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Dispositif spécifique d’activité partielle : nouvel outil de soutien des entreprises

Dispositif spécifique d’activité partielle : nouvel outil de soutien des entreprises

Le dispositif spécifique d’activité partielle, inscrit au cœur du plan de relance, vise à assurer le maintien dans l’emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité.

Présentation du dispositif spécifique d’activité partielle

L’article 53 de la loi n°2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, a institué ce nouveau dispositif spécifique d’activité partielle.

Ce dispositif a, ensuite, été précisé par un décret n°2020-926 du 28 juillet 2020, modifié par un décret n°2020-1188 du 29 septembre 2020.

Quelques hésitations sur le nom de ce dispositif ont pu être constatées : d’abord intitulé « Activité Réduite pour le Maintien en Emploi » (ARME) dans la loi, cette appellation trop guerrière a été rejetée par les partenaires sociaux au profit de celle, plus neutre, d’« Activité Partielle de Longue Durée » (APLD). Les décrets utilisent, eux, le terme de « Dispositif Spécifique d’Activité Partielle » (DSAP).

Conditions de mise en place

Ce dispositif est mis en place :

    • par un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe ;
    • ou par un accord collectif de branche étendu.

 

Dans ce dernier cas, l’employeur doit alors établir, après consultation du comité social et économique (CSE) s’il existe, un document unilatéral précisant les conditions de mise en œuvre, au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, des dispositions de l’accord de branche.

Le secteur de la métallurgie, SYNTEC et la bijouterie ont signé de tels accords de branche. Les accords de la métallurgie et de SYNTEC ont été étendus.

Le décret précité du 28 juillet 2020 définit le contenu de l’accord collectif ou du document unilatéral qui doit prévoir :

    • un préambule présentant un diagnostic sur la situation économique et les perspectives d’activité de l’établissement, de l’entreprise, du groupe ou de la branche ;
    • la date de début et la durée d’application du dispositif ;
    • les activités et salariés1 auxquels s’applique le dispositif ;
    • la réduction maximale de l’horaire de travail en deçà de la durée légale ;
    • les engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle ;
    • les modalités d’information des organisations syndicales de salariés signataires et des institutions représentatives du personnel sur la mise en œuvre de l’accord. Cette information a lieu au moins tous les trois mois.

 

Ce décret ajoute que « Sauf stipulation contraire de l’accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe validé par l’autorité administrative ou de l’accord collectif de branche étendu, les engagements en matière de maintien de l’emploi portent sur l’intégralité des emplois de l’établissement ou de l’entreprise ». Cette disposition permet donc à l’accord collectif d’exclure du champ d’application des engagements en matière de maintien de l’emploi une partie des salariés qui, dès lors, pourraient faire l’objet d’un licenciement économique, le cas échéant dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

Le bénéfice du dispositif ne peut être accordé que dans la limite de 24 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 36 mois consécutifs.

S’agissant d’un dispositif d’activité partielle, le principe du caractère collectif du placement en activité partielle est maintenu, d’autant plus que le système d’individualisation prévu par l’article 10 ter de l’ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020 est inapplicable au DSAP2. Toutefois, il semble possible, lors de la rédaction de l’accord, de faire une application plus fine du caractère collectif.

La réduction de l’horaire de travail ne peut être supérieure à 40 % de la durée légale (ou 50 % sur décision de l’autorité administrative). Cette réduction s’apprécie pour chaque salarié concerné sur la durée d’application du dispositif prévue par l’accord collectif ou le document unilatéral. Cela peut donc permettre la suspension temporaire de l’activité.

Par ailleurs, un certain nombre de dispositions de l’activité partielle « classique » sont expressément inapplicables au DSAP3, pour conforter le caractère « spécifique » de ce DSAP.

Indemnisation de l’employeur et du salarié

Le taux horaire de l’allocation versée à l’employeur est égal, pour chaque salarié placé dans le DSAP, à 60 % de la rémunération horaire brute, limitée à 4,5 fois le taux horaire du SMIC. Ce taux horaire ne peut être inférieur à 7,23 euros, sauf pour les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation.

Le salarié placé en activité partielle spécifique reçoit une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute, ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l’entreprise ou, lorsqu’elle est inférieure, sur la base de la durée collective du travail ou de la durée stipulée au contrat de travail. La rémunération maximale prise en compte pour le calcul de cette indemnité horaire est égale à 4,5 fois le taux horaire du SMIC.

Contrôle de l’Administration

L’accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe est transmis à l’Administration pour validation. Le document unilatéral établi en application de l’accord de branche est, lui, transmis à l’Administration pour homologation, le contrôle de l’Administration étant alors plus poussé. Cette transmission est possible jusqu’au 30 juin 2022.

La décision de validation ou d’homologation de l’Administration vaut autorisation d’activité partielle spécifique pour une durée de 6 mois. L’autorisation est renouvelée par période de 6 mois, au vu du bilan adressé par l’employeur. En effet, l’employeur doit adresser à l’Administration, avant l’échéance de chaque période d’autorisation, un bilan portant notamment sur le respect de ses engagements en matière d’emploi.

L’Administration demandera à l’employeur le remboursement des sommes perçues pour chaque salarié placé en activité partielle spécifique dont le licenciement pour motif économique est prononcé pendant la durée de recours au dispositif.

Lorsque le licenciement pour motif économique concerne un salarié qui n’était pas placé en activité partielle spécifique mais que l’employeur s’était engagé à maintenir dans l’emploi, la somme à rembourser sera égale, pour chaque rupture, au rapport entre le montant total des sommes versées à l’employeur au titre de l’allocation d’activité partielle spécifique et le nombre de salariés placés en activité partielle spécifique.

Toutefois, afin de rassurer les entreprises sur le recours au DSAP, il est prévu certaines exceptions à ce remboursement lorsque la situation de l’entreprise est devenue critique :

    • « Le remboursement de tout ou partie des sommes dues par l’employeur peut ne pas être exigé s’il est incompatible avec la situation économique et financière de l’établissement, de l’entreprise ou du groupe.
    • Le remboursement dû par l’employeur n’est pas exigible si les perspectives d’activité se sont dégradées par rapport à celles prévues dans l’accord collectif ou le document de l’employeur mentionnés à l’article 1er »4.

 

La rédaction du préambule de l’accord sera essentielle pour bien préciser les perspectives d’activité attendues. Si celles-ci n’étaient pas au rendez-vous, une porte de sortie existerait donc pour l’employeur. Cet élément paraît très rassurant pour les entreprises qui hésiteraient à se lancer dans le DSAP par crainte d’un futur remboursement.

Enfin, l’Administration peut interrompre le versement de l’allocation lorsqu’elle constate que les engagements en matière d’emploi ne sont pas respectés.

Pour conclure, ce dispositif spécifique d’activité partielle est un outil très intéressant pour aider les entreprises à faire face à la crise sanitaire liée au Covid-19 dont les impacts sur l’activité sont durables.

Il est, néanmoins, essentiel de bien réfléchir à la mise en place de ce dispositif et à la rédaction de l’accord collectif ou du document unilatéral, en particulier sur les engagements en matière d’emploi.

Cette rédaction doit tenir compte de la situation de l’entreprise, de son organisation, de ses contraintes opérationnelles, de ses projets, de ses perspectives d’activité, etc. Il s’agit d’un vrai travail « sur-mesure ». Il ne fait ainsi aucun doute qu’il s’agit d’un nouvel outil de restructuration de l’entreprise à la hauteur de la crise connue actuellement, outil s’ajoutant à ceux existants : rupture conventionnelle collective (RCC), congé de mobilité, licenciements économiques, PSE, plan de départs volontaires dans les PSE et accord de performance collective (APC).

(1) Les cadres dirigeants sont-ils éligibles ? Rien n’est moins sûr.

(2) Article 53 VIII de la loi 2020-734 du 17 juin 2020

(3) Cf. article 9 II du décret 2020-926 du 28 juillet 2020

(4) Article 2 du décret 2020-926 du 28 juillet 2020 modifié par le décret 2020-1188 du 29 septembre 2020

Article publié dans Les Echos Executives le 15/10/2020