Tongs, mini-jupe ou bermudas : comment s’habiller pour aller travailler cet été ?
6 juillet 2015
La tenue vestimentaire en entreprise : quelles sont les obligations à respecter pour les salariés ? Toutes les tenues estivales sont-elles permises ? L’employeur peut-il apporter des restrictions ? Si oui, lesquelles ?
Un principe de base : le salarié est libre du choix de ses vêtements et le Code du travail n’impose pas -pour la plupart des salariés- le port d’une tenue particulière pour aller travailler.
Ce principe connait néanmoins des exceptions : ainsi, en matière d’hygiène et de sécurité, le Code du travail peut prévoir des obligations spécifiques.
De la même manière, l’obligation de sécurité de résultat peut conduire l’employeur à imposer le port de tenues de protection dans certaines situations (par exemple le port du casque pour les travaux de démolition (Art. R. 4534-73 du Code du travail).
Enfin, la Cour de cassation a estimé dans un arrêt en date du 28 mai 2003 que si «un employeur ne peut imposer à un salarié des contraintes vestimentaires qui ne seraient pas justifiées par la nature des tâches à accomplir et proportionnées au but recherché, la liberté de se vêtir à sa guise au temps et au lieu de travail n’entre pas dans la catégorie des libertés fondamentales» (Cass. Soc. 28 mai 2003 n°02-40273).
Il en découle que l’employeur peut, lorsque cela est justifié par l’activité et proportionné, imposer le port de vêtement déterminé ou interdire le port de certaines tenues.
Un employeur peut-il imposer à ses salariés des contraintes vestimentaires ?
Dans certaines entreprises, les salariés peuvent être contraints de porter un uniforme ou des vêtements particuliers. Par exemple, le Code de la sécurité intérieure (article R.613-1) prévoit que les employés des entreprises de surveillance, gardiennage et transport de fonds doivent être, dans l’exercice de leurs fonctions, revêtus d’une tenue qui ne doit pas prêter à confusion avec les uniformes officiels (leur tenue devant comporter au moins deux insignes reproduisant la dénomination ou le sigle de l’entreprise).
Dans quelles conditions l’employeur peut-il imposer une tenue d’entreprise?
L’article L. 1121-1 du Code du travail dispose :
« Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »
Ainsi, un employeur ne peut imposer à un salarié des contraintes vestimentaires que si elles sont justifiées par la nature des tâches à accomplir et proportionnées au but recherché.
La jurisprudence considère que cette règle permet à l’employeur de limiter la liberté de se vêtir à sa guise notamment pour les salariés en contact avec la clientèle.
Ainsi, par exemple, repose sur une cause réelle et sérieuse le licenciement d’une vendeuse d’un magasin de prêt-à -porter refusant de mettre les vêtements de la marque commercialisée fournis par l’employeur (CA Metz 3-3-2009 n°06-2417).
De la même manière, a été jugé comme justifié et non disproportionné l’exigence que les salariés soient correctement habillés, dans une tenue dont la couleur rappelle celle de l’enseigne de l’entreprise, et qu’ils soient correctement coiffés afin de servir au mieux la clientèle (Cour d’appel de Nancy, 6 février 2013 n°12/00984).
Qu’en est-il alors des tenues dites «estivales»?
Existe-t-il une ou des jurisprudence(s) précise(s) sur ces tenues? Les juridictions ont été amenées à se prononcer sur le port de certains vêtements par les salariés.
Le bermuda
Le licenciement d’un salarié portant un bermuda a été jugé comme justifié alors que les fonctions et les conditions de travail du salarié pouvaient le mettre en contact avec la clientèle (Cass. soc. 12 novembre 2008 n°07-42.220).
Le survêtement
Constatant que le salarié était en contact avec la clientèle, une cour d’appel a pu estimer qu’était justifiée la décision de l’employeur de le licencier alors qu’il persistait à se présenter au travail en survêtement (Cass. soc. 6 novembre 2001 n°99-43.988).
La mini-jupe
Une salariée peut-elle être sanctionnée pour avoir porté une mini-jupe ?
Une salariée qui occupait le poste de Chef d’Equipe d’une entreprise intervenant sur le site du client (régiment de légionnaires) a fait l’objet d’un avertissement fondé alors qu’elle exerçait ses fonctions en mini-jupe avec sa blouse de travail intégralement ouverte (Cour d’appel de Nîmes, 18 mai 2010 n° 08/03441).
Le port de tenues décentes
L’employeur peut aussi interdire le port de tenues indécentes. Ainsi, ont été jugés justifiés le licenciement d’une salariée ayant refusé à plusieurs reprises de porter un soutien-gorge sous son chemisier transparent, dans la mesure où sa tenue suggestive était de nature à susciter un trouble dans l’entreprise (Cass, Soc, 22 juillet 1986, n°82-43.824) ou le licenciement d’une vendeuse en boulangerie ayant porté à deux reprises une robe laissant apparaitre ses sous-vêtements (Cour d’appel de Douai, 30 septembre 2010, n°09/03045).
De même, a été validé la sanction disciplinaire prononcée à l’encontre d’une serveuse, portant des tenues « laissant apparaitre des tatouages, tee-shirt de couleur vive, décolleté provoquant, pantalon corsaire (…) » (Cour d’appel de Nîmes, 10 septembre 2013, n°12/00015).
Le short et les tongs
En l’espèce, un salarié -employé en qualité de chargé de clientèle au sein d’une agence bancaire- a été licencié au motif qu’il s’était présenté à l’agence, vêtu d’un tee-shirt de sport et d’un short long, et chaussé de tongs.
La cour d’appel de Chambéry a confirmé ce licenciement et relevé que le nombre peu important de clients dans l’agence ne permettait pas au salarié de se vêtir de la sorte (Cour d’appel de Chambéry, 30 août 2012 n° 11/02198).
En conclusion, l’employeur peut imposer le port d’une tenue correcte aux salariés en contact avec la clientèle ou lorsque des impératifs d’hygiène et de sécurité le justifient.
Auteurs
Alain Herrmann, avocat associé en droit social.
Cathy Clairet Roig, avocat en droit social
*Tongs, mini-jupe ou bermudas : comment s’habiller pour aller travailler cet été ?* – Article paru dans Les Echos le 6 juillet 2015
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