Amortissement du fonds commercial des petites entreprises : divergence fiscalo-comptable
La règle comptable permettant aux petites entreprises d’amortir leurs fonds commerciaux sur dix ans est incompatible avec la loi fiscale.
Par un avis du 8 septembre 2021 (n° 453458), le Conseil d’Etat a tranché la question de savoir si l’article 38 sexies de l’annexe III au Code général des impôts doit être interprété comme autorisant, en application du principe de connexion fiscalo-comptable, les petites entreprises à amortir leurs fonds commerciaux sur dix ans sans avoir à justifier de l’irréversibilité de leur dépréciation.
Au plan fiscal, il résulte de la combinaison des articles 39 du Code général des impôts et 38 sexies de l’annexe III au même code, qu’un actif incorporel identifiable, tel qu’un fonds de commerce, ne peut donner lieu à une dotation à un compte d’amortissement que s’il est normalement prévisible, lors de sa création ou de son acquisition, que ses effets bénéfiques sur l’exploitation pendront fin à une date déterminée.
Au plan comptable, l’article 214-3 du Plan comptable général permet aux petites entreprises d’amortir sur dix ans leurs fonds commerciaux. Les petites entreprises, visées à l’article L. 123-16 du Code de commerce, sont celles qui ne dépassent pas deux des trois seuils suivants : six millions d’euros de total de bilan, douze millions d’euros de chiffre d’affaires net et cinquante salariés (seuils applicables depuis le 31 mai 2019).
Ainsi, contrairement à la norme fiscale, la règle comptable ne subordonne pas l’amortissement du fonds commercial à la condition que les effets bénéfiques du fonds sur l’exploitation prennent fin à une date déterminée.
Dans ces conditions, eu égard à l’incompatibilité de la règle comptable avec la loi fiscale, le Conseil d’Etat a répondu par la négative à la question qui lui était soumise de sorte qu’une petite entreprise, qui opte comptablement pour l’amortissement de son fonds commercial sur dix ans, ne peut s’en prévaloir pour la détermination de son résultat fiscal.
Cette décision est à rapprocher de l’article 6 du projet de loi de finances pour 2022 qui prévoit au contraire (mais à titre provisoire), d’admettre en déduction les amortissements constatés dans la comptabilité des entreprises au titre des fonds commerciaux acquis à compter du 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2023.