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Imparables clauses limitatives de responsabilité des contrats types de transport

Imparables clauses limitatives de responsabilité des contrats types de transport

Quel donneur d’ordre d’un transport ne s’est pas vu opposer par son transporteur, à la suite d’un dommage subi par sa marchandise, la clause limitative de responsabilité d’origine légale et n’a pas tenté -vainement- d’y échapper ?

C’est ce qui est arrivé à une société qui avait demandé à un transporteur de charger chez le marbrier deux plateaux de marbre dont l’un est arrivé cassé chez son client final.

Le transporteur a vu sa responsabilité retenue car il n’avait pas pu rapporter la preuve d’une des quatre causes exonératoires de responsabilité possibles : force majeure, vice propre de la chose, faute du destinataire ou du donneur d’ordre (CA Paris, 6 septembre 2016, n°15/21026). En effet, l’existence d’un vice caché (telle une fêlure dans la plaque de marbre préexistant au transport) ou d’un défaut de conditionnement incombant au donneur d’ordre n’avait pas pu être démontrée.

Pour échapper à cette responsabilité, il s’était prévalu de la clause limitative de responsabilité prévue par le contrat type général de transport de marchandises (ancien décret n°99-269 du 6 avril 1999 à présent codifié dans le Code des transports sous l’article D.3222-1, suite à son abrogation par le décret n°2016-1550 du 17 novembre 2016) lequel, au cas particulier, lui permettait d’opposer une limitation de responsabilité fixée à 750 euros par colis ayant subi un dommage, montant bien inférieur à la valeur du plateau en marbre cassé.

Le donneur d’ordre avait tout essayé pour écarter cette clause limitative de responsabilité. Mais peine perdue, rien n’y a fait.

En effet, il est de jurisprudence constante que les clauses limitatives de responsabilité prévues par les contrats types de transport sont, sauf démonstration d’une faute inexcusable du transporteur au sens de l’article L.133–8 du Code de commerce, en principe, inattaquables.

La Cour d’appel a ainsi écarté en premier lieu l’argument tiré de la prohibition par le législateur des clauses abusives car elle est inapplicable entre professionnels. Soulignons, à cet égard, que depuis la réforme du Code civil par l’ordonnance du 10 février 2016, l’article 1171 qui sanctionne le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dans les contrats d’adhésion n’aurait pas plus fourni d’argument au donneur d’ordre, le contrat type de transport n’étant pas un contrat d’adhésion puisqu’il a été négocié par les professionnels du secteur d’activité concerné.

En second lieu, la Cour d’appel a également écarté l’argument issu de l’article L.442-6 I 2° du Code de commerce qui prohibe le fait de soumettre un partenaire à des droits et obligations créant un déséquilibre significatif. En effet, ce texte visant uniquement une hypothèse de responsabilité extracontractuelle source de dommages et intérêts ne peut être invoqué pour obtenir la nullité d’une clause limitative de responsabilité. Ajoutons que depuis l’ordonnance du 10 février 2016, le donneur d’ordre peut tenter d’invoquer l’article 1170 du Code civil qui dispose : « Toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite ». Toutefois, la doctrine considère que cet article ne saurait être de quelque effet sur les clauses limitatives d’indemnité des contrats types de transport car elles sont de droit spécial, d’origine légale et réglementaire et d’application supplétive.

Enfin, rappelons qu’il a été jugé qu’un manquement à une obligation essentielle n’est pas forcément constitutif d’une faute lourde, remplacée depuis 2009 par la faute inexcusable, qui seule peut mettre en échec la clause limitative de responsabilité d’application supplétive du contrat type. Ainsi, à défaut de prévision d’une clause de déclaration de valeur ou de déclaration d’intérêt spécial à la livraison qui permet de rehausser le niveau de réparation, la clause limitative aura vocation à s’appliquer.

Auteur

Francine Van Doorne, avocat Counsel, spécialisée en droit commercial et droit de la distribution