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Règlement Prospectus : du document de référence à l’URD, il n’y a qu’un pas?

Règlement Prospectus : du document de référence à l’URD, il n’y a qu’un pas?

Une des innovations les plus remarquées du règlement Prospectus n°2017/1129 du 14 juin 2017 est sans doute l’introduction au niveau européen en juillet 2019 du « document d’enregistrement universel » (URD pour universal registration document). Pour les émetteurs français, le caractère novateur de l’URD a pu sembler, à juste titre, moins évident que pour les autres émetteurs de l’Union européenne. Et pour cause, l’URD est largement inspiré du « document de référence » bien connu et pratiqué en France depuis déjà de nombreuses années.

Ainsi, à l’instar du document de référence, l’URD se veut avant tout un document polyvalent. Il a d’abord pour vocation de permettre aux émetteurs fréquents de tenir à disposition du marché un document décrivant pour chaque exercice financier « l’organisation, les activités, la situation financière, les résultats, les perspectives, le gouvernement et la structure de l’actionnariat de l’entreprise ». L’URD pourra à ce titre valoir dépôt des rapports financiers requis par la Directive Transparence sous réserve du respect de certaines conditions. Un autre objectif affiché de l’URD est de permettre aux émetteurs souhaitant tirer rapidement profit des fenêtres de marché opportunes de bénéficier, selon certaines modalités, d’une procédure d’approbation accélérée (5 jours ouvrables au lieu de 10) en cas d’émission de titres donnant lieu à l’établissement d’un prospectus. L’URD, document « prêt à l’emploi » et déjà validé, pourra alors être utilisé en tant que partie constitutive d’un prospectus, ce qui justifie un raccourcissement des délais.

Comme son modèle français, l’URD sera établi sur une base volontaire et ne sera accessible qu’aux émetteurs ayant déjà des titres admis à la négociation sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociations. La procédure de soumission de l’URD est aussi calquée sur celle existant déjà en France : une approbation préalable pendant deux exercices consécutifs (contrôle a priori), puis un simple dépôt pour les exercices ultérieurs, sous réserve de contrôles aléatoires postérieurs au dépôt (contrôle a posteriori), et à condition que ces dépôts annuels soient ininterrompus.

Si les émetteurs et les praticiens français peuvent se targuer d’afficher une certaine avance sur l’exercice de mise en œuvre de cette nouveauté européenne, ils seraient toutefois aussi bien avisés de tenir compte de quelques subtiles différences entre le document de référence tel qu’ils le connaissent et l’appliquent et le futur URD européen.

A titre d’exemple, l’URD pourra, dans certains cas, faire l’objet d’une demande de passeport dans un autre Etat membre, au même titre qu’un prospectus. Les émetteurs devront prêter attention au fait que toute demande de passeport entraînera l’obligation de soumettre l’URD à l’approbation de l’autorité compétente d’origine, quand bien même ils bénéficient d’un contrôle a posteriori et qu’aucun contrôle aléatoire n’est en cours.

En outre, si les émetteurs faisant l’objet d’un contrôle aléatoire de leur document de référence avaient la possibilité de ne tenir compte des observations non significatives de l’Autorité des marchés financiers qu’au prochain dépôt de leur document de référence, ces observations devront à l’avenir être intégrées dès l’établissement du prospectus lorsque l’URD sera utilisé en tant que partie constitutive d’un prospectus.

Enfin, il convient de noter que le législateur européen a poussé la logique de la polyvalence jusqu’au bout : un URD pouvant être utilisé aussi bien pour un prospectus de titres de dette que de capital, son contenu ne devrait être fondé « que » sur les exigences d’information les plus larges, à savoir celles applicables aux titres de capital décrites en annexe 1 du règlement CE n°809/2004. Il s’en suit que les émetteurs qui établissent leur document de référence sur la base d’annexes différentes (telle l’annexe banques) devraient très rapidement se conformer à cette exigence, notamment s’ils veulent bénéficier de la clause de grand-père assurant le bénéfice du contrôle a posteriori dès juillet 2019 aux seuls émetteurs ayant établi leur document de référence sur la base de l’annexe 1 relative aux titres de capital.

Dans l’attente de la publication des « standards techniques » de l’ESMA sur l’URD qui détailleront notamment les critères de revue de l’URD, il est important que les émetteurs identifient les points de divergence avec le régime du document de référence et anticipent les mesures à prendre pour se conformer à la nouvelle règlementation afin de s’assurer une transition aussi souple que possible d’ici juillet 2019, date d’entrée en application du règlement Prospectus.

 

Auteur

Rosetta Ferrère, avocat Counsel,  Marchés de capitaux.

 

Règlement Prospectus : du document de référence à l’URD, il n’y a qu’un pas? – L’analyse juridique parue dans le magazine Option Finance le 13 novembre 2017