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Fournisseurs de la sphère publique : tour d’horizon sur Chorus

Fournisseurs de la sphère publique : tour d’horizon sur Chorus

Un décret du 2 novembre 2016 fournit l’occasion d’examiner les incidences de la nouvelle obligation à laquelle seront tenues, dès le 1er janvier 2017, les grandes entreprises et les personnes publiques de transmettre, via un portail dédié, leurs factures sous forme électronique dans les relations avec la sphère publique.

Ce décret relatif au développement de la facturation électronique est venu compléter les modalités de mise en œuvre de la solution Chorus Portail Pro1 permettant le dépôt, la réception et la transmission des factures sous forme dématérialisée dans le cadre des relations contractuelles avec l’Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics.

Personnes concernées

La nouvelle obligation vise les titulaires et les sous-traitants admis au paiement direct de contrats conclus par l’Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics.

Elle suppose l’existence d’une relation contractuelle entre la personne publique et son fournisseur et s’applique aux contrats en cours d’exécution.

Faute de lien contractuel, l’intervention d’un fournisseur sur le fondement d’une disposition ou d’une décision unilatérale n’est pas soumise aux obligations relatives à la facturation électronique.

Calendrier de mise en œuvre

Pour tenir compte de la taille des entreprises, la nouvelle obligation sera mise en œuvre de façon progressive.

Ainsi, seront concernées :

  • au 1er janvier 2017, les grandes entreprises et les personnes publiques,
  • au 1er janvier 2018, les entreprises de taille intermédiaire,
  • au 1er janvier 2019, les petites et moyennes entreprises,
  • au 1er janvier 2020, les microentreprises.

Fixées par le décret 2008-1354 du 18 décembre 2008 pris en application de la loi LME, les catégories d’entreprises sont définies d’après les critères utilisés par l’INSEE, lesquels diffèrent de ceux habituellement retenus en matière fiscale.

Ainsi, une « grande entreprise » est une entreprise qui :

  • a au moins 5 000 salariés,
  • ou réalise un chiffre d’affaires de plus de 1,5 milliards d’euros et dont le total de bilan excède 2 milliards d’euros.

Appartenance à un groupe

Pour les besoins de l’analyse statistique et économique, chaque groupe est assimilé à une seule entreprise.

Dès lors, l’appartenance à un groupe peut justifier l’inclusion dans ce dispositif d’une filiale qui ne remplit pas en soi les critères d’une grande entreprise.

Selon l’AIFE2, les unités légales d’un même groupe relèvent de la même catégorie que l’entreprise qui les inclut. Une unité légale détenue à plus de 50% directement ou indirectement par la tête de groupe est considérée comme appartenant à un groupe.

Il convient en conséquence d’apprécier les critères relatifs aux effectifs employés, au chiffre d’affaires et au total de bilan au niveau du groupe et non pas au niveau de chaque entité.

En pratique, un annuaire publié par l’AIFE permet de déterminer les entités concernées, dès 2017, par l’obligation de transmission de leurs factures par voie électronique sur Chorus Portail Pro.

Entreprises étrangères

Les fournisseurs concernés par l’obligation de transmission des factures sous forme électronique sont les entreprises dont le siège social est établi en France, dans l’Union européenne et hors de l’Union dès lors qu’elles sont en relation contractuelle avec une personne publique3.

Toutefois, dans la mesure où les entreprises étrangères ne sont pas immatriculées en France, l’obligation de transmission des factures électroniques ne leur sera applicable qu’au 1er janvier 2020.

Modalités de transmission des factures

Une nouvelle plateforme dénommée « Chorus Portail Pro », ouverte depuis le 20 septembre dernier, permettra aux fournisseurs d’assurer le dépôt, le suivi et la mise à disposition de leurs factures électroniques (https://chorus-pro.gouv.fr/).

L’utilisation du portail est exclusive de tout autre mode de transmission. Les factures qui ne sont pas transmises sur le portail pourront être rejetées par la personne publique après avoir informé l’émetteur par tout moyen de l’obligation qui lui est faite de transmettre ses factures sous forme électronique et l’avoir invité à s’y conformer en utilisant le portail4.

Les personnes publiques destinataires des factures électroniques sont :

  • l’Etat,
  • les établissements publics nationaux : CNRS, Pôle Emploi, CCI…
  • les collectivités territoriales et leurs groupements : villes, métropoles, conseils régionaux, conseils départementaux…
  • les établissements publics de santé : centres hospitaliers…
  • les établissements publics locaux : établissements publics de coopération intercommunale, établissements publics locaux d’enseignement, syndicats mixtes (SIVU et SICOM), établissements publics sociaux et médico-sociaux (notamment EHPAD), régies dotées de la personnalité morale…

Modes d’émission des factures

La solution « Chorus Portail Pro » a été conçue par l’AIFE de façon à laisser aux opérateurs le plus large choix possible dans le mode d’émission des factures électroniques.

Ainsi, trois modes d’émission sont autorisés :

  • Mode Portail : saisie manuelle des données de facturation ou dépôt au format PDF signé ou non signé, PDF mixte ou XML.
  • Mode Service (ou API) : exécution de Chorus à partir d’un système d’information (SI).
  • Mode EDI : transmission de flux au format structuré ou mixte.

Les modes Service et EDI nécessitent des travaux de raccordement préalables.

S’agissant du mode portail, il convient de préciser que tous types de fichiers peuvent y être déposés, y compris le scan PDF d’une facture papier alors même que ce type de fichier n’est pas reconnu d’un point de vue fiscal comme une facture électronique5.

Mentions sur factures

Sans préjudice des mentions obligatoires imposées par la réglementation TVA et la réglementation économique, les opérateurs publics ne pourront accepter les factures transmises par leurs fournisseurs que si celles-ci comportent non seulement certaines mentions déjà prévues par les réglementations précitées (date d’émission de la facture, de livraison ou d’exécution des services, désignation de l’émetteur et du destinataire, numéro unique, etc.), mais également des mentions spécifiques nouvelles : numéro du bon de commande ou de l’engagement généré par le système d’information financière et comptable de l’entité publique, code d’identification du service en charge du paiement, le cas échéant, les modalités particulières de règlement et les renseignements relatifs aux déductions ou versements complémentaires6.

Les factures doivent également mentionner les numéros d’identité visés à l’article R 123-221 du Code de commerce (numéro Siren) de l’émetteur et du destinataire de la facture. Pour les émetteurs ne disposant pas d’un tel numéro, un arrêté fixera l’identifiant qui doit être porté sur les factures7.

Le dispositif Chorus devrait être prochainement complété par un arrêté fixant les modalités techniques de dépôt, de transmission et de réception des factures électroniques sur le portail garantissant leur réception immédiate et intégrale et assurant la fiabilité de l’identification de l’émetteur, l’intégrité des données, la sécurité, la confidentialité et la traçabilité des échanges8.

Des difficultés techniques, l’absence de prise en compte des spécificités propres à la sous-traitance, les nouvelles contraintes imposées par le décret du 2 novembre 2016 pourraient être difficiles à surmonter pour permettre une mise en œuvre effective du processus dès le 1er janvier 2017.

Des problématiques d’ordre fiscal liées aux modalités de conservation et de stockage des factures et à la déduction de la TVA pesant sur les personnes publiques redevables de cette taxe qui recevront des factures papier scannées au format PDF restent elles aussi en suspens.

Les inquiétudes des entreprises portant sur la fiabilité complète du système dès le 1er janvier prochain et les conditions de paiement de leurs factures se sont traduites, mi-novembre, par une demande de report de la mise en œuvre de la mesure formulée auprès du ministre des finances et des comptes publics.

Reste à savoir si cette demande sera accueillie favorablement…

Notes

1 Loi 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, art.1 et ordonnance 2014-697 du 26 juin 2014 relative au développement de la facturation électronique.
2 Agence pour l’Informatique Financière de l’Etat.
3 Informations issues de la FAQ disponible sur https://communaute-chorus-pro.finances.gouv.fr/
4 Décret 2016-1478 du 2 novembre 2016, art. 4.
5 Voir notre article dans Option Finance du 10 octobre 2016.
6 Décret précité du 2 novembre 2016, art. 1.
7 Décret précité du 2 novembre 2016, art. 2.
8 Décret précité du 2 novembre 2016, art. 1.

 

Auteurs

Ariane Beetschen, avocat associée en matière de TVA et autres taxes indirectes, et de taxe sur les salaires, dans tous les secteurs d’activités, avec une dominante industrielle et commerciale.

Marion Taylor, avocat en matière de TVA, et autres taxes indirectes, et de taxe sur les salaires.

Fournisseurs de la sphère publique : tour d’horizon sur Chorus – Article paru dans le magazine Option Finance le 12 décembre 20116