Les comités d’entreprise à l’ère de la transparence des comptes
22 avril 2015
La loi du 5 mars 2014 a entendu promouvoir une transparence des comptes des comités d’entreprise. Les décrets du 27 mars 2015 viennent d’être pris pour son application et invitent à une analyse de la portée de la réforme.
Une ambition affirmée : la transparence
La réforme est née d’une concertation avec les partenaires sociaux soulignant la nécessité de favoriser une plus grande transparence des comptes des comités d’entreprise. Elle s’inscrit dans le droit fil des dispositions concernant le financement des organisations syndicales.
Plusieurs mesures portent cette ambition et auront des conséquences très concrètes sur le fonctionnement des comités d’entreprise.
Des obligations nouvelles de tenue des comptes
Les comités d’entreprise n’étaient antérieurement pas tenus de respecter les dispositions du Plan Comptable Général, ni même de se conformer à un quelconque référentiel comptable.
La loi impose désormais à tous les comités d’entreprise de tenir une comptabilité.
La portée de cette obligation varie selon la taille du comité d’entreprise.
Comités de petite taille. Les comités dont les ressources annuelles ne dépassent pas 153 000 euros peuvent se contenter d’établir une comptabilité ultra-simplifiée consistant à tenir un livre de comptes retraçant chronologiquement les montants et l’origine des dépenses qu’ils réalisent et des recettes qu’ils perçoivent, et une fois par an, un état de synthèse simplifié portant sur les informations complémentaires relatives à leur patrimoine et à leurs engagements en cours.
Comités d’entreprise de taille intermédiaire. Les comités de taille intermédiaire (ceux qui n’excèdent pas au moins deux de ces trois critères : 50 salariés ou équivalents temps plein ; 1,55 millions d’euros de bilan ; 3,1 millions d’euros de ressources) peuvent adopter une présentation simplifiée de leurs comptes et n’enregistrer leurs créances et leurs dettes qu’à la clôture de l’exercice. Ils devront confier la mission de présentation de leurs comptes annuels à un expert-comptable dont ils prendront en charge les honoraires sur leur subvention de fonctionnement.
Comités d’entreprise de grande taille. Il s’agit des comités d’entreprise qui excèdent au moins deux des trois critères. La loi soumet ces comités à des obligations comptables de droit commun. Comme pour les comités d’entreprise de taille intermédiaire, l’annexe de leurs comptes devra fournir les informations sur les transactions significatives qu’ils ont effectuées. Ces comités d’entreprise devront, à compter de 2016, faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes. Le commissaire aux comptes dispose d’un droit de déclencher une procédure d’alerte lorsqu’il relève des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation du comité d’entreprise.
Rapport d’activité et de gestion. Tous les comités d’entreprise, quelle que soit leur taille, doivent établir un rapport présentant des informations qualitatives sur leurs activités et sur leur gestion financière, de nature à éclairer l’analyse des comptes par les membres élus du comité d’entreprise. Ce rapport d’activité donne une dimension qualitative et dynamique de l’action du comité d’entreprise. Il est susceptible d’éclairer les choix de gestion qu’il a opérés au cours de l’année écoulée. Le contenu de ce rapport, fixé par l’article D. 2325-14 du Code du travail varie selon la taille du comité d’entreprise.
Un nouveau mode de fonctionnement du comité d’entreprise, de nouveaux acteurs
La mise en œuvre des obligations comptables s’accompagne d’évolution concernant le fonctionnement même du comité d’entreprise et l’implication des différents acteurs.
L’établissement d’un règlement intérieur. L’obligation de transparence passe par l’établissement d’un règlement intérieur dont l’élaboration devient obligatoire : notamment, les comptes annuels doivent être arrêtés selon des modalités prévues par celui-ci. Y figurent également les modalités relatives au fonctionnement de la commission des marchés et à la reddition du choix des fournisseurs par cette commission.
La désignation d’un trésorier. La désignation par le comité d’entreprise d’un trésorier parmi ses membres titulaires devient obligatoire. Il serait souhaitable que le règlement intérieur précise les missions de celui-ci.
Le rôle nouveau des membres élus du comité d’entreprise. La loi réserve expressément un rôle particulier à la délégation élue du personnel : les comptes sont arrêtés par des membres élus du comité d’entreprise désignés par lui au sein de ses membres élus et sont approuvés par les membres élus réunis sur ce seul sujet en assemblée plénière. Il est ainsi donné une compétence spécifique, hors l’intervention du Président du comité d’entreprise, à certains membres élus constituant ainsi une émanation de cette institution. Cet état nouveau du droit peut n’être pas sans conséquence sur le fonctionnement de l’institution, les relations sociales dans l’entreprise et les responsabilités des différentes parties prenantes.
L’information des salariés. Les salariés ont vocation à devenir acteurs du nouveau régime en ce qu’ils sont destinataires tant du rapport d’activité et de gestion que des comptes annuels. Cette communication peut se faire par tout moyen. Là encore, le règlement intérieur du comité d’entreprise pourra comprendre des dispositions à cette fin.
De nouvelles responsabilités ?
De façon plus générale, on pressent aisément que des nouvelles obligations procédant de la réforme naissent de nouvelles responsabilités. Elles procèdent des prérogatives ainsi données aux acteurs reconnus par réforme et ne constituent en réalité qu’un apanage de l’exigence de transparence.
Auteur
Laurent Marquet de Vasselot, avocat associé en droit social et Professeur des Universités associé à Paris II.
*Les comités d’entreprise à l’ère de la transparence des comptes* – Article paru dans Les Echos Business le 22 avril 2015
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