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Covid-19 : les entreprises face à l’intensification de la circulation du virus

Covid-19 : les entreprises face à l’intensification de la circulation du virus

Face à l’intensification de la circulation du virus du SARS Cov2 sur le territoire national, l’état d’urgence sanitaire a été à nouveau déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020, à compter du 17 octobre 2020 sur l’ensemble du territoire de la République.

Dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, de nouvelles mesures ont été prises ces derniers jours en application du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020, parmi lesquelles l’instauration d’un couvre-feu dans neuf territoires. En parallèle, le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 a été mis à jour au 16 octobre 2020. Focus sur les incidences pratiques de ces nouvelles mesures pour les entreprises. 

L’instauration d’un couvre-feu

Le décret du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, à l’instar du décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020 qu’il abroge, prévoit que :

 

    • les mesures d’hygiène, dites « gestes barrières », doivent toujours être observées « en tout lieu et en toutes circonstances », y compris dans les rassemblements, réunions, activités, accueils, déplacements et usage des moyens de transport qui ne sont pas interdits par le décret ;
    • dans le cas où le port du masque n’est pas prescrit par le décret, le préfet de département est habilité à le rendre obligatoire, sauf dans les locaux d’habitation lorsque les circonstances locales l’exigent ;
    • le préfet de département peut, lorsque les circonstances locales l’exigent, pour lutter contre la propagation du virus, prendre des mesures supplémentaires telles que l’interdiction des déplacements hors d’un rayon de 100 kilomètres du lieu de résidence et hors du département de résidence, sauf à pouvoir justifier d’un motif de déplacement listé par le décret (dont notamment les trajets entre le lieu de résidence et le lieu de travail).

 

Alors que l’article 50 EUS du décret du 10 juillet 2020 habilitait le préfet de département en état d’urgence sanitaire à procéder à un confinement de la population, l’article 51 du décret du 16 octobre permet, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, au préfet des départements listés en annexe (Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne, Hérault, Isère, Loire, Nord, Rhône, Seine-Maritime, Paris, Seine-et-Marne, Yvelines, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Val-d’Oise) d’interdire , les déplacements de personnes hors de leur lieu de résidence entre 21 heures et 6 heures du matin, dans les zones qu’il définit, aux seules fins de lutter contre la propagation du virus (couvre-feu).

En outre, dans ces zones définies par arrêté préfectoral :

 

    • les établissements de débits de boissons, les établissements flottants, pour leur activité de débit de boissons, les salles de jeux, les salles d’exposition et, sauf exceptions, les salles de sport ne peuvent pas accueillir du public ;
    • les autres établissements recevant du public n’ont pas le droit d’accueillir du public entre 21 heures et 6 heures du matin ;
    • les fêtes foraines, les expositions, les foires-expositions et les salons sont interdits ;
    • le nombre maximal de personnes pouvant être réunies par un événement est abaissé de 5000 à 1000.

 

Ce couvre-feu, entré en vigueur le 17 octobre 2020 en Ile-de-France et pour huit métropoles (Aix-Marseille, Grenoble, Lille, Lyon, Montpellier, Rouen, Saint-Étienne et Toulouse) est applicable pour une durée d’un mois, c’est-à-dire pour la durée de l’état d’urgence sanitaire en application de l’article L.3131-13 du Code de la santé publique en attendant sa prolongation très probable. En effet, le Gouvernement a d’ores et déjà annoncé que ce couvre-feu sera applicable jusqu’au 1er décembre 2020. Il devra pour cela obtenir la prorogation de l’état d’urgence sanitaire au-delà d’un mois par un vote du Parlement, après avis du haut conseil de la santé publique.

Par dérogation, un nombre limité de déplacements sont admis pendant le couvre-feu (notamment les déplacements entre le domicile et le lieu d’exercice de l’activité professionnelle ou le lieu d’enseignement et de formation, les déplacement pour des consultations médicales ne pouvant être différées ou pour l’achat de produits de santé ou pour motif familial impérieux, les déplacements des personnes en situation de handicap et de leur accompagnant ou les déplacements liés à des  transferts  ou  transits  vers  ou  depuis  des  gares  ou  aéroports  dans  le  cadre  de déplacements de longue distance), y compris pour motif professionnel.

Ainsi, pour les salariés contraints de rentrer chez eux ou de se déplacer pour les besoins de leurs fonctions entre 21 heures et 6 heures du matin, l’employeur devra fournir un justificatif de déplacement professionnel. La durée de validité de ce justificatif est déterminée par l’employeur en fonction de l’organisation du travail mise en place (rotation de personnel par exemple) ainsi que des périodes de congés ou de repos, de sorte qu’il n’est pas nécessaire de le renouveler tous les jours.

Conformément à l’article L.3136-1 du Code de la santé publique, le non-respect du couvre-feu est passible :

 

    • à titre de première sanction, d’une amende de 135 euros, susceptible d’être majorée à 375 euros ;
    • en cas de récidive dans les 15 jours, d’une amende de 200 euros, susceptible d’être majorée à 450 euros ;
    • après trois infractions dans un délai de 30 jours, de six mois d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 euros.

 

Prenant en compte la déclaration de l’état d’urgence et la mise en œuvre de couvre-feu, le ministère du Travail prévoit, dans la version du protocole sanitaire en entreprise mise à jour le 16 octobre 2020, que dans les zones soumises au couvre-feu :

 

    •  « les employeurs fixent dans le cadre du dialogue social de proximité un nombre minimal de jours de télétravail par semaine, pour les postes qui le permettent » en veillant à maintenir « des liens au sein du collectif de travail » et à prévenir les risques psychosociaux ;
    • en complément, « les employeurs adaptent les horaires de présence afin de lisser l’affluence aux heures de pointe« 

 

En d’autres termes, il est désormais demandé aux entreprises situées dans les zones soumises au couvre-feu, d’une part, de définir un nombre de jours minimal de télétravail par semaine (entre deux et trois selon la ministre du Travail) pour les salariés occupant un poste qui le permet et dont la présence sur site n’est pas justifiée et, d’autre part, d’adapter les horaires d’arrivée et de départ au travail des salariés afin de lisser l’affluence aux heures de pointe.

Le protocole n’exigeant pas la conclusion d’un accord collectif, l’employeur peut mettre en œuvre ces règles par décision unilatérale, par une note de service. Il doit néanmoins le faire « dans le cadre d’un dialogue social de proximité« , « avec les salariés et leurs représentants« – toutefois, cette expression ne renvoie pas expressément à la consultation du comité social et économique laquelle précède en principe les décisions de l’employeur relatives à l’organisation et aux conditions de travail.

Les employeurs sont également invités à prendre de telles mesures dans les zones non concernées par le couvre-feu.

 

Le port du masque

Comme précédemment, le décret du 16 octobre 2020 habilite le préfet de département à rendre le port du masque obligatoire, sauf dans les locaux d’habitation, lorsque les circonstances locales l’exigent.

A ce titre, par exemple, le préfet de police de Paris a rendu le port du masque obligatoire « sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public » par arrêté du 17 octobre 2020.

Le protocole sanitaire en entreprise publié le 31 août 2020 imposait le port du masque grand public systématique au sein des entreprises dans les lieux collectifs clos, tout en permettant des adaptations à ce principe général en fonction du niveau de circulation du virus dans le département d’implantation de l’entreprise et de l’espace de travail des salariés.

Dans sa version du 16 octobre 2020, le protocole exclut toute dérogation au port du masque dans les milieux clos et partagés dans les zones où des mesures de couvre-feu sont appliquées : dans ces territoires, « le port du masque est permanent« .

A cet égard, pour rejeter la requête d’un syndicat qui demandait la suspension du protocole sanitaire en entreprise, en particulier en tant qu’il pose le principe du port systématique du masque en entreprise, le Conseil d’Etat, par une ordonnance de référé du 19 octobre 2020, considère que le protocole constitue un ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur et que « la suspension éventuelle du protocole n’aurait aucune incidence sur la mise en œuvre pratique des obligations légales de l’employeur et sur la charge financière qui en résulte« . Il ajoute que le protocole « a pour objet de contribuer à assurer la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 et a vocation à s’adresser à l’ensemble des employeurs« , et relève « d’un champ d’application distinct de celui de la loi du 9 juillet 2020, celui des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail [dont] il constitue une déclinaison opérationnelle » (CE, 19 octobre 2020, n°444809). Il ne s’agit donc pas d’un acte faisant grief.

Cette analyse rejoint d’ailleurs celle du ministère du Travail qui, dans le questions-réponses publié sur son site le 7 septembre 2020, définit lui-même le protocole comme un « document de référence« , prévoyant des « recommandations doivent être prises en considération par l’employeur pour la mise en œuvre des principes généraux de prévention qui lui incombe en application de l’article L.4121-2 [du Code du travail] ».

Cette analyse est en net décalage avec celle de l’arrêt GISTI du 12 juin 2020, (n° 418142) dans lequel le Conseil d’Etat a jugé que les « documents de portée générale » de ce type peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir, s’ils remplissent trois conditions :

 

    • ils doivent avoir une portée générale, ce qui implique qu’ils aient vocation à s’appliquer à un nombre indéterminé de situation ;
    • ils doivent émaner des autorités publiques ;
    • enfin, ils doivent être susceptibles d’avoir des effets notables sur les droits ou les situations d’autres personnes.

 

En l’espèce, on rappellera que le protocole comportait trois dispositions normatives : l’obligation du port du masque en entreprise, l’interdiction des caméras thermiques et l’interdiction de tout dépistage systématique.

 

La restauration collective

Un autre ajout figure dans la nouvelle version du protocole concernant la restauration collective. En effet, il est précisé que « les responsables d’établissement veillent à définir l’organisation pratique permettant de respecter les mesures de prévention notamment recommandées par l’avis du 21 mai 2020 du Haut Conseil de la santé publique relatif aux mesures barrières et de distanciation physique dans la restauration collective« .

Cet avis préconise notamment d’espacer les tables d’au moins un mètre, de fixer une capacité maximale par table et dans le restaurant, d’imposer le port du masque lors des déplacements, etc.

1 Questions-réponses sur le télétravail, ministère du Travail, mis à jour le 20 octobre 2020.