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Des appels d’offres systématiques excluent la reconnaissance d’une relation commerciale établie

Des appels d’offres systématiques excluent la reconnaissance d’une relation commerciale établie

Deux sociétés étaient en relation commerciale depuis plusieurs années ; cette relation commerciale était caractérisée par le recours systématique à des appels d’offres préalablement à chaque commande et la conclusion d’un contrat-cadre définissant les conditions générales des relations entre les deux sociétés dans l’hypothèse où la société prestataire remporterait un appel d’offres.

Après plusieurs années d’appels d’offres remportés, le prestataire revendiquait la rupture brutale de leur relation commerciale établie pour ne pas avoir été retenu lors du dernier appel d’offres. Fort du contrat-cadre, il arguait que le recours systématique et ab initio à une procédure d’appel d’offres ne suffisait pas à exclure par principe l’existence d’une relation commerciale établie dès lors que les parties avaient eu la commune intention d’inscrire leur relation dans la durée.

Telle n’est pas l’analyse de la cour d’appel de Paris qui énonce que « la relation commerciale établie prévue par l’article L.442-6 I 5° du Code de commerce est celle qui présentait avant la rupture un caractère suivi, stable et habituel et où la partie victime de l’interruption pouvait raisonnablement anticiper pour l’avenir une certaine continuité du flux d’affaires avec son partenaire commercial » (CA Paris, 7 octobre 2016, n°13/19175). Considérant qu’il était établi que, depuis le début de la relation commerciale entre les parties, le client avait organisé tous les ans un appel d’offres pour choisir le partenaire commercial auprès duquel il passait commande et que cette mise en concurrence régulière et systématique, préalable à chaque commande, avait affecté d’un aléa et ainsi rendues précaires dès l’origine les relations commerciales qui s’étaient installées entre les parties, la Cour d’appel en a conclu que le prestataire ne pouvait pas se prévaloir de l’existence d’une relation commerciale établie au sens des dispositions de l’article L.442-6 I 5° du Code de commerce.

Cette décision est dans le droit fil de la jurisprudence qui considère que le recours à la procédure d’appel d’offres pour choisir son partenaire commercial manifeste une intention de ne pas poursuivre une relation commerciale dans les conditions antérieures et fait ainsi courir le délai de préavis exigé par la loi (en ce sens : Cass. com., 6 juin 2001, n°99-20.831 ; Cass. com., 20 février 2007, n°04-14.446 ; Cass. com., 18 décembre 2007, n°05-15.970 ; CA Paris, 7 septembre 2016, n°14/06517).

Le recours à des appels d’offres systématiques empêche donc de prétendre à l’existence d’une relation commerciale établie. De même, l’émission d’un appel d’offres après plusieurs années de relations commerciales établies peut valoir point de départ du préavis exigé par l’article L.442-6 I 5° du Code de commerce. Pour ce faire, il faut et il suffit que l’appel d’offres soit suffisamment explicite et qu’il soit adressé à l’ancien partenaire. En effet, à défaut d’être suffisamment explicite, le caractère prévisible de la rupture d’une relation commerciale établie ne prive pas celle-ci de son caractère brutal si elle ne résulte pas d’un acte du partenaire manifestant son intention de ne pas poursuivre la relation commerciale et faisant courir un délai de préavis (Cass. com., 6 septembre 2016, n°14-25.891).

 

Auteur

Brigitte Gauclère, avocat counsel en droit commercial, de la distribution et immobilier