La consultation sur les orientations stratégiques : où en êtes-vous ?
17 février 2015
Chaque année, le comité d’entreprise doit être consulté sur les orientations stratégiques de l’entreprise et leurs conséquences sociales. A cette occasion, il doit émettre un avis sur les choix de la direction et peut proposer des orientations alternatives. Un véritable dialogue entre l’organe chargé de la direction et le comité d’entreprise doit donc s’instaurer.
Bien que redoutée par le pouvoir patronal, cette consultation est restée discrète au cours de l’année 2014. La base de données économiques et sociales (BDES), qui en est le support, entrera en vigueur à compter du 14 juin 2015 dans les entreprises de moins de 300 salariés ; l’occasion idéale de faire le point sur l’objet et la mise en œuvre de cette consultation.
L’objet de cette nouvelle consultation, «les orientations stratégiques»
La Loi de Sécurisation de l’Emploi du 14 juin 2013 qui a instauré cette nouvelle consultation n’a pas défini la notion «d’orientations stratégiques».
Cela étant, les partenaires sociaux avaient pris le soin de décrire, dans l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, la logique de cette dernière qui doit «à partir du contexte économique et social, présenter les résultats puis objectifs et orientations stratégiques possibles avec leurs impacts en termes de distribution et d’investissement.»
Par ailleurs, la BDES qui constitue «le support de préparation de cette consultation», a un contenu bien défini. Elle doit regrouper 8 grands thèmes tels que les investissements – les fonds propres, endettements et impôts – les rémunérations des salariés et dirigeants – les activités sociales et culturelles – les rémunérations des financeurs – les flux financiers à destination de l’entreprise – la sous-traitance – les transferts commerciaux et financiers intra-groupe (articles R.2323-1-3 et 4 du Code du travail).
Un objet qui n’est pas vraiment nouveau
A la lecture de ces rubriques, il serait inexact de dire que l’objet de cette consultation est inconnu des directions et des représentants du personnel. En effet, à de nombreuses occasions durant l’année, les entreprises sont amenées à évoquer la stratégie de l’entreprise.
C’est le cas notamment dans les sociétés commerciales où l’employeur doit communiquer au comité d’entreprise, avant leur présentation à l’assemblée générale des actionnaires ou à l’assemblée des associés, l’ensemble des documents transmis annuellement à ces organes. Dans ce cadre, le comité peut également formuler toutes observations sur la situation économique et sociale de l’entreprise.
Plus indirectement, la stratégie de l’entreprise est abordée :
- dans les entreprises de 300 salariés et plus, lors de la présentation du rapport sur la situation économique et les perspectives pour l’année à venir (article L.2323-55) et de la consultation sur les prévisions annuelles ou pluriannuelles (article L.2323-56);
- dans les entreprises de moins de 300 salariés, lors de l’information annuelle sur la situation économique de l’entreprise (article L.2323-47);
- lors de la consultation annuelle sur la politique de recherche et de développement technologique de l’entreprise (article L.2323-12), ou encore lors de la consultation annuelle sur l’utilisation du crédit d’impôt compétitivité emploi (article L.2323-26-1).
La modification majeure tient donc au fait qu’il s’agit d’une consultation globale sur les différents axes de développement de l’entreprise.
En pratique, comment intégrer cette consultation dans votre calendrier ?
Cette énième consultation est l’occasion, pour les entreprises, de repenser le calendrier de leurs réunions avec le comité d’entreprise.
Par exemple, afin d’éviter de multiplier les réunions du comité d’entreprise sur des informations et/ou consultations sur des questions comptables et financières, il peut être envisagé de regrouper tout ou partie de ces dernières au cours d’une même réunion. Il faudra alors simplement veiller à ce que chacune d’entre elles fasse l’objet d’un point à l’ordre du jour et d’un avis distincts.
Aussi, et surtout, l’employeur doit veiller à garder une certaine cohérence lors de la communication des différentes informations au comité d’entreprise. Or, on connait les difficultés liées à l’élaboration d’une stratégie de l’entreprise dans un contexte de crise économique. Sur ce point, le décret du 27 décembre 2013 a précisé que les informations présentées pour les trois années à venir pourront prendre la forme de grandes tendances.
Enfin, pour respecter le caractère préalable de la consultation sur les orientations stratégiques, celles-ci ne pourront être décidées qu’à la fin du processus d’information-consultation. Il en résulte, par exemple, que le budget de la société, qui ne fait que traduire les orientations stratégiques, ne pourra être arrêté que postérieurement.
Auteurs
Laetitia Blanloeil, avocat en droit social
Coline Ferran, avocat en droit social
Â
*La consultation sur les orientations stratégiques : où en êtes-vous ?* Article paru dans Les Echos Business le 16 février 2015A lire également
Budgets du comité d’entreprise : le revirement de jurisprudence de la Cour de... 2 mai 2018 | CMS FL
Les conséquences de la suppression de l’obligation de consulter le comité dâ... 9 mai 2016 | CMS FL
Budgets du CE : l’ordonnance « Macron » sur la réforme du dialogue social ... 26 septembre 2017 | CMS FL
Procédure de licenciement des salariés protégés : la convocation du comité ... 10 juillet 2013 | CMS FL
Ordonnance relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économiqu... 27 septembre 2017 | CMS FL
Le regroupement des institutions représentatives du personnel : pourquoi et com... 22 octobre 2015 | CMS FL
Assiette de calcul du budget du comité d’entreprise : nouvelles précisions... 12 juin 2017 | CMS FL
La sanction d’une obligation excessive de confidentialité exigée du comité ... 10 décembre 2014 | CMS FL
Articles récents
- Rapport de durabilité : la nouvelle obligation de consultation du CSE entre en vigueur le 1er janvier 2025
- Statut de lanceur d’alerte : le Défenseur des droits et la jurisprudence précisent ses contours
- Enquêtes internes : des règles en constante évolution
- Pas de co-emploi sans immixtion dans la gestion économique et sociale de la société : illustration en présence d’une société d’exploitation
- Fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2025
- Un salarié licencié pour harcèlement sexuel ne peut se prévaloir du phénomène «#Metoo»
- Régimes de retraite des dirigeants : prestations définies versus actions gratuites
- SMIC : Relèvement du salaire minimum de croissance au 1er novembre 2024
- Inaptitude et reclassement : c’est au salarié qu’il appartient de rapporter la preuve d’une déloyauté de l’employeur
- Conférence – Gestion des fins de carrière : que font les entreprises et quelles solutions à dispositions ?