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Droits à déduction de TVA : La prévalence de l’affectation financière de la dépense sur l’affectation physique ?

Droits à déduction de TVA : La prévalence de l’affectation financière de la dépense sur l’affectation physique ?

Dans un précédent article publié le 11 juin 2016, à l’occasion d’un contentieux relatif au calcul des droits à déduction dans les EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) (notamment CAA Versailles n°12VFE00079, arrêt frappé d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat) nous évoquions, à l’appui des revendications de ces établissements, l’argument suivant lequel l’affectation des dépenses pour la détermination des droits à déduction doit doit s’entendre comme de celle d’une affectation financière et non physique de la dépense à l’activité.

Selon cette analyse, la TVA grevant une dépense est déductible, dès lors que la dépense en cause concoure à la réalisation de l’activité taxable de l’assujetti et fait partie des éléments constitutifs du prix de ses opérations taxées.

Cette analyse repose sur l’interprétation des décisions de la Cour de Justice de l’Union Européenne selon lesquelles la TVA grevant des dépenses est déductible dès lors que les opérations effectuées en amont présentent un lien direct et immédiat avec des opérations en aval ouvrant droit à déduction, analysé comme un lien financier. De même s’agissant des frais généraux, le droit à déduction de la TVA grevant l’acquisition de biens ou de services en amont présuppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction (cf. CJUE Cibo Participations, point 31, du 27 septembre 2001- aff. C 16/00 ; également en ce sens, l’arrêt BLP Group, CJUE 6 avril 1995, Aff. C-4/94) .

La règle du prorata ne s’appliquerait que de façon reliquataire lorsque la dépense concoure communément au prix de l’opération taxable et de l’opération exonérée de TVA. Ce n’est donc pas la règle de l’utilisation de la dépense au sens physique qui prévaut mais celle de l’affectation financière de celle-ci à la réalisation des opérations taxables et exonérées.

Dans l’un des très nombreux contentieux portant sur le sort des dépenses supportées par les EHPAD au regard des droits à déduction de la TVA, le Conseil d’Etat devrait très prochainement se prononcer sur la pertinence de cette analyse que le rapporteur public lui a proposé de confirmer dans ses conclusions lues à l’audience du 12 septembre 2016 (n°390874 Parc de la Touques). Selon lui, et comme nous le suggérons de longue date, la règle de l’affectation financière doit, au sens des décisions de la CJUE, prévaloir sur l’affectation physique, l’usage du prorata ne devenant alors que reliquataire. Cette décision est très attendue. Elle remettrait en cause la doctrine administrative sur le calcul des droits à déduction dans les EHPAD et permettrait l’exercice des droits à déduction sur toutes les dépenses qui ne sont pas couvertes totalement ou partiellement par le forfait soins.

Nous suivrons donc avec intérêt la décision du Conseil d’Etat sur cette question.

 

Auteur

Anne Grousset, avocat associée en TVA