de connexions personnelles édictée par un employeur ne serait pas valable en France.
La liberté de connexion n’est cependant pas sans limites. Dès lors que les connexions deviennent abusives, le salarié s’expose à des sanctions disciplinaires, pouvant aller jusqu’au licenciement. En la matière, la consultation de sites inappropriés, tels que des sites pornographiques, constitue un abus comme l’a démontré la décision de la Cour de cassation du 23 novembre 2011. En l’espèce, le salarié avait, de plus, laissé plusieurs fois en ligne son numéro de téléphone professionnel. Autres cas d’abus, des connexions provoquant un encombrement des réseaux et un ralentissement de ceux-ci, en raison du poids des fichiers téléchargés comme l’indique la décision de la Cour de cassation du 15 décembre 2010. Enfin, des connexions trop nombreuses peuvent également entraîner des sanctions, si l’on se réfère à l’arrêt de la Cour de cassation du 26 février 2013, où la salariée « s’était connectée pendant son temps de travail, à de très nombreuses reprises, à de nombreux sites extraprofessionnels », dont le nombre avait été évalué « à plus de 10000 » sur une période de 15 jours.
En Allemagne, sauf autorisation, le salarié ne peut utiliser les accès Internet de son employeur durant le temps de travail à des fins personnelles. Des philosophies différentes L’employeur français qui envisage de contrôler les connexions Internet de ses salariés devra consulter au préalable le comité d’entreprise, informer les salariés de cette possibilité de contrôle et déclarer les outils de suivi mis en place à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). En Allemagne, il appartient à l’employeur de définir dans un règlement intérieur les conditions d’utilisation d’Internet. Ce règlement intérieur doit toutefois respecter les droits à la codétermination du comité d’entreprise et les articles 1 et 6 des lois relatives au travail Betriebsverfassungsgesetz).
En conclusion, même si la philosophie des deux législations est différente, les solutions pratiques retenues au sein des entreprises sont souvent les mêmes : des connexions autorisées durant le temps de travail tant qu’elles demeurent raisonnables.
A propos de l’auteur
Alain Herrmann, avocat associé. Il intervient en droit social, en matière de restructurations nationales et internationales (notamment franco-allemandes), plans de sauvegarde de l’emploi, négociations collective d’entreprise, gestion de la mobilité nationale et internationale des salariés et contentieux sécurité sociale.
Article paru dans la revue Paris Berlin d’octobre 2013
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