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Frais de santé : que faire avant et après le 30 juin 2014 ?

La loi de sécurisation de l’emploi et le décret du 9 janvier 2012 modifient sensiblement les régimes de protection sociale, et particulièrement les régimes de remboursement de frais de santé. Pour les employeurs, plusieurs dates sont à retenir en 2014 afin de respecter les nouvelles obligations en la matière.

1er juin 2014 : application des nouvelles conditions de la portabilité des garanties de frais de santé

La loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 a redéfini les conditions de la portabilité des garanties de frais de santé et prévoyance. Depuis le 1er juin 2014, la portabilité des garanties de frais de santé est désormais gratuite pour l’ancien salarié licencié pour tout motif autre que la faute lourde, ainsi que pour ses ayants-droit s’ils étaient affiliés à un régime collectif souscrit par l’employeur. Pour rappel, la durée du maintien des garanties de frais de santé est portée à douze mois (maximum, en fonction de la durée du contrat de travail), contre neuf mois sous l’empire de l’ANI du 11 janvier 2008.

Que faire ? L’employeur doit veiller à ce que son contrat d’assurance soit modifié pour prévoir le nouveau dispositif de portabilité. Se posera alors la question du financement de cette portabilité, le texte n’indiquant pas qui doit la financer. Dans la plupart des cas, elle prendra la forme d’une hausse « classique » des cotisations, répartie entre les salariés et l’employeur selon les règles normalement applicables dans l’entreprise. Mais certains DRH refusent une augmentation mécanique et préfèrent payer lors de chaque départ, assumant alors cependant la totalité du coût de la portabilité. En tout état de cause, il devra veiller à « signaler » la portabilité dans le certificat de travail (cf notre article de ce jour : « L’incidence du maintien des garanties frais de santé sur le certificat de travail »).

Quelles difficultés ? Les nouvelles dispositions transposées à l’article L.911-8 du Code de la sécurité sociale sont entrées en vigueur le 1er juin 2014 pour les garanties de frais de santé, à savoir celles liées aux risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liées à la maternité. Mais jusqu’au 1er juin 2015, les anciennes conditions de portabilité (prévues par l’ANI du 11 janvier 2008) resteront applicables pour les garanties de prévoyance (décès, incapacité, invalidité). Un cofinancement de l’ancien salarié peut donc continuer à être requis pour la prévoyance pendant cette période, et celui-ci peut renoncer à la portabilité de cette couverture. Un régime a deux vitesses existera ainsi jusqu’au 1er juin 2015.

1er juillet 2014 : mise en conformité des régimes avec le décret du 9 janvier 2012

Tous les régimes de protection sociale complémentaire (frais de santé, prévoyance et retraite supplémentaire) devront être conformes aux dispositions du décret du 9 janvier 2012 relatif au caractère collectif et obligatoire des garanties de protection sociale complémentaire au plus tard le 1er juillet 2014 (et même avant pour les régimes ne bénéficiant pas de la période transitoire).

Concernant les régimes de remboursement de frais de santé, pour les entreprises disposant déjà de tels régimes, cette mise en conformité conduira à une forme de généralisation avant l’heure. En effet, si le décret admet que les régimes de remboursement de frais de santé puissent être différents entre certaines catégories de salariés, c’est à la condition toutefois que l’ensemble du personnel soit couvert. Ainsi, des différences de couverture ou de cotisations pourront exister notamment entre cadres et non cadres au sens de l’AGIRC, mais sous réserve que tous les salariés bénéficient d’une couverture. Cette situation est source de confusion pour les entreprises qui confondent souvent cette condition pour le bénéfice des exonérations sociales, qui ne concerne que les entreprises ayant déjà des régimes de remboursement de frais de santé, et la généralisation de la complémentaire santé qui concerne également celles n’ayant pas de régimes.

Généralisation de la complémentaire santé : trois dates à retenir dans le calendrier des négociations – 30 juin 2014, 1er juillet 2014 et 1er janvier 2016

La loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 a rendu obligatoire la mise en place d’une couverture collective à adhésion obligatoire en matière de frais de santé pour l’ensemble des salariés au plus tard à compter du 1er janvier 2016. Elle a fixé un calendrier des négociations en donnant la priorité aux branches professionnelles, qui ont jusqu’au 30 juin 2014 pour négocier sur la mise en place d’un régime de complémentaire santé au niveau de la branche. En revanche, à défaut d’un tel accord, la loi renvoi aux entreprises, en distinguant selon qu’elles ont ou non un délégué syndical désigné.

Que faire ?

  • Si un accord de branche est conclu au plus tard le 30 juin 2014 sur la mise en place d’une couverture santé pour tous les salariés (dans le cas où un tel accord n’existait pas déjà).

Les entreprises auront au minimum 18 mois pour s’y conformer (le cas échéant), mais auront en principe le choix de l’organisme assureur compte tenu désormais de l’interdiction des nouvelles clauses de désignation (cf. Un frein mais pas la fin des clauses de désignation)

  • Si aucun accord de branche n’est conclu avant le 1er juillet 2014 sur la mise en place d’une couverture santé pour tous les salariés (dans le cas où un tel accord n’existait pas déjà).

1. Si l’entreprise a un ou des délégués syndicaux qui ont été désignés et qu’elle n’a pas encore mis en place pour l’ensemble de son personnel une couverture conforme à celle prévue à l’article 1er de la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, elle doit ouvrir des négociations à compter du 1er juillet 2014 pour la mise en place de la couverture santé minimale mais sans obligation de conclure un accord En cas d’échec des négociations, elle devra mettre en place au 1er janvier 2016, par décision unilatérale, le régime minimal prévu par la loi.

2. Si l’entreprise n’a aucun délégué syndical désigné, elle a jusqu’au 1er janvier 2016, pour mettre en place, par décision unilatérale, le régime minimal prévu par la loi.

Quelles difficultés ? La principale est d’abord financière, dans la mesure où l’employeur doit financer au moins 50% de la couverture minimale. Mais la question se pose également pour les entreprises ayant un régime plus favorable que le minimum légal mais finançant moins de 50% de son coût : devront-elles majorer leur financement pour atteindre 50% ou suffira-t-il de démontrer que le financement patronal est supérieur à 50% du coût du régime minimal légal ? Ce serait logique mais le texte est muet sur ce point.

Entre l’été 2014 et le 1er janvier 2015 : la réforme des contrats responsables

Au milieu de ce calendrier déjà chargé, vient s’ajouter la réforme des contrats responsables. En effet, le gouvernement envisage de limiter la prise en charge des lunettes par les organismes complémentaires à 450 euros sur une période de deux ans (monture comprise, pour un équipement avec des verres simples) et 700 euros pour les verres complexes à partir de 2015. Des négociations sont encore en cours sur ce point. Si le texte était annoncé pour fin mai 2014, il n’est pas encore paru, mais  devrait prendre effet au 1er janvier 2015. Or, une grande majorité des contrats actuels devra être modifiée, car non conforme aux nouvelles règles.

 

Auteur

Florence Duprat-Cerri, avocat en droit social.

 

Article paru dans Les Echos Business le 9 juin 2014