Améliorer l’attractivité de l’épargne retraite : une ambition de la loi PACTE
27 juillet 2018
Sortie en capital, élargissement des sources de versements et des cas de déblocage anticipé, transférabilité de sommes issues d’un dispositif d’épargne retraite vers un autre, telles sont les principales pistes envisagées par le projet de loi PACTE pour relancer l’intérêt des français pour l’épargne retraite.
A ce jour, selon le Gouvernement, l’épargne retraite n’a pas connu le succès escompté, qu’il s’agisse des dispositifs mis en œuvre dans un cadre professionnel (notamment PERCO, contrats de retraite à cotisations définies communément dénommées « article 83 », contrats de retraite Madelin pour les indépendants) ou non (notamment PERP).
Les français s’orienteraient plus volontiers vers l’assurance vie plutôt que vers l’épargne retraite. En cause, très certainement, la multiplicité des dispositifs d’épargne retraite disposant chacun de règles propres, rendant leur compréhension difficile et la disponibilité limitée des sommes investies.
C’est pourquoi le projet de loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises dite « PACTE », présenté en conseil des ministres le 18 juin 2018, ambitionne de simplifier le régime de l’épargne retraite en créant un socle commun de règles applicables à l’ensemble des dispositifs, avec pour objectif d’améliorer son attractivité, son rendement et la sécurité des épargnants.
L’article 20 du projet de loi PACTE insère dans le Code monétaire et financier un chapitre spécifique au « plan d’épargne retraite » fixant un cadre commun à l’ensemble des dispositifs. Les modalités d’alimentation, de sortie, qu’elle soit anticipée ou non, et de gestion seraient ainsi harmonisées.
Le projet de loi PACTE ouvre la possibilité d’une sortie en capital à l’ensemble des dispositifs d’épargne retraite, néanmoins limitée aux seuls droits ne correspondant pas à des versements obligatoires du salarié ou de l’employeur.
S’agissant des modalités de sortie, le projet de loi PACTE ouvre la possibilité d’un versement en capital, ce qui n’est aujourd’hui possible que dans le cadre d’un PERCO.
Attention toutefois : cette possibilité ne concerne pas les droits correspondant aux versements obligatoires du salarié ou de l’employeur s’agissant des plans d’épargne retraite d’entreprise auxquels le salarié est affilié à titre obligatoire, lesquels continueront d’être délivrés uniquement sous forme de rentes viagères.
De plus, si le régime fiscal applicable à l’épargne retraite devra être abordé dans le cadre de la loi de finances, un traitement fiscal plus favorable devrait être mis en place en cas de sortie sous forme de rentes viagères plutôt qu’en capital.
Les cas de déblocage anticipé seraient élargis pour être calqués sur ceux applicables au PERCO, à l’exception de l’hypothèse tenant à la remise en état de la résidence principale endommagée à la suite d’une catastrophe naturelle.
Ainsi, les droits constitués dans tous dispositifs d’épargne retraite pourraient, à l’avenir, être liquidés ou rachetés avant la liquidation de la retraite dans un régime obligatoire ou l’âge légal de départ à la retraite pour être affectés à l’acquisition d’une résidence principale ou encore en cas d’invalidité des enfants de l’épargnant, de son conjoint ou de son partenaire de PACS, à l’exception des versements obligatoires du salarié ou de l’employeur s’agissant des plans d’épargne retraite d’entreprise auxquels le salarié est affilié à titre obligatoire.
Par ailleurs, l’ensemble des dispositifs de retraite concernés par la loi pourront être désormais alimentés par de l’épargne salariale. En effet, le projet de loi prévoit que :
« Les sommes versées dans un plan d’épargne retraite peuvent provenir :
1° de versements volontaires du titulaire ;
2° de sommes versées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise mentionnée au titre II du livre III de la troisième partie du Code du travail ou de l’intéressement mentionné au titre Ier du même livre III, ou de versements des entreprises mentionnés au titre III du même livre III, ainsi que des droits inscrits au compte épargne-temps ou, en l’absence de compte épargne-temps dans l’entreprise et dans des limites fixées par décret, des sommes correspondant à des jours de repos non pris, s’agissant des plans d’épargne retraite d’entreprise ;
« 3° de versements obligatoires du salarié ou de l’employeur, s’agissant des plans d’épargne retraite d’entreprise auxquels le salarié est affilié à titre obligatoire ».
En outre, la gestion pilotée (1), qui offrirait un meilleur rendement, deviendrait la modalité de gestion par défaut de l’épargne retraite.
L’harmonisation du régime juridique applicable à l’épargne retraite se poursuivrait par voie d’ordonnances dans un délai de 12 mois à compter de la promulgation de la loi, sur habilitation législative par la loi PACTE, en vue de compléter les dispositions du Code monétaire et financier précité, et d’adapter les dispositions applicables aux produits d’épargne retraite existants.
L’application aux contrats en cours est toutefois débattue par les assureurs en raison de difficultés de mise en œuvre en pratique.
Outre la simplification de l’épargne retraite, cette harmonisation du régime applicable a également pour finalité de permettre la transférabilité des droits individuels vers tout autre plan d’épargne retraite, quels que soient sa nature et l’organisme assureur, ce afin de tenir compte de la mobilité professionnelle (sous réserve pour les salariés qu’ils ne soient plus tenus d’adhérer au contrat). Un tel mécanisme permettrait ainsi aux épargnants de n’avoir qu’un contrat d’épargne retraite à gérer quelle que soit leur évolution de carrière.
Si le projet de loi PACTE n’aborde expressément que le transfert des droits individuels laissant entier le débat existant sur le transfert collectif des droits, ce dernier devrait être évoqué par les ordonnances précitées. En effet, le Gouvernement serait habilité à déterminer par ordonnance « les modalités de gestion des droits des salariés en cas de modification de la situation juridique de l’entreprise ».
Les organismes assureurs seraient enfin tenus d’établir une comptabilité auxiliaire d’affectation pour les engagements concernés, c’est-à-dire de cantonner les actifs de l’épargne retraite, afin de protéger les droits des épargnants quant à l’affectation de la participation aux bénéfices techniques et financiers ou en cas de défaillance du prestataire. Les modalités de mise en œuvre de cette obligation seraient déterminées par voie d’ordonnance.
Par ailleurs, pour accroître son attractivité, l’épargne retraite bénéficierait sous certaines conditions d’un régime social et fiscal de faveur. Ainsi, un forfait social réduit de 16% est prévu pour les versements de l’employeur sur tous types de plan, et plus uniquement sur les seuls PERCO, sous réserve que l’épargne soit affectée , « selon des modalités fixées par décret, à l’acquisition de parts de fonds comportant au moins 10% de titres susceptibles d’être employés dans un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de tailles intermédiaire ».
Pour connaître les autres mesures sociales et fiscales incitatives, il faudra attendre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale.
L’ensemble de ces nouvelles règles est censé entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2020.
Au-delà de cette réforme de l’épargne retraite, on relèvera que l’article 65 du projet de loi PACTE autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi « propres à transposer la directive 2014/50/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 », qui devait être transposée en droit interne au plus tard le 21 mai 2018.
Pour mémoire, cette directive remet en cause les régimes de retraite à prestations définies visés à l’article L.137-11 du Code de la sécurité sociale dont les droits ne sont pas acquis tant que le bénéficiaire ne peut justifier d’être encore présent dans l’entreprise au moment où il liquide ses droits à retraite au titre du régime de base de sécurité sociale (hormis quelques rares exceptions).
En effet, selon ce texte européen, les droits à retraite supplémentaire doivent être acquis au-delà d’une période qui ne peut excéder trois ans.
Le projet de loi PACTE rebat ainsi toutes les cartes de la retraite supplémentaire.
(1) La composition du placement évolue en fonction de l’approche de l’âge de la retraite : les investissements en actions sont en effet progressivement réduits au profit de placements jugés moins risqués comme les obligations et le monétaire.
Article publié dans Les Echos EXECUTIVES le 27/07/2018
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