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Donations : les nouveaux pièges du démembrement d’un portefeuille boursier

Donations : les nouveaux pièges du démembrement d’un portefeuille boursier

Transmettre une partie de son patrimoine financier à ses enfants est fréquent. Mais cette pratique va poser de nouvelles difficultés pour les plus-values de cession.

Les lois de finances pour 2013 et 2014 ont posé le principe d’un assujettissement au barème progressif de l’impôt sur le revenu, des gains nets de cession des valeurs mobilières. Un abattement pour durée de détention permet de réduire l’imposition s’il s’agit d’actions ou de parts de société, y compris s’il s’agit de l’usufruit ou de la nue-propriété.

L’administration a tardivement ? après la date limite de dépôt de la déclaration des revenus 2013, mis en ligne ses commentaires au BOFiP (Bulletin Officiel des Finances Publiques-Impôts). Comme nous pouvions le craindre, le traitement réserve des difficultés en cas de démembrement.

L’administration rappelle tout d’abord qu’en cas de cession conjointe de titres dont la propriété a été auparavant démembrée, la plus-value est imposable selon les cas : entre les mains de l’usufruitier et du nu-propriétaire selon leurs droits respectifs lorsque le prix de cession est réparti entre eux ; entre les mains du nu-propriétaire si le prix de vente est remployé dans l’acquisition de nouveaux titres ou au nom de l’usufruitier en cas de quasi-usufruit.

Mais l’administration précise ensuite (BOI-RPPM-PVBMI 20-20-20-20, n°40) que lorsque le prix de cession ne fait pas l’objet d’une répartition entre les différents titulaires des droits, le point de départ de la durée de détention, qui sert à déterminer l’abattement applicable, est «la date d’acquisition par le cédant (redevable de l’impôt sur la plus-value) de son droit démembré : soit la date d’acquisition de l’usufruit lorsque le cédant est le quasi-usufruitier ; soit la date d’acquisition de la nue-propriété lorsque le cédant est le nu-propriétaire».

L’administration soutenait déjà cette position à l’égard des plus-values des dirigeants faisant valoir leurs droits à la retraite. Mais c’est désormais un élément-clé dès lors que l’abattement a été généralisé pour contrebalancer une imposition aujourd’hui plus lourde (disparition du taux forfaitaire de 19%).

Les cessions avec répartition du prix de cession ne posent pas de difficulté particulière. Mais lorsque le donataire, généralement un enfant, vend la nue-propriété qu’il vient de recevoir pour obtenir des liquidités, la transmission à titre gratuit a entraîné le «rajeunissement» des droits représentatifs de l’usufruit. Ce faisant, la plus-value réalisée par l’usufruitier (mais imposée entre les mains du nu-propriétaire) se verra refuser le bénéfice de l’abattement normalement applicable à raison de la durée de détention réelle de ses droits par l’usufruitier.

Prenons l’exemple de titres acquis en 2006. Si un contribuable vient à les céder en 2015, il est susceptible d’abattre sa plus-value de 65% à raison d’une détention supérieure à huit ans. En revanche, s’il a transmis en 2015, préalablement à la cession, la nue-propriété des titres à ses enfants et que le prix de cession est remployé, la plus-value de l’usufruitier ne sera pas abattue, la durée de détention, appréciée au niveau du nu-propriétaire, étant inférieure à deux ans.

A l’inverse, dans l’hypothèse d’un quasi-usufruit, la donation de la nue-propriété sera sans incidence sur le calcul du point de départ de la durée de détention qui restera appréciée au niveau de l’usufruitier. Cela peut ainsi conduire au bénéfice d’un abattement «artificiellement» majoré si la durée de détention de l’usufruit est supérieure à celle de la nue-propriété.

L’administration pourrait revoir sa copie et accepter, indépendamment de l’identité du redevable de l’impôt, de calculer deux plus-values de cession, l’une sur l’usufruit, l’autre sur la nue-propriété, fonction de la durée réelle de détention de chacun des droits par leurs titulaires.

Une deuxième difficulté tient à ce que l’administration n’accepte de retenir, pour les besoins de la détermination du prix de revient des titres cédés, les frais d’acquisition à titre gratuit que pour autant qu’ils aient été «effectivement supportés par le contribuable» (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-30 n°80). Ainsi, les droits de mutation à titre gratuit acquittés par un nu-propriétaire pourraient ne pas être pris en compte si c’est l’usufruitier qui est institué redevable de l’impôt, dans l’hypothèse d’un quasi-usufruit.

Sans qu’il soit possible de faire un inventaire exhaustif de toutes les chausse-trapes que recèle une situation de démembrement, on pourrait aussi mentionner les difficultés liées à l’apport concomitant de l’usufruit et de la nue-propriété de titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés, nous invitons les contribuables désireux de transmettre une partie de leurs actifs financiers en démembrement à faire preuve d’une certaine vigilance.

 

Auteur

Thomas Laumière, avocat spécialisé en fiscalité directe.

 

Donations : les nouveaux pièges du démembrement d’un portefeuille boursier est paru dans LeRevenu.com le 19 décembre 2014