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Loi Hamon : un dispositif contraignant et porteur d’incertitudes

Loi Hamon : un dispositif contraignant et porteur d’incertitudes

La loi du 31 juillet 2014, dite loi Hamon, a introduit une obligation d’information des salariés à l’occasion de la cession de leur entreprise. L’objectif était de donner aux salariés la possibilité de présenter une offre de rachat. Six ans après, l’efficacité et la pertinence du dispositif sont débattues.

Explications

 

Un champ d’application restreint

Après quelques hésitations, il paraît aujourd’hui établi que le dispositif d’information des salariés s’impose (i) aux entreprises de moins de 250 salariés réalisant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros ou dont le total de bilan n’excède pas 43 millions d’euros, (ii) en cas de vente d’un fonds de commerce ou de plus de 50 % des parts sociales ou du capital.

Seules les ventes sont visées, à l’exclusion des autres opérations de transfert de propriété (donation, apport, fusion, convention de successeur, etc.).

Pourtant certaines incertitudes demeurent.

 

La question de l’application de la loi Hamon aux salariés d’une succursale française lors de cession des titres de la sociétés étrangère n’est pas tranchée.

 

En l’absence de toute précision, la prudence recommande d’informer les salariés français quand bien même la vente concernerait les titres de la société étrangère, mais cela paraît souvent totalement disproportionné et très éloigné de l’objectif premier de la loi.

A l’inverse, la loi Hamon ne trouve pas à s’appliquer lorsque la cession porte sur les titres d’une société holding sans personnel, quand bien même cette dernière détiendrait une filiale opérationnelle dans laquelle il y a des salariés, de facto privés de ce droit d’information.

 

Les modalités de l’information

L’obligation s’exerce différemment selon que l’entreprise dispose ou non de représentants du personnel. Les dispositions du Code de Commerce n’ont pas été modifiées à la suite de la réforme des représentants du personnel et continuent de faire référence au comité d’entreprise et à articuler la procédure Hamon autour de la consultation, ce qui n’est pas sans créer des difficultés en présence d’un comité social et économique (CSE) dans une entreprise de moins de 50 salariés, qui ne dispose pas d’attribution consultative en cas de cession.

Les dispositions du Code de commerce doivent selon nous aujourd’hui être interprétées comme suit:

    • dans les entreprises de moins de 50 salariés ou dans celles de plus de 50 salariés sans CSE, le chef d’entreprise doit informer les salariés au plus tard deux mois avant la vente ;
    • dans les entreprises de plus de 50 salariés avec un CSE, les salariés sont informés au plus tard concomitamment à l’information/consultation du CSE sur l’opération envisagée.

 

Enfin, l’application de ces dispositions suscite des questions dans les opérations complexes impliquant la filialisation d’une activité d’une société dotée d’un CSE par l’apport à une Newco de cette activité immédiatement suivie de la cession des titres de cette Newco à un tiers.

Une application littérale des dispositions légales conduirait à devoir appliquer la loi Hamon à l’occasion de la cession des titres de la Newco et donc à respecter le délai de deux mois si cette Newco n’est pas dotée de CSE.

Dans la mesure où le plus souvent tout a lieu concomitamment, la pratique a tendance à purger la loi Hamon à la fin de la procédure d’information/ consultation du CSE de la société apporteuse dès lors que ladite consultation porte bien sur l’ensemble de l’opération. Mais là encore, une confirmation serait bienvenue.

 

Sanction

Depuis 2015, la sanction a été assouplie et consiste en une amende civile pour un montant maximal de 2 % du montant de la vente. Mais qui peut être condamné : le chef d’entreprise lui-même, le cédant, le cessionnaire, les deux ? De notre point de vue, le texte est suffisamment général pour que le doute soit permis, ce qui n’est pas pour rassurer les parties aux opérations.

Après six ans de mise en œuvre, il serait salutaire que le Code de commerce soit mis à jour et qu’un nouveau questions-réponses soit publié pour mieux préciser les contours d’un dispositif qui se voulait pertinent mais qui se révèle être un casse-tête juridique.

 

Article publié dans La Lettre des Fusions-Acquisitions et du Private Equity du 24/12/2020