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Avantages et inconvénients de la rupture conventionnelle collective

Avantages et inconvénients de la rupture conventionnelle collective

Les ordonnances Macron ont créé un dispositif permettant de réduire les effectifs sans les contraintes résultant du droit du licenciement pour motif économique. Le strict encadrement de ses modalités d’utilisation devrait cependant conduire à son utilisation de façon parcimonieuse.

 

Rappel de la situation antérieure

Avant les ordonnances Macron, un plan de départs volontaires (PDV) pouvait être envisagé :

    • (i) soit comme un plan de réduction des effectifs exclusif de tout licenciement contraint (PDV « autonome ») ;
    • (ii) soit comme s’inscrivant dans un projet global de réduction des effectifs dont il ne constituait qu’une des mesures préalables destinées à éviter des licenciements économiques, licenciements qui, pour autant, n’étaient pas exclus et pouvaient être mis en œuvre en cas d’insuffisance du nombre de volontaires (PDV « mixte »).

 

Dans les deux cas cependant ces plans s’inscrivaient dans le cadre des dispositions sur le licenciement économique et obligeaient ainsi à mettre en œuvre la procédure correspondante impliquant notamment l’élaboration d’un plan de sauvegarde de l’emploi, PSE, (avec nécessité d’un motif économique, droit à une expertise économique des représentants du personnel, validation du dispositif et de la procédure par l’administration du travail, etc.).

 

Le nouveau régime

L’ordonnance Macron relative à la rupture conventionnelle collective a instauré, via ce mécanisme, un nouveau régime propre des PDV « autonomes » (cf. point (i) ci-dessus) excluant l’application du droit du licenciement pour motif économique.

A cet égard et sur le fond, il doit tout d’abord bien s’agir – pour reprendre la distinction rappelée ci-dessus – d’un PDV « autonome » et non d’un PDV « mixte » : ne sont ainsi concernés que les plans « excluant tout licenciement pour atteindre les objectifs assignés en termes de suppressions d’emplois » (article L.1237-19 du Code du travail).

En d’autres termes et si l’objectif de suppression d’emplois n’est pas atteint en raison de l’insuffisance du nombre de volontaires, il n’est pas possible de recourir ensuite à des départs contraints pour atteindre cet objectif.

S’agissant de la mise en œuvre ensuite, la rupture conventionnelle collective doit être mise en place par un accord collectif majoritaire (plus de 50% des voix des organisations syndicales représentatives) prévoyant principalement (http://travail-emploi.gouv.fr/droit-du-travail/rupture-de-contrats/article/la-rupture-conventionnelle-collective) :

    • les modalités et conditions d’information du comité social et économique (CSE) ;
    • le nombre maximal de départs envisagés, de suppressions d’emplois associées et la durée pendant laquelle des ruptures de contrat de travail peuvent être engagées sur le fondement de l’accord ;
    • les conditions que doit remplir le salarié pour en bénéficier (par exemple, une condition d’ancienneté) – il est cependant interdit d’opérer un ciblage sur les salariés âgés ;
    • les modalités de présentation et d’examen des candidatures au départ des salariés, comprenant les conditions de transmission de l’accord écrit du salarié au dispositif prévu par l’accord collectif ;
    • les modalités de conclusion d’une convention individuelle de rupture entre l’employeur et le salarié et d’exercice du droit de rétractation des parties ;
    • les modalités de calcul des indemnités de rupture garanties au salarié, qui ne peuvent être inférieures aux indemnités légales dues en cas de licenciement ;
    • les critères de départage entre les potentiels candidats au départ ;
    • des mesures visant à faciliter l’accompagnement et le reclassement externe des salariés sur des emplois équivalents, telles que le congé de mobilité, des actions de formation, de validation des acquis de l’expérience (VAE) ou de reconversion ou des actions de soutien à la création d’activités nouvelles ou à la reprise d’activités existantes par les salariés ;
    • les modalités de suivi de la mise en œuvre effective de l’accord portant rupture conventionnelle collective (par exemple, mise en place d’un comité de suivi réuni selon la périodicité fixée par l’accord).

 

Dans ce cadre et sous réserve de la validation de l’accord par l’autorité administrative concernée (les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi, Direccte), l’acceptation par l’employeur de la candidature du salarié au départ volontaire emporte rupture du contrat de travail d’un commun accord des parties (qui doit être autorisée par l’inspection du travail pour les salariés protégés).

Enfin le régime social et fiscal des indemnités de rupture est aligné sur celui des indemnités versées dans le cadre d’un PSE (sous la réserve d’un éventuel assujettissement au forfait social que les textes ne permettent pas, à ce jour et en dépit d’une position en sens contraire de l’administration, de totalement écarter).

Ces dispositions ont été précisées dans un « questions-réponses » diffusé par le ministère du travail (http://travail-emploi.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/guides/QR-RCC).

 

Pour quelle utilisation ?

Ce nouvel outil peut s’avérer pertinent pour faire face à la nécessité de réduire les effectifs de façon générale ou en ciblant certaines activités ou catégories d’emploi.

 

L’intérêt principal de ce dispositif par rapport à un PSE est d’éviter l’application du droit du licenciement économique : sécurité juridique des départs (comme avec une rupture conventionnelle individuelle), absence de nécessité d’une motivation économique, pas d’expert économique des représentants du personnel, climat moins anxiogène pour l’entreprise qu’un PSE, publicité négative probablement moindre, etc.

 

Autre avantage notable : le délai de mise en œuvre peut être bien plus rapide qu’un licenciement économique collectif, ce qui constitue un point d’intérêt majeur si l’on observe les difficultés rencontrées par les entreprises pour mobiliser leurs salariés en période de PSE.

En revanche le dispositif de la rupture conventionnelle collective n’apparait guère adapté pour atteindre un objectif de fermeture de sites et/ou d’arrêt d’activité dans la mesure où il n’est pas possible dans ce dispositif de faire partir les salariés qui refuseraient un départ volontaire.

 

En d’autres termes ce dispositif doit réellement permettre aux salariés refusant de se porter volontaires de continuer à exercer leurs activités dans des conditions respectueuses de leurs droits (et sans leur imposer de mobilité géographique ou fonctionnelle modifiant leur contrat de travail).

 

Par ailleurs et s’il est théoriquement possible dans la rupture conventionnelle collective de ne prévoir que le versement de l’indemnité de licenciement, les organisations syndicales majoritaires dont la signature est nécessaire exigeront probablement des mesures additionnelles dont le coût pourra in fine ne pas être très éloigné de celui d’un PSE.

En d’autres termes, l’avantage ne sera probablement pas financier mais surtout opérationnel, notamment sur le plan de la sécurité juridique de la mise en œuvre des départs et du calendrier de mise en œuvre.

 

Synthèse des avantages et inconvénients de la rupture conventionnelle collective

Avantages :

    • sécurité juridique des départs ;
    • absence de nécessité d’une motivation économique ;
    • procédure relativement simple : engagement d’une négociation, information du CSE et de l’Administration, signature de l’accord et validation de l’accord par la Direccte puis adhésion des salariés formalisée par une rupture d’un commun accord ;
    • absence de nécessité de prévoir l’intégralité des mesures d’un PSE (congé de reclassement, mesures de reclassement internes, etc.) ;
    • implémentation dans un délai plus court qu’un PSE.

 

Inconvénients :

    • outil ne concernant que les départs volontaires et obligeant ainsi à conserver les emplois excédentaires si l’objectif chiffré de départs volontaires n’est pas atteint : ce dispositif n’est donc pas adapté à une fermeture totale de site par exemple ;
    • pas de mise en œuvre unilatérale car nécessité impérative d’une signature par les organisations syndicales majoritaires.

 

Si les premiers mois d’application de ce dispositif permettent de constater son adhésion par nombre d’entreprises, il conviendra de suivre avec attention la pratique, comme probablement la jurisprudence, de ce singulier outil de réduction des effectifs.

 

Article publié dans les Echos EXECUTIVES du 18/07/2018