Comment révoquer un représentant de proximité ?
22 juillet 2024
La cessation anticipée du mandat de représentant de proximité, en particulier sa possible révocation, est source d’interrogation en l’absence de disposition prévue par le Code du travail. Or, il se peut que cette révocation soit envisagée et, dans ce cas, se pose la question de sa faisabilité et de ses modalités.
Rappel des règles applicables à la mise en place des représentants du proximité
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Lorsqu’un accord d’entreprise conclu avec les organisations syndicales majoritaires fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place du Comité Social et Economique (CSE) est conclu en application de l’article L.2313-2 du Code du travail, il peut prévoir la mise en place de représentants de proximité qui sont soit, membres du CSE, soit désignés par lui (article L.2313-7 du Code du travail).
L’accord collectif définit également :
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- le nombre de représentants de proximité ;
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- les attributions des représentants de proximité, notamment en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail ;
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- les modalités de leur désignation ;
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- leurs modalités de fonctionnement, notamment le nombre d’heures de délégation dont bénéficient les représentants de proximité pour l’exercice de leurs attributions.
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La mise en place de représentants de proximité, qui est facultative, requiert donc la conclusion d’un accord collectif le prévoyant.
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La durée du mandat des représentants de proximité
Les représentants de proximité sont membres du CSE ou désignés par lui pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité (article L.2313-7 du Code du travail).
La durée des mandats des représentants de proximité est donc alignée sur celle des membres élus du CSE, soit quatre ans, sauf dérogation conventionnelle.
A l’expiration des mandats des élus du CSE, le mandat des représentants de proximité cesse et ne peut être poursuivi automatiquement sans qu’une nouvelle désignation soit effectuée, comme pour le délégué syndical.
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En revanche, le Code du travail ne prévoit pas la possibilité d’une cessation anticipée du mandat de représentant de proximité, qu’il soit élu au CSE ou désigné par lui.
Pour autant, l’absence de disposition légale sur la cessation anticipée du mandat ne saurait raisonnablement empêcher celle-ci, notamment si le représentant de proximité souhaite démissionner de son mandat.
En tout état de cause, comme les autres salariés dits « protégés » le Code du travail prévoit l’application du statut protecteur au représentant de proximité, c’est-à -dire l’obligation de demander l’autorisation de l’inspecteur du travail pour procéder à la rupture du contrat de travail pendant la durée du mandat et dans les 6 mois qui suivent l’expiration de celui-ci ou la disparition de l’institution (article L.2411-1 et L.2411-8 du Code du travail,).
Le cas de la révocation du mandat de représentant de proximité face à un vide législatif
L’article L.2313-7 du Code du travail du Code du travail laisse toute latitude à l’accord d’entreprise pour définir le régime applicable au représentant de proximité. Ainsi, à titre d’illustration, certains accords prévoient que la désignation et la révocation des représentants de proximité obéissent au parallélisme des formes.
Ainsi, par exemple :
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- L’accord l’UES ENGIE Ineo du 19 mars 2019 prévoit que :Â
« Article 5-2-2 – Les modalités de désignation des représentants de proximité
[…]
Il est convenu entre les parties que la révocation de l’un des représentants de proximité ainsi désigné ne pourra être réalisée que selon les mêmes modalités que leur désignation, à savoir par une résolution du CSE adoptée à la majorité de ses membres présents. »
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- L’accord d’entreprise de la société FOOT LOCKER du 12 octobre 2020 prévoit que :
« 3.4- Modalités de désignation
Les représentants de proximité sont désignés par le Comité Social et Economique de la Société FOOT LOCKER FRANCE à l’occasion d’un vote des élus titulaires [ou des suppléants qui les remplacent] via un vote à main levée.
Sont déclarés élus représentants de proximité les candidatures ayant remporté la majorité des suffrages exprimés.
[…]
 4.3- Une révocation du mandat des représentants de proximité pourra être mise en œuvre selon des modalités de vote identiques à celles mentionnées à l’article 3, étant précisé que cette révocation devra donner lieu à :
– deux votes successifs de la part du Comité Social et Economique de la Société FOOT LOCKER FRANCE,
– ces deux votes successifs étant exprimés au cours de deux réunions espacées de 15 jours calendaires,
– la révocation du mandat d’un représentant de proximité ne pourra être mise en l’œuvre qu’à la condition que ces deux votes successifs soient tous deux exprimés en faveur d’une telle révocation. »
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Si l’accord collectif prévoit des stipulations sur la procédure de révocation, il convient donc de respecter les modalités et les formalités prévues afin que soit régulière, opposable et pourvue d’effet juridique.
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Une difficulté peut surgir lorsque l’accord collectif ne prévoit pas de disposition sur la cessation anticipée du mandat de représentant de proximité. Pour autant, il est inconcevable que la cessation anticipée du mandat ne puisse intervenir :
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- à l’initiative du représentant de proximité, qui ne souhaite plus exercer cette fonction
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- ou à l’initiative du CSE qui l’a désigné et qui souhaite le remplacer pour diverses raisons.
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Les décisions de justice relatives à la révocation du représentant de proximité sont encore rares mais un arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence en date du 28 avril 2022 (n°21/04265) a jugé que l’employeur commet un trouble manifestement illicite en décidant de la révocation automatique et anticipée du représentant de proximité en raison de son changement d’affiliation syndicale en cours de mandat.
A notre sens, en l’absence de disposition légale ou conventionnelle, il serait logique de raisonner comme pour le délégué syndical pour lequel le Code du travail ne prévoit pas non plus de modalités de cessation anticipée du mandat.
En effet, le Code du travail prévoit seulement en son article L.2143-11, que :
« Le mandat de délégué syndical prend fin au plus tard lors du premier tour des élections de l’institution représentative du personnel renouvelant l’institution dont l’élection avait permis de reconnaître la représentativité de l’organisation syndicale l’ayant désigné. […] ».
En raison du silence de la loi en matière de révocation du délégué syndical, la jurisprudence (Cass. soc., 25 octobre 2005 n°04-16.089) a créé un régime prétorien relatif à la révocation d’un mandat syndical en se fondant sur les règles du droit commun du mandat.
En effet, en application des articles 2003 et 2004 du Code civil, le mandant est libre de révoquer à tout moment son mandataire.
La jurisprudence se réfère donc au droit commun du mandat afin d’autoriser la révocation du mandat de délégué syndical par l’organisation syndicale qui l’a désigné.
La révocation peut ainsi intervenir à tout moment et sans motif.
Si la révocation n’est notifiée qu’au seul mandataire, elle ne peut être opposée aux tiers qui ont traité dans l’ignorance de cette révocation (C. civ., art. 2005). Cette révocation doit donc nécessairement être portée à la connaissance de l’employeur.
Par conséquent, en l’absence de texte légal ou conventionnel et de jurisprudence à date, il nous semble possible de s’appuyer sur les dispositions du mandat civil afin de soutenir que le CSE, en tant que mandant, peut révoquer le représentant de proximité qu’il a désigné sans avoir à justifier d’un quelconque motif.
En matière de procédure, cette décision de révocation doit, comme la désignation donner lieu à une inscription préalable du sujet à l’ordre du jour de la réunion du CSE et faire l’objet d’une délibération prise par le CSE à la majorité des membres qui sera mentionnée au procès-verbal.
Enfin, il convient de noter que si le représentant de proximité est aussi membre du CSE, et qu’il est révoqué de son mandat d’élu au CSE sur proposition faite par l’organisation syndicale qui l’a présenté avec l’accord obtenu au scrutin secret de la majorité du collège électoral auquel il appartient en application de l’article L.2314-36 du Code du travail, son mandat de représentant de proximité prend alors fin en même temps du fait de sa perte de mandat d’élu au CSE.
En cas de cessation anticipée du mandat de représentant de proximité, le CSE peut ainsi désigner un nouveau représentant de proximité.
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Pour éviter les difficultés tenant à l’absence de dispositions relatives à la cessation anticipée du mandat des représentants de proximité tant dans la loi que dans l’accord collectif qui les a institués, il pourrait également être envisagé de prévoir le cas de la cessation anticipée du mandat dans le règlement intérieur du CSE.
AUTEUR
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