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Crédit d’impôt recherche (CIR) : Panorama des évolutions intervenues en 2016

Crédit d’impôt recherche (CIR) : Panorama des évolutions intervenues en 2016

L’efficacité et l’attractivité du crédit d’impôt recherche (CIR) sont régulièrement soulignées. Le dispositif, qui est le principal soutien aux activités de recherche et développement, a connu plusieurs évolutions en 2016 qu’il paraît utile de synthétiser.

1. Modifications concernant le champ d’application

Signalons en préambule que le Bofip (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20, n°330) a intégré le fait que « le dépôt d’un brevet ne suffit pas, à lui seul, à établir le caractère substantiel d’innovations techniques » (CE, 13 novembre 2013, n°341432).

1.1. Mises à jour du Bofip concernant les personnels et les dépenses éligibles

Le BOI concerné a fait l’objet de deux importantes mises à jour en 2016 (BOI-BIC-RICI-10-10-20-20).

1. Les chercheurs sont des « scientifiques ou des ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux » (CGI, annexe III, article 49 septies I).

Le BOI reconnait désormais la qualité de scientifique aux titulaires d’un diplôme de niveau master au minimum ou d’un diplôme équivalent (n°10).

Les salariés qui, sans posséder un diplôme d’ingénieur, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise sont assimilables, par le niveau et la nature de leurs activités, aux ingénieurs impliqués dans les travaux de recherche. Le Bofip indique désormais que ces compétences peuvent avoir été acquises antérieurement, c’est-à-dire chez un précédent employeur (n°20).

2. Les techniciens de recherche sont les personnels qui, « quelle que soit leur qualification, exécutent, en étroite collaboration avec le chercheur et sous son contrôle, des tâches nécessaires pour l’exécution des projets de recherche et développement et dont la technicité, l’expérience, ou le savoir-faire pratique dont ils font preuve les rendent indispensables au bon déroulement des travaux de recherche et de développement » (n°50).

3. Les stagiaires et apprentis (n°50), ainsi que les volontaires internationaux mis à la disposition d’une entreprise (n°130), peuvent être considérés comme des personnels éligibles, sous certaines conditions.

4. Les dépenses de personnel qui se rapportent à des personnes titulaires d’un doctorat (ou d’un diplôme équivalent) sont prises en compte pour le double de leur montant pendant les 24 premiers mois suivant leur premier recrutement à condition que le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée et que l’effectif du personnel de recherche salarié de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente (CGI, article 244 quater B, II-b).

La notion de premier recrutement d’un jeune docteur est définie comme le premier CDI conclu postérieurement à son doctorat pour des fonctions liées à son diplôme (n°210). En cas de rupture de ce contrat pendant la période d’essai, le second recrutement ouvre aussi droit aux avantages (n°230). Enfin, la période de 24 mois qui ouvre droit aux avantages liés au recrutement d’un jeune docteur peut être suspendue en cas de congé pour maladie ou maternité (n°210).

Des précisions sont données sur la variation de l’effectif du personnel de recherche à prendre en compte (n°180 et 260), ainsi que sur l’application des avantages liés à l’embauche de jeunes docteurs, au niveau du nouvel employeur (à la suite d’une modification intervenue dans la situation juridique de l’ancien employeur, telle que succession, vente, fusion, …) (n°260).

5. Les sommes portées à la réserve de participation des salariés constituent des dépenses de personnel éligibles au CIR au titre de l’exercice au cours duquel elles ont été réparties entre les salariés ; l’intéressement et les primes d’intéressement également, au titre de l’exercice au cours duquel les sommes correspondantes ont été versées (n°360 prenant acte de la décision CE du 12 mars 2014 n°365875).

6. S’agissant des contributions versées par l’employeur au titre des régimes de prévoyance complémentaire, les versements ayant la nature de cotisations sociales obligatoires incluses dans les dépenses de personnel ouvrant droit au CIR sont précisés (n°310).

7. Depuis le 1er janvier 2010, les rémunérations supplémentaires et justes prix versés aux salariés auteurs d’une invention résultant d’opérations de recherche sont éligibles au CIR. Les missions pour lesquelles des rémunérations supplémentaires et justes prix peuvent être versés sont précisées (n°130).

1.2. Nouveautés en matière de sous-traitance

Il a été jugé dans l’affaire Altran (CAA Versailles, 15 octobre 2015, n°14VE02410, et CE, 20 octobre 2016, n°395306) que la loi interdit à l’entreprise sous-traitante agréée de retenir dans la base de calcul de son propre crédit d’impôt l’ensemble des dépenses facturées à son donneur d’ordre, même lorsqu’elles n’ouvrent pas droit au crédit d’impôt chez le donneur d’ordre.

L’administration a précisé les conséquences d’un retrait de l’agrément CIR dont bénéficiait un organisme sous-traitant, en distinguant selon la date à laquelle les travaux de recherche ont été confiés au sous-traitant (BOI précité, n°245).

1.3. Nouveautés concernant le CIR collection

Le CIR collection est réservé aux entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir (CGI, article 244 quater B, II-h et i).

Le Conseil d’Etat a jugé (CE, 13 juin 2016, Sté Antik Batik, n°380490) que les entreprises industrielles sont celles qui exercent une activité concourant directement à la fabrication ou à la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, des matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant, privant de fait les entreprises non industrielles de la possibilité de bénéficier du CIR collection.

Le Conseil Constitutionnel (27 janvier 2017, décision n°2016-609 QPC) vient malheureusement de juger que la différence de traitement entre les entreprises industrielles et les entreprises commerciales est justifiée et conforme à la Constitution.

2. Mise en place du rescrit CIR « roulant »

Rappelons que les entreprises peuvent depuis le 1er janvier 2013 s’assurer en amont, auprès de l’administration, par voie de rescrit, qu’un projet de recherche est bien éligible au CIR (LPF, article L 80 B, 3°)1.

Un dispositif de rescrit « roulant » pour le CIR est désormais mis en place (depuis le 1er octobre 2016) (BOI-SJ-RES-10-20-20-20, n°20 et s.). En cas de modification d’un projet de recherche pluriannuel, les entreprises ayant déjà obtenu une prise de position formelle de l’administration confirmant l’éligibilité de leur projet pluriannuel au CIR pourront solliciter la révision de la décision initiale, en adressant leur demande 6 mois au moins avant la date de dépôt de la déclaration spéciale de CIR. L’administration devra se prononcer dans les 3 mois de la demande.

Destiné à offrir un surcroît de sécurité, ce dispositif illustre cependant en soi les limites de « la garantie de validation » associée à l’obtention d’un rescrit positif. Les entreprises continueront donc d’évaluer l’opportunité d’une demande de rescrit au cas par cas.

3. Modalités d’intervention des agents du ministère de la recherche

L’administration a commenté (BOI-BIC-RICI-10-10-60, n°140 s.) les modalités d’intervention des agents du ministère de la recherche lors des contrôles portant sur la réalité de l’affectation des dépenses de recherche.

Ainsi, l’agent chargé du contrôle par le ministère ou par l’administration fiscale envoie à l’entreprise une demande d’éléments justificatifs. L’entreprise doit y répondre sous 30 jours (prorogation possible sur demande) en joignant les documents nécessaires à l’expertise de l’éligibilité des dépenses. L’agent peut adresser à l’entreprise une demande d’informations complémentaires (l’entreprise a là encore 30 jours pour répondre). Il peut se rendre sur place après envoi d’un avis de visite.

L’avis émis par l’agent, motivé en cas de contestation de la réalité de l’affectation des dépenses, est notifié à l’entreprise et communiqué à l’administration fiscale, qui demeure seule compétente pour rectifier.
Deux décisions récentes du Conseil d’Etat (CE, 19 juillet 2016, n°380716, SAS Fruitofood et n°393302, SARL Eskape) ont précisé que les agents du ministère sont soumis à un devoir d’impartialité durant les opérations de contrôle (ainsi, le nom de l’agent mandaté doit être porté à la connaissance du contribuable), mais qu’ils n’ont toutefois pas l’obligation d’assurer un débat oral et contradictoire.

4. Précisions sur les modalités de fonctionnement et la composition du Comité consultatif du CIR

Le Comité consultatif du CIR, compétent pour émettre un avis en cas de désaccord subsistant entre un contribuable et l’administration sur des rehaussements portant sur la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses, peut être saisi pour les propositions de rectification adressées depuis le 1er juillet 2016.

Les modalités de fonctionnement et la composition du Comité ont été précisées dernièrement (Décret 2016-766 du 9 juin 2016 et BOI-CF-CMSS-60 du 6 juillet 2016).

Sans surprise, ces modalités sont calquées sur celles des Commissions départementales et nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires.

Il sera intéressant d’examiner à l’usage si la mise en place du Comité atteint l’objectif de pallier aux difficultés de dialogue dans certaines situations et de permettre un règlement plus rapide des situations susceptibles de devenir contentieuses.

Note

1 Rappelons que la société OSEO ne figure plus, depuis le 7 novembre 2015, parmi les organismes compétents pour prendre position sur l’éligibilité des projets de recherche au CIR, et que par ailleurs, depuis le 1er septembre 2015, les PME peuvent également obtenir par voie de rescrit la validation par l’administration d’un montant plancher de dépenses éligibles.

Auteurs

Christophe Leclère, avocat en fiscalité directe

Adrien Sanvelian, avocat, droit fiscal

Crédit d’impôt recherche (CIR) : Panorama des évolutions intervenues en 2016 – Article paru dans le magazine Option Finance le 6 février 2017