Abattement pour durée de détention renforcé : un apport de titres à une holding animatrice de groupe n’est pas toujours neutre!
Les plus-values de cession de valeurs mobilières peuvent bénéficier d’un abattement pour durée de détention lorsqu’elles sont taxables au barème progressif de l’impôt sur le revenu et qu’elles portent sur des titres qui ont été acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2018.
L’abattement est « renforcé » (fixé à 50% lorsque les titres cédés sont détenus depuis au moins un an, 65% à partir de quatre ans de détention et 85% si elle atteint au moins huit ans) si, entre autres conditions, la société émettrice des droits cédés satisfait à la définition des PME au sens du droit de l’Union européenne et si elle avait moins de 10 ans à la date de souscription ou d’acquisition des titres cédés (sans être issue d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension ou d’une reprise d’activités préexistantes).
Une décision du Conseil d’Etat (CE, 26 décembre 2018, n°422664, M. Chatel) invite à la vigilance lorsque les titres de filiales opérationnelles sont apportés à une holding animatrice de groupe en régime de sursis d’imposition et que les titres de la holding animatrice sont ensuite cédés. Dans ce cas, il résulte du 1 quater de l’article 150-0-D du CGI que le respect de la condition tenant à ce que la société émettrice des droits cédés satisfasse à la définition des PME s’apprécie au niveau de la holding animatrice et de chacune des sociétés dans lesquelles elle détient des participations. Pour le Conseil d’Etat, cette appréciation doit se faire à la date de l’opération d’échange (ce qui converge avec la doctrine administrative exprimée au BOI-RPPM-PVBMI-20-30-10 n°190 et 210 à jour au 4 mars 2016). Ainsi, si l’apport intervient tardivement et que certaines sociétés ont plus de 10 ans à la date de l’apport, le contribuable ne pourra pas bénéficier de l’abattement lors de la cession des titres de la société holding animatrice alors qu’il pourra y prétendre s’il conserve en direct les titres des sociétés opérationnelles.
Le Conseil d’Etat a refusé de transmettre une QPC au Conseil constitutionnel, jugeant que cette différence de traitement entre contribuables répond à une différence de situation et qui « au regard de l’objectif poursuivi tendant à favoriser l’investissement dans les petites et moyennes entreprises, est en rapport direct avec l’objet de la loi » et repose sur des critères objectifs et rationnels au regard du but poursuivi par le législateur.
Auteur
Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale