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Dégradation du régime des pactes Dutreil ISF : l’administration fiscale entend entraver les cessions de titres opérées entre signataires de l’engagement collectif

Les actionnaires signataires d’un engagement collectif de conservation souscrit en vue d’obtenir l’exonération d’ISF sur les trois quarts de leur valeur de leurs titres ont tout lieu d’être frappés de saisissement en lisant dans le JO du 13 août 2013 la solution énoncée dans la réponse ministérielle Moyne-Bressand.

Chacun tenait pour acquis que, lorsqu’elle est consentie au bénéfice d’un autre signataire de l’engagement collectif de conservation, la cession des titres soumis à l’engagement ne comporte aucune conséquence défavorable pour le cédant, qui conserve le bénéfice des exonérations dont il a profité antérieurement, et permet au cessionnaire de s’exonérer sur les titres mutés moyennant leur conservation jusqu’au terme de la période de six ans qui s’est ouverte lors de la signature de l’engagement. Le 2ème alinéa du b de l’article 885 I bis du CGI prévoit, en effet, que les associés de l’engagement collectif peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l’engagement collectif. L’exposé des motifs de l’amendement sénatorial qui a introduit cette disposition évoquait la nécessité de laisser « respirer » l’engagement collectif, ce pourquoi il fallait que les associés coalisés dans le pacte « puissent effectuer entre eux des cessions ou des donations de titres sans remettre en cause l’avantage fiscal attaché à l’engagement collectif » (rapport n°217 -2002-2003- déposé le 19 mars 2003). L’administration n’avait elle-même pas envisagé autre chose dans ses commentaires successifs (BOI 7 S-3-04 du 23 février 2004 n°10 et BOI-PAT-ISF-30-40-60-10 n°180 du 12 septembre 2012) où l’on peut lire, d’une part, que l’engagement collectif de conservation se poursuit dans l’hypothèse de cessions de titres soumis à engagement qui interviennent entre les associés signataires de cet engagement ou leurs ayants cause à titre gratuit, et, d’autre part, que la qualité d’associé de l’engagement de tels cessionnaires permet à ceux-ci de bénéficier de l’exonération partielle au titre des années suivant celle de la cession et de l’antériorité de l’engagement. En réglant ainsi la situation du cédant, l’administration reconnaissait que l’engagement pris sur les titres mutés avait simplement changé de titulaire.

La réponse Moyne-Bressand marque un revirement complet de doctrine. Il y est indiqué que le cédant perd le bénéfice des exonérations qu’il a précédemment obtenues, et cela tant sur le lot cédé que sur les titres conservés, et que, de son côté, le signataire acquéreur ne pourra s’exonérer sur ses nouveaux titres qu’en soumettant ceux-ci à un engagement distinct qui ne lui permettra de consolider ses exonérations qu’en conservant ceux-ci jusqu’au terme d’une nouvelle période de six ans.

Autant dire que les cessions entre signataires sont devenues pratiquement irréalisables sous l’effet de ce changement de doctrine sauf à prendre le pari que celle-ci sera déclarée illégale tant elle s’éloigne de la lettre de la loi et de l’objectif qu’elle poursuit.

 

A propos de  

Jean-Yves Mercier, avocat associé, responsable de l’équipe de doctrine fiscale. Il intervient pour l’ensemble des sociétés clientes du Cabinet dans l’analyse et la traduction en conseils pratiques des évolutions de la réglementation fiscale.

 

L’actualité fiscale en bref parue dans la revue Option Finance du 9 septembre 2013

 

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