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Exercice par un salarié d’un mandat social dans une filiale : une bonne idée ?

Exercice par un salarié d’un mandat social dans une filiale : une bonne idée ?

Si un salarié d’une holding exerce, au titre de son contrat de travail, un mandat social au sein d’une filiale, quelles sont les conséquences en cas de manquement ?

Le cumul d’un contrat de travail avec un mandat social suppose le respect de conditions très strictes, tenant à l’existence d’un lien de subordination.

La question de la validité du cumul ne se pose toutefois que dans l’hypothèse où le contrat de travail et le mandat social sont exercés dans la même société.

La situation est différente lorsqu’une société holding conclut un contrat de travail avec un salarié dont les fonctions consisteront à diriger une ou plusieurs filiales, dans le cadre d’un mandat social. Ce schéma a été validé par la chambre sociale de la Cour de cassation depuis une vingtaine d’années. Et dans les faits, cette pratique se rencontre fréquemment au sein de groupes de sociétés, notamment ceux comportant des entités implantées dans plusieurs pays.

Dans un arrêt récent du 2 juin 2016, la chambre sociale de la Cour de cassation a illustré les rapports qui existent entre le contrat de travail et le mandat social dans ce type de situation. Se faisant, elle a débouté le salarié d’une holding qui d’une part réclamait le paiement de rappels de salaires et de dommages et intérêts de la part des filiales dans lesquelles il exerçait un mandat social et d’autres part contestait le bien-fondé de son licenciement par la mère.

Dans cette affaire, le salarié, après avoir décliné une proposition de mutation, avait pris l’initiative, sans en informer au préalable la société mère employeur, de solliciter auprès du tribunal de commerce la mise sous sauvegarde des trois filiales françaises qu’il dirigeait dans le cadre d’un mandat social. La holding l’avait alors immédiatement révoqué de ses fonctions de mandataire social et licencié pour faute grave.

Une faute du dirigeant de la filiale peut justifier son licenciement par la mère

La Cour de cassation confirme que les actes accomplis en qualité de mandataire social de la filiale peuvent justifier un licenciement par la société employeur. Tel n’aurait pas été le cas si le salarié avait cumulé ses fonctions salariées avec un mandat social au sein de la même société. En effet, dans ce cas, la jurisprudence ne permet pas d’invoquer les fautes commises en qualité de dirigeant mandataire social pour mettre fin ipso facto aux fonctions salariées.

Dans le dossier ayant donné lieu à l’arrêt du 2 juin 2016, le salarié de la holding contestait la faute grave sur laquelle reposait son licenciement par la société mère. Les juges de la haute juridiction l’ont débouté et ont considéré que les démarches entreprises par l’intéressé visant à obtenir la mise sous sauvegarde des filiales alors que cette procédure n’était pas justifiée, étaient susceptibles de créer des inquiétudes légitimes et des réactions négatives de la part des partenaires et des salariés. Il aurait dû en informer au préalable son employeur : la société mère.

Les actes accomplis par le dirigeant étant rattachés à l’exercice de son contrat de travail, il était placé dans un lien de subordination pour l’exercice de cette mission, et devait donc respecter le pouvoir hiérarchique.

N’est pas salarié qui veut

Enfin, le salarié tentait de démontrer l’existence d’un contrat de travail avec chacune des trois filiales et demandait à ce titre diverses sommes à titre de rappels de salaires et indemnité pour travail dissimulé.

Mais là aussi, la Cour constate que dès lors que la société mère avait conservé son pouvoir hiérarchique sur son salarié et qu’aucun contrat de travail n’avait été conclu au niveau des filiales, l’intéressé exerçait ses fonctions dans les filiales soit dans le cadre de son contrat de travail conclu avec la mère, soit dans le cadre de directives données par la mère concernant l’exercice des mandats.

Les juges ont ainsi veillé au respect d’une parfaite répartition des fonctions de salarié et de mandataire.

Auteurs

Caroline Froger-Michon, avocat associée, droit social, CMS Bureau Francis Lefebvre

Isabelle Prodhomme, avocat spécialisé en droit des sociétés, en droit boursier et en Private Equity.

Exercice par un salarié d’un mandat social dans une filiale : une bonne idée ? – Article paru dans Les Echos le 19 décembre 2016