Franchise : nouvelles précisions sur l’étendue de l’obligation d’information précontractuelle
Préalablement à la signature d’un contrat de franchise, le franchiseur doit remettre à toute personne intéressée un document d’information précontractuelle (DIP), qui est défini et détaillé aux articles L.330-3 et R.330-1 du Code de commerce. Si le franchiseur manque à cette obligation d’information préalable, le contrat de franchise peut être annulé pour vice du consentement.
En pratique, il est fréquent que le franchisé argue d’un tel manquement de la tête de réseau. Dans un cas récent dont a eu à connaître la Cour de cassation, deux sociétés avaient signé un contrat de franchise, par lequel la première concédait à la seconde l’exclusivité de l’enseigne de restauration « La Casa ». À la suite de redevances impayées, le franchiseur avait assigné le franchisé en résiliation du contrat à ses torts exclusifs ainsi qu’en paiement des factures restant dues. Il demandait par ailleurs des dommages-intérêts.
Le franchisé a reconventionnellement sollicité l’annulation du contrat de franchise au motif que le franchiseur n’aurait pas respecté son devoir d’information précontractuelle. Le DIP avait été remis au franchisé en avril 2006 suivi, quelques mois plus tard, d’un document complémentaire sur l’état du marché local, dans lequel il était fait mention de l’attraction de la zone concédée pour les enseignes du secteur de la restauration et du risque de saturation induit. Le contrat de franchise a été signé le 14 mai 2007 ; un magasin concurrent a ensuite ouvert dans cette zone en juillet 2007.
Dans cette affaire, la Cour de cassation confirme logiquement la position adoptée par les juges du fond : le franchisé ne pouvait reprocher au franchiseur de ne pas l’avoir informé sur un événement qui s’est produit postérieurement à la signature du contrat (Cass. com., 15 septembre 2015, n° 14-15.052).
Elle souligne que le franchisé « ne précisait pas les informations, autres que celles relatives à l’ouverture d’un restaurant concurrent, qui auraient dû être actualisées et dont la méconnaissance l’avait empêché de s’engager en toute connaissance de cause« . La Cour de cassation laisse ainsi entendre qu’un argumentaire plus étayé aurait pu la conduire à conclure que le franchiseur avait manqué à son obligation précontractuelle en ne mettant pas à jour le DIP entre le moment où il avait été remis au candidat à la franchise et celui où le contrat avait été signé.
Pour autant, cela ne remet pas en cause la jurisprudence récente de la Cour de cassation selon laquelle le franchisé doit également se renseigner et procéder lui-même à une analyse d’implantation précise. Il ne saurait se contenter des informations remises par le franchiseur (voir sur ce point Cass. com., 28 mai 2013, n° 11-27256, et notre commentaire paru dans la Lettre des réseaux de distribution de septembre 2013). En effet, si le franchisé reproche au franchiseur un manquement à son devoir d’information, il doit démontrer, en se référant à des éléments circonstanciés, quelles sont les informations dont la méconnaissance l’ont empêché de s’engager en connaissance de cause. On peut supposer que la Cour de cassation, saisie d’arguments recevables par le franchisé, s’interrogerait dans un second temps sur la capacité de celui-ci à prendre connaissance des éléments manquants par lui-même.
Auteur
Anne-Laure Villedieu, avocat associée en droit de la propriété industrielle, droit de l’informatique, des communications électroniques et protection des données personnelles.