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Enregistrement d’une marque communautaire : incidence du faible degré de similitude conceptuelle avec un signe antérieur

Enregistrement d’une marque communautaire : incidence du faible degré de similitude conceptuelle avec un signe antérieur

L’article 8 §1 du règlement n°40/94 du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire, applicable à l’époque des faits, prévoit qu’une marque peut être refusée à l’enregistrement, lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et de l’identité ou de la similitude des produits ou des services revendiqués par les deux marques, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.

L’article 8 §5 du même texte exclut également l’enregistrement de la marque nouvelle identique ou similaire pour des produits différents de ceux couverts par la marque antérieure, lorsque cette dernière jouit d’une renommée dans l’Union ou dans un Etat membre et que la nouvelle marque tirerait indûment profit de cette renommée ou lui porterait préjudice.

Le titulaire de la marque communautaire « Ballon d’Or » s’était opposé à l’enregistrement auprès de l’Office des marques de l’Union (OHMI) du signe verbal « Golden Balls ». Cette demande avait été partiellement accueillie : l’OHMI avait estimé que, si la nouvelle marque pouvait être enregistrée pour les produits différents de ceux désignés par Ballon d’Or, elle ne pouvait l’être en revanche pour les produits et services identiques ou similaires compte tenu de l’existence d’une forte similitude conceptuelle entre les deux signes susceptible de créer, auprès du public, une confusion.

Saisi d’un recours contre cette décision, le Tribunal de l’Union européenne avait lui considéré que les deux signes ne présentaient qu’une similitude conceptuelle faible de sorte que la marque Golden Balls pouvait être enregistrée même pour des produits et services identiques ou similaires, car il n’existait pas de risque de confusion.

Tout en confirmant la possibilité d’enregistrement de la marque Golden Balls pour les produits identiques ou similaires à ceux couverts par la marque Ballon d’Or en raison de l’absence de risque de confusion, la CJUE a censuré la décision du TUE en ce qu’elle a admis, pour la même raison, que la marque litigieuse pouvait être également enregistrée pour des produits différents (CJUE, 20 novembre 2014, n°C-581/13 P et C-582/13P).

Pour la CJUE, dès lors qu’il avait reconnu une similitude conceptuelle faible entre les deux signes, le TUE aurait dû déterminer si ce degré de faible similitude était néanmoins suffisant, en raison de la présence d’autres facteurs pertinents, tels que la notoriété ou la renommée de la marque antérieure, pour que le public concerné établisse un lien entre les deux marques.

Ce faisant elle confirme la solution précédemment retenue dans l’arrêt Ferrero (CJUE, 24 mars 2011, n°C-552/09) selon laquelle le degré de similitude des marques requis pour la protection de la marque antérieure dans le cadre de l’article 8 §1 (produits identiques ou similaires) et dans celui de l’article 8 §5 (produits différents) est différent. En effet, alors que la protection conférée par le premier de ces textes suppose un degré de similitude tel qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre les marques, pareil risque n’est pas requis pour la protection conférée par le second texte : il suffit dans ce cas d’un degré de similitude suffisant pour que le public concerné effectue un rapprochement entre les deux marques.

L’OHMI qui avait rejeté l’opposition formée par le titulaire de la marque Ballon d’or à l’enregistrement de la marque Golden Balls pour les produits différents devra donc réexaminer le dossier en vérifiant cette fois-ci si la marque Ballon d’Or jouissait d’une renommée dans l’Union ou dans un Etat membre et si l’enregistrement de Golden balls était susceptible de lui porter préjudice en raison d’un lien pouvant être établi par le public entre les deux signes.

Soulignons que la décision de la CJUE conserve toute sa valeur sous l’empire du nouveau règlement 207/2009 du 26 février 2009 qui reprend les mêmes motifs de refus d’enregistrement.

 

Auteur

Elisabeth Flaicher-Maneval, avocat Counsel au sein du département de doctrine juridique.