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Fiscalité des management packages : des raisons d’espérer

Fiscalité des management packages : des raisons d’espérer

L’administration fiscale a, depuis plusieurs années, mis en oeuvre de manière quasi systématique des procédures de rectification à l’encontre des mécanismes mis en place par les fonds d’investissement et visant à faire participer les dirigeants d’une entreprise au capital de cette société pour permettre un partage différencié de la plus-value lors de la sortie de l’opération en fonction de la rentabilité finale de l’investissement.

L’Administration était sortie ragaillardie d’un contentieux, connu sous le nom d’affaire « Gaillochet » qui avait donné lieu à un arrêt éponyme rendu le 26 septembre 2014 par la Haute Assemblée.

Dans sa décision, le Conseil d’Etat avait considéré que la plus-value réalisée sur des titres issus de l’exercice de promesses pouvait être considérée comme constitutive fiscalement d’un salaire du fait de la connexité existant entre les fonctions du dirigeant et les conditions dans lesquelles ce dernier avait pu bénéficier desdites promesses d’achat de titres.

Mais l’arrêt Gaillochet n’est pas la martingale qui permettra à l’Administration de mener à bien ses contentieux sur ce sujet épineux.

Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public au Conseil d’Etat sous l’arrêt Gaillochet, l’avait déjà fort utilement rappelé dans une chronique parue au cours de l’été 20151 : cette décision n’a absolument pas vocation à sceller le sort des management packages, a fortiori lorsque ledit package est structuré autrement que sous forme de promesses de vente et surtout lorsque les instruments sous-jacents ont fait l’objet d’un investissement effectif au moment de leur souscription par les dirigeants concernés.

Par une série de jugements rendus le 12 juillet 2016 dans une même affaire qui portait cette fois-ci sur des actions de préférence, le tribunal administratif de Paris a eu l’occasion d’illustrer cette portée extinctive qu’il convient de réserver à l’arrêt Gaillochet.

Premièrement, le Tribunal a rappelé que la charge de la preuve de la requalification de la plus-value en salaire incombait à l’Administration. Or, celle-ci se contentait de critiquer les expertises indépendantes transmises par les contribuables pour justifier avoir réalisé leur investissement au juste prix, sans procéder elle-même à cet exercice de valorisation, ni même proposer une valorisation alternative.

Ensuite et surtout, le Tribunal a considéré qu’il ne fallait pas confondre un schéma d’investissement avec un schéma d’intéressement : dès lors qu’une plus-value est réalisée par un salarié, il ne faut pas, de manière systématique, y voir la rémunération d’une performance individuelle ayant contribué à la genèse de cette plus-value et qui donnerait lieu à une qualification fiscale dans la cédule des traitements et salaires.

Enfin, le critère de la disproportion entre le montant investi et le gain réalisé a lui aussi été écarté par le Tribunal, dès lors que cette disproportion était contrebalancée par un risque de perte corrélativement supérieur, ainsi que les expertises fournies en attestaient.

Cette constatation ex post ne peut, selon la juridiction, suffire à caractériser un coupable mécanisme d’intéressement de nature salariale.

Le Tribunal rejoint ainsi les critères posés par le Comité de l’abus de droit fiscal dans son abondante « jurisprudence » et, particulièrement celui, prépondérant, de la prise d’un risque réel de perte par l’investisseur/le dirigeant.

Certes, ces décisions de première instance ne présentent pas un caractère définitif et d’autres nuances sont susceptibles d’émaner de futures décisions jurisprudentielles.

Il reste que la cohérence du raisonnement tenu par le Tribunal avec les positions ainsi exprimées en haut lieu pourrait, chaque fois qu’une prise de risque réelle et qu’un juste prix sont établis, fournir le socle d’une issue favorable aux nombreux litiges en cours.

 

Auteurs

Florian Burnat, avocat en droit fiscal

Alexia Cayrel, avocat en fiscalité