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Fiscalité : réponse en demi-teinte pour les plus-values en report

Fiscalité : réponse en demi-teinte pour les plus-values en report

La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a accepté de se prononcer sur la conformité au droit de l’UE des mécanismes de report en cas d’échange de titres en vigueur avant le 1er janvier 2000.

Au fil des ans, la loi a prévu plusieurs régimes de report d’imposition pour les plus-values constatées à l’occasion de certains échanges de titres ou d’opérations de cession-réinvestissement.

Dans le cadre de ces opérations, une plus-value est constatée et déclarée, mais mise en report d’imposition. La taxation est en principe déclenchée par la cession des titres reçus en échange.

La plupart des échanges de titres intervenus depuis le 1er janvier 2000 ont cessé d’être visés par ce mécanisme complexe. Ils relèvent du sursis d’imposition, dans le cadre duquel la plus-value ne sera constatée qu’au moment de la cession des titres reçus en échange.

Mais les reports constatés dans le passé n’ont pas tous pris fin. Par ailleurs, un mécanisme de report obligatoire est prévu pour les échanges réalisés au bénéfice d’une société que le contribuable contrôle (article 150-0 B ter du CGI).

Dans une importante décision du 22 mars 2018, Jacob et Lassus, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a accepté de se prononcer sur la conformité au droit de l’UE des mécanismes de report en cas d’échange de titres en vigueur avant le 1er janvier 2000.

En cas de changement de domicile fiscal

La CJUE a jugé que la constatation, à la date de l’échange, d’une plus-value qui ne sera imposable qu’au terme du report n’est pas contraire à la directive fusions. Cette directive prévoit un objectif de neutralité fiscale des échanges.

Ainsi, le fait de changer de domicile fiscal postérieurement à l’apport ne fait pas pour autant échapper la plus-value en report à l’imposition en France. La cession des titres reçus en échange – même non imposable en France en vertu des conventions fiscales – déclenchera l’imposition en France de la plus-value reportée.

Mais la CJUE ajoute une réserve : la France doit permettre au contribuable non-résident de réduire cette plus-value imposable de la moins-value de cession éventuellement constatée sur les titres reçus en échange.

La question de l’abattement pour durée de détention

On peut noter que la décision n’apporte pas d’argument clair en faveur des contribuables dont le report d’imposition a pris fin à compter du 1er janvier 2013, et qui ont été privés de l’abattement pour durée de détention.

Cette question n’était pas posée dans les affaires jugées, mais si la CJUE avait rendu une décision de non-conformité du mécanisme du report, cela aurait clairement permis de reconsidérer les effets de la décision n°2016-538 QPC du 22 avril 2016.

Par cette décision, le Conseil constitutionnel a jugé qu’il résulte d’une jurisprudence constante que « lorsqu’une plus-value mobilière fait l’objet d’un report d’imposition […] l’assiette de l’imposition est déterminée selon les règles applicables à la date de cette opération ». Il en résulte que l’administration continue à refuser d’appliquer l’abattement aux plus-values mises en report avant 2013 au motif que cet abattement n’existait pas encore à la date de la constatation de la plus-value imposable.

 

Auteur

Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale

 

Fiscalité : réponse en demi-teinte pour les plus-values en report – Article publié dans Les EchosFr le 4 avril 2018