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Le mariage pour tous : une égalité fiscale en droit interne

Fondé sur le principe d’égalité, le projet de loi sur le mariage pour tous vise à conférer aux époux du même sexe un traitement fiscal identique à celui des époux hétérosexuels.

Les deux premiers articles du projet de loi ouvrant le mariage pour tous ont été adoptés par le Sénat, le 12 avril dernier, deux mois jour pour jour après sa transmission. Nous l’avons bien compris, l’ouverture du mariage va avoir un effet juridique sur la situation d’un certain nombre de personnes. Mais qu’en est-il d’un point de vue fiscal ? Cela aura-t-il des effets fiscaux non déjà prévus et permis par le pacte civil de solidarité ? Quelles difficultés cela peut-il entraîner au niveau international ?

L’impact fiscal au regard des couples de même sexe est perceptible après analyse de l’article 4 bis du projet de loi qui consacre l’adaptation de l’ensemble des dispositions législatives en vigueur. Cette coordination devra se faire, en application de l’article 38 de la Constitution, par voie d’ordonnance. Ainsi, les conjoints et parents de même sexe se verront appliquer l’ensemble des dispositions du Code général des impôts auxquelles sont actuellement soumis les conjoints et parents de sexe différent.

Mais cette égalité de traitement fiscal n’est pas nouvelle. En effet, depuis son instauration en 1999, le pacte civil de solidarité (Pacs) a fait progressivement l’objet d’aménagements rapprochant la situation fiscale des partenaires de celle des personnes mariées. Par conséquent, l’adoption du projet de loi ne fera que consacrer ce qui est actuellement valable pour les partenaires pacsés : les époux de même sexe constitueront un « foyer » soumis à une imposition commune. L’impôt sur le revenu sera calculé sur la base d’un revenu commun après application de l’ensemble des dispositions fiscales, dont le quotient familial. Le couple sera soumis aux impôts locaux via un seul avis d’imposition. L’impôt sur la fortune sera dû en fonction de la valeur totale du patrimoine du couple au 1er janvier de l’année d’imposition. Les abattements prévus pour le calcul des droits en cas de donation au profit du conjoint leur seront également applicables.

D’un point de vue successoral, la loi du 21 août 2007 avait permis la transmission en franchise des droits de succession du patrimoine du partenaire pacsé décédé au partenaire survivant. Ici, l’adoption du projet de loi apportera une différence, principalement au niveau des formalités à accomplir. En vertu du mariage, l’époux survivant a des droits sur la succession du défunt. Actuellement, le partenaire survivant n’a de droits sur la succession de l’autre que s’il est en bénéficiaire par le biais d’un testament. Cette condition désavantage les couples pacsés par rapport aux couples mariés en ce que la succession est limitée par la rédaction d’un acte soumis à des frais notariés et ne peut être attribuée que dans la limite de la quotité disponible après détermination de la réserve héréditaire.

L’adoption du projet de loi aura aussi des conséquences juridiques et fiscales sur la situation des enfants qui seront adoptés, que ce soit par la voie de l’adoption de l’enfant du conjoint ou de l’adoption en commun d’un enfant. Ainsi, en cas d’adoption plénière, la vocation successorale ainsi que les droits de mutation à titre gratuit de l’enfant adopté seront identiques à ceux d’un enfant de sang.

Si en droit interne, l’alignement du régime fiscal des époux de même sexe sur celui des époux de sexe différent semble être total, des difficultés surgissent dès lors qu’on entre dans la sphère internationale. Dès qu’un élément d’extranéité entre en jeu, il faut se retourner vers le droit international pour régler les problèmes.

Le projet de loi contient des règles de conflits de loi prévoyant les conditions de reconnaissance du mariage entre deux personnes de même sexe de nationalité différente ou célébré dans un pays étranger ne reconnaissant pas une telle union. Ces difficultés juridiques entraînent forcément des complications au niveau fiscal. Ainsi, un mariage valablement célébré en France entre un Français et un ressortissant étranger dont la loi personnelle ne reconnaît pas le mariage entre deux personnes de même sexe, risque de ne pas être reconnu dans le pays de ce dernier. Si tel est le cas, le couple parti s’installer dans le pays du conjoint étranger, bien que formant un couple marié au regard de la loi française, ne pourra pas accéder au régime national prévu pour les époux. La solution serait alors de divorcer en France et de contracter un partenariat dans le pays d’accueil, si un tel régime existe dans ce pays. Toutefois, se rencontreront des cas où la législation nationale du pays d’accueil permettra au couple marié selon la loi française de bénéficier des dispositifs fiscaux applicables aux couples liés par un partenariat dans le pays étranger. Il semblerait que le Luxembourg accepte une telle assimilation, entraînant ainsi l’application du régime du partenariat luxembourgeois à un couple de même sexe valablement marié à l’étranger.

 

A propos de l’auteur

Juliana Benamran, avocat spécialisé en matière de fiscalité internationale
Analyse parue sur le site LeRevenu.Com le 15 avril 2013

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