Revente de produits en ligne : nouvelle illustration de l’utilisation du droit de la concurrence par un revendeur agréé pour échapper aux obligations du réseau
Le fournisseur qui ne démontre pas avoir établi des critères de distribution en ligne ne saurait prétendre que les ventes en ligne d’un distributeur de son réseau lui ont causé un préjudice.
Les restrictions à la vente en ligne, hors réseau comme à l’intérieur du réseau, sont à l’origine de nombreuses contestations sur le fondement du droit de la concurrence.
En effet, le droit de la concurrence empêche un fournisseur d’interdire purement et simplement les reventes de ses produits sur Internet. Il reste toutefois possible à l’intéressé d’apporter des restrictions à la faculté de revendre les produits en ligne, en imposant des conditions/critères spécifiques à cette revente, sous réserve que ces conditions/critères poursuivent les mêmes objectifs que ceux imposés pour la revente dans un point de vente physique.
Dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt commenté, le fournisseur demandait réparation du préjudice que lui auraient causé les ventes en ligne réalisées par un de ses distributeurs agréés en violation du contrat.
La violation du contrat ne faisait au cas d’espèce pas de doute : le contrat imposait au distributeur qui souhaitait revendre en ligne de contacter le fournisseur afin d’obtenir, d’une part, les conditions spécifiques à remplir pour ce type de ventes et d’autre part, l’accord écrit préalable du fournisseur sur le site Internet. Or, il était établi que le distributeur avait commercialisé des produits du fournisseur sur son site Internet sans solliciter son autorisation préalable.
La cour d’appel de Lyon, dans un arrêt rendu le 7 mai 2015, a pourtant fait primer le droit de la concurrence sur la lettre du contrat, en considérant que le fournisseur qui ne produit pas ses critères de distribution propres à la vente en ligne ne démontre pas l’existence, la nature et l’importance des différences alléguées entre la vente en ligne et la vente hors ligne et les conditions spécifiques pour ce type de vente. Il ne peut en conséquence invoquer un quelconque préjudice résultant de la vente en ligne de ses produits en violation du contrat (CA Lyon, 7 mai 2015, n°14/01041, SAS Ralph Lauren France c. SARL AGK6).
Cette décision confirme la nécessité d’établir des conditions spécifiques de revente en ligne pour pouvoir prétendre protéger son réseau de distribution de reventes en ligne non conformes à l’esprit du réseau.
Fournisseurs, pensez à établir vos critères de distribution !
Auteur
Virginie Coursière-Pluntz, avocat. Elle intervient principalement en droit de la concurrence et en droit européen (antitrust, contrôle des concentrations, libertés de circulation), tant en conseil qu’en contentieux.