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Avenant à la convention franco-allemande : un traitement des plus-values modifié

Avenant à la convention franco-allemande : un traitement des plus-values modifié

Un avenant daté du 31 mars 2015 apportera plusieurs modifications à la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959, dont la dernière révision remontait au 20 décembre 2001. Les informations qui avaient jusqu’alors filtré laissaient à penser que les modifications porteraient seulement sur l’imposition des retraités et des anciens travailleurs salariés pour une imposition dans leur pays de résidence. Mais l’opportunité a été saisie de procéder par ailleurs à des modifications substantielles de la convention, aux rangs desquelles le traitement des plus-values.

Plus-values de cession de titres de sociétés à prépondérance immobilière

Sur la même dynamique que le récent avenant à la convention franco-luxembourgeoise daté du 5 septembre 2014, le principe de l’imposition in situ des plus-values de cession des biens immobiliers est renforcé en incluant la détention indirecte par des sociétés.

Aux termes de l’actuelle convention franco-allemande, seules les plus-values afférentes à la cession des immeubles détenus directement sont imposables au lieu de situation de l’immeuble. En revanche, dans l’hypothèse d’une cession de titres d’une société de capitaux détenant des immeubles, l’imposition de la plus-value est attribuée au pays de résidence du cédant. Cette situation est particulièrement avantageuse dans l’hypothèse d’investissements immobiliers en France dans la mesure où de telles plus-values ne sont imposables en Allemagne dans le cas le plus favorable qu’à hauteur de 5% du montant desdites plus-values de cession de titres, aucune distinction n’étant à cet égard faite quant à la composition de l’actif de la société cédée.

L’article 7 de la convention a ainsi été entièrement refondu pour préciser dans son (4) que

«Les gains qu’un résident d’un Etat contractant tire de l’aliénation d’actions, de parts ou droits tirant directement ou indirectement plus de 50 pour cent de leur valeur de biens immobiliers situés dans l’autre Etat contractant, sont imposables dans cet autre Etat. Pour l’application de cette disposition, ne sont pas pris en considération les biens immobiliers directement affectés par une entité à sa propre activité d’entreprise (telle qu’une mine ou un hôtel)».

Une fois l’avenant entré en vigueur, les plus-values afférentes à la cession par des résidents allemands de sociétés à prépondérance immobilière française seront imposables en France au taux de droit commun, en vertu des dispositions de l’article 244 bis A du CGI.

L’avenant introduit par ailleurs à l’article 20 de la convention, relatif aux méthodes pour éviter les doubles impositions, un nouveau paragraphe 2, alinéa a) aa), aux termes duquel l’Etat du cédant a également le droit d’imposer la plus-value sur cession de titres de sociétés à prépondérance immobilière, mais accorde alors au contribuable un crédit d’impôt égal à l’impôt acquitté dans l’Etat de situation des immeubles. Ainsi, à titre d’exemple, une société de capitaux française qui céderait les titres d’une société à prépondérance immobilière allemande serait soumise en France à l’impôt sur les sociétés au taux de droit commun, l’impôt allemand étant imputable sur l’impôt français.

Plus-values sur titres de sociétés de capitaux et de personnes

1. Plus-values sur titres de sociétés de capitaux

L’avenant ne modifie pas les règles d’imposition des plus-values de cession de parts de sociétés de capitaux. Certes, l’article 7.1, spécifique à ce type de cessions, est supprimé, mais le nouvel article 7 paragraphe 5 qui prévoit que : «les gains provenant de l’aliénation de tous autres biens que ceux visés aux paragraphes (1), (2), (3) et (4) ne sont imposables que dans l’Etat de résidence du cédant» confirme la solution antérieure : de telles plus-values ne sont imposables que dans l’Etat de situation du cédant, sauf si les titres cédés sont rattachables à un établissement stable dont dispose le cédant dans l’autre Etat.

2. Plus-values sur titres de sociétés de personnes

Le paragraphe 1 de l’article 4 de la convention précise que les bénéfices d’une entreprise de l’un des Etats contractants ne sont imposables que dans cet état à moins que l’entreprise n’effectue des opérations commerciales dans l’autre Etat par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y est situé.

Le paragraphe 3 du même article indique en outre que les participations aux bénéfices d’un associé d’une société de personnes (relevant en France de l’article 8 du CGI) sont imposables dans l’Etat où cet associé, s’il s’agit d’une entreprise, a un établissement stable.

L’avenant modifie le paragraphe 4 de cet article. Dans sa version actuelle, ce paragraphe prévoit que les règles prévues aux paragraphes 1 et 3 s’appliquent aussi bien aux revenus provenant de l’administration et de la jouissance directes qu’aux revenus acquis au moyen de la location ou toutes autres formes d’utilisation de l’entreprise industrielle ou commerciale ainsi qu’aux bénéfices provenant de l’aliénation de l’ensemble de l’entreprise, d’une participation dans l’entreprise, d’une partie de l’entreprise ou d’un objet utilisé dans l’entreprise.

L’avenant supprime la référence à l’aliénation de tout ou partie de l’entreprise. Compte tenu de la quasi-assimilation à laquelle aboutissent les règles fiscales allemandes entre participation au capital d’une société de personnes et établissement stable, il serait pourtant surprenant que l’Allemagne renonce à son droit d’imposition en cas de cession, par un résident de France, de sa participation dans une société de personnes allemande (une société en commandite simple par exemple, forme sociale fréquente en Allemagne, Kommanditgesellschaft ou KG). A cet égard, il nous semble que l’Allemagne pourrait invoquer le nouvel article 7 paragraphe 2 qui énonce que :

«les gains provenant de l’aliénation de biens mobiliers qui font partie de l’actif d’un établissement stable qu’une entreprise d’un Etat contractant a dans l’autre Etat contractant (…) y compris de tels gains provenant de l’aliénation de cet établissement stable (seul ou avec l’ensemble de l’entreprise). (..)..sont imposables dans cet autre Etat».

Ceci étant, la modification précitée pourrait inciter l’administration fiscale française à imposer une plus-value en cas de cession de parts de société de personnes allemande dans une telle hypothèse. Il serait dès lors souhaitable que la répartition du droit d’imposer de telles plus-values soit clarifiée par les autorités compétentes des deux Etats.

Une nouvelle clause spécifique à l’exit tax

Le paragraphe 6 du nouvel article 7 permet à un Etat contractant de conserver le droit d’imposition d’une plus-value afférente à la participation dans une société résidente de ce même Etat, dans l’hypothèse où le cédant, ayant été résident de cet Etat pendant au moins 5 ans, cède la participation une fois devenu résident de l’autre Etat.

Cette nouvelle disposition, qui s’apparente à une sorte d’exit tax, est en réalité une règle de partage du droit d’imposition entre les deux Etats. Il est d’ailleurs précisé dans l’avenant que l’Etat de résidence du cédant tient compte de la valeur des titres au moment où le cédant est devenu résident de son territoire, afin d’éviter une double imposition. Par ailleurs, si le prix de cession est inférieur à la valeur de la participation au moment du changement de résidence, c’est ce prix de cession qui est pris en compte pour le calcul de la plus ou moins-value par le premier Etat.

Les modalités de mise en œuvre de cette disposition resteront à préciser. En effet, la règle prévue à l’article 7 paragraphe 6 ne sont pas nécessairement cohérentes avec les législations française ou allemande relatives à l’exit tax. L’exit tax française suppose ainsi qu’un contribuable ait été domicilié en France pendant au moins 6 ans sur les 10 années précédant le départ. La législation allemande prévoit quant à elle une résidence d’au moins 10 ans en Allemagne.

 

Auteurs

François Hellio, avocat associé en fiscalité internationale

Johann Roc’h, avocat en fiscalité intternationale

 

*Avenant à la convention franco-allemande : un traitement des plus-values modifié* – Article paru dans le magazine Option Finance le 27 avril 2015