Fiscalité des revenus des sportifs en année olympique
La loi de finances pour 2016 a instauré un dispositif optionnel d’étalement sur quatre ans de l’imposition des primes versées aux médaillés olympiques et paralympiques ainsi qu’à leur encadrement. D’autres régimes, plus anciens, permettent également d’atténuer ou d’étaler la fiscalité du sportif, notamment en cas de hausse exceptionnelle de ses revenus. Cependant, ils ne sont pas toujours compatibles avec le nouveau dispositif. Un arbitrage devra par conséquent être opéré.
Depuis 1984, l’Etat attribue des primes à la performance aux sportifs médaillés aux Jeux olympiques et paralympiques. Entre 1992 et 2008, ces primes étaient strictement exonérées d’impôt sur le revenu1. Dans un contexte de suppression des niches fiscales, l’exonération a été remplacée par une faculté d’étalement de l’imposition sur six années des primes versées lors des Jeux de Vancouver de 20102.
Aucune disposition spécifique n’a été mise en place à l’occasion des Jeux de Londres en 2012 et de Sotchi en 2014. Cependant, les sportifs bénéficiaires conservaient la faculté de soumettre la prime qui leur avait été versée au système du quotient qui permet de réduire la charge de l’impôt résultant de la perception d’un revenu à caractère exceptionnel en atténuant la progressivité de l’impôt3.
L’article 80 de la loi de finances pour 2016 instaure, à compter des Jeux olympiques d’été de 2016, sous un nouvel article 163-0 A ter du CGI, un dispositif permettant aux sportifs médaillés, à leurs entraîneurs et, le cas échéant, à leur guide, quelle que soit leur catégorie d’imposition, d’échelonner sur quatre années l’imposition des primes qui leur ont été versées par l’Etat ou leur fédération à l’occasion de leur médaille.
L’étalement est applicable sur demande expresse et irrévocable du bénéficiaire. Celui-ci pourra ainsi demander à ce que, pour l’établissement de son impôt sur le revenu, le montant de la prime versée soit réparti par parts égales sur l’année au cours de laquelle la prime a été perçue et les trois années suivantes.
L’option pour ce nouveau dispositif est incompatible avec le système du quotient. Les sportifs concernés devront donc choisir entre l’un ou l’autre système.
En toute hypothèse, les primes restent soumises à la contribution sociale généralisée (CSG) de 7,5% et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) de 0,5%.
Si le nouveau dispositif d’étalement présente le double intérêt d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt sur le revenu l’année de la perception de la prime et de différer une partie de l’imposition, un arbitrage s’agissant des modalités d’imposition de la prime devra être effectué au regard notamment de la tranche marginale d’imposition du sportif bénéficiaire et de la perspective de voir ses revenus augmenter à la suite de son succès sportif au cours des trois années suivantes (opérations commerciales, demandes d’interviews, etc.).
Notons par ailleurs que le nouveau dispositif ne semble pas incompatible avec le régime prévu à l’article 100 bis du CGI, qui permet aux sportifs relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux selon le régime de la déclaration contrôlée de demander à être imposés sur la base d’un revenu égal à la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition et des deux ou quatre années précédentes.
Le nouveau dispositif ne semble pas non plus incompatible avec le régime de l’article 84 A du CGI, qui permet aux sportifs salariés de bénéficier du dispositif de l’article 100 bis du CGI pour la détermination du montant imposable des salaires qu’ils perçoivent au titre de la pratique d’un sport. Soulignons à cet égard que l’administration fiscale veille tout particulièrement, selon nos informations, à ce que le lissage de l’imposition des revenus salariaux s’accompagne bien du lissage des dépenses s’y rapportant.
L’option pour ces deux régimes doit en principe être exercée lors du dépôt de la déclaration de bénéfice ou de revenus, mais elle peut également être exercée rétroactivement, sous réserve des délais de prescription, par voie de réclamation contentieuse4.
Relevons enfin que les articles 100 bis et 84 A du CGI s’appliquent aux seuls revenus provenant directement de la pratique d’un sport à l’exclusion des autres produits perçus par les sportifs. Ils ne peuvent en conséquence pas s’appliquer aux revenus publicitaires du sportifs ni aux revenus des entraîneurs qui ne tirent pas leurs revenus de la pratique d’un sport5.
Notes
1 Voir en ce sens : art. 19 de la loi n°91-1323 du 30 décembre 1991 ; art. 44 de la loi n°96-314 du 12 avril 1996 ; art. 17 de la loi n°97-1239 du 29 décembre 1997 ; art. 22 de la loi n°2000-1353 du 30 décembre 2000 ; art. 56 de la loi n°2002-1576 du 30 décembre 2002 ; art. 5 de la loi n°2008-1425 du 27 décembre 2008.
2 Art. 5 de la loi n°2010-1657 du 29 décembre 2010.
3 Art. 163-0 A du CGI.
4 RM De Villiers, n°14365, JO, AN du 15 août 1994, p. 4150, BOI-BNC-SECT-20-20 n°110.
5 RM Labarrère, n°24244, JO, AN du 3 juillet 1995 p. 2901 ; BOI-RSA-BASE-10 n°90.
Auteurs
Philippe Donneaud, avocat associé en droit fiscal
Edouard Nahmias, avocat en droit fiscal