Généralisation de la complémentaire santé : versement « santé » mode d’emploi
13 avril 2016
Il est possible d’exclure de la couverture santé en vigueur dans l’entreprise certains salariés ayant des contrats de courte durée ou un temps de travail très partiel en contrepartie d’un versement «santé» de la part de l’employeur.
Pour rappel, à compter du 1er janvier 2016, les entreprises ont l’obligation de mettre en place une complémentaire santé, dont les garanties minimales sont fixées par l’article L. 911-7 du Code de la sécurité sociale (et son décret d’application).
L’article 34 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (LFSS pour 2016) prévoit cependant la possibilité pour les employeurs d’exclure de la couverture santé en vigueur dans l’entreprise certains salariés sous contrats très courts ou à temps très partiel. En contrepartie, si ces salariés ont souscrits une couverture frais de santé par ailleurs respectant le cahier des charges des contrats «responsables», ils bénéficient d’un versement de leur employeur. Ce versement ne peut toutefois être cumulé avec le bénéfice de la CMU-C, de l’ACS, ou le bénéfice d’une couverture collective obligatoire de frais de santé, y compris en tant qu’ayant droit, ou encore avec une couverture complémentaire donnant lieu à participation financière d’une collectivité publique.
Quels sont les salariés concernés ?
Il s’agit des salariés dont la durée du contrat de travail ou du contrat de mission est inférieure ou égale à trois mois ou ceux dont la durée effective du travail prévue par ce contrat est inférieure ou égale à 15 heures par semaine. La question se pose de savoir si seuls ceux de ces salariés ayant souscrits une couverture santé «responsable» par ailleurs pourront être exclus du champ de la couverture ou bien tous les salariés sous contrats très courts ou à temps très partiel. Une prochaine circulaire de la Direction de la sécurité sociale (DSS) devrait préciser ce point.
On rappellera que sont également bénéficiaires du versement «santé» les salariés en CDD ou en contrat de mission, dont la couverture santé a une durée inférieure à trois mois, et qui ont fait valoir une dispense d’adhésion «de plein droit» (cf. : Généralisation de la complémentaire santé : nouvelles précisions de la Direction de la sécurité sociale) car ils bénéficient par ailleurs d’une couverture respectant les nouvelles exigences des contrats «responsables».
Comment peut-on mettre en place le versement «santé» ?
En principe, seul un accord collectif de branche peut prévoir cette exclusion. Ce n’est qu’à défaut d’accord de branche, ou si celui-ci le permet, que celle-ci peut être opérée par un accord collectif d’entreprise.
De manière transitoire, jusqu’au 31 décembre 2016, elle pourra intervenir par décision unilatérale de l’employeur, à condition toutefois que les salariés ne soient pas déjà couverts à titre collectif et obligatoire, ce qui limite grandement cette voie (article 34 V de la LFSS pour 2016).
Comment est calculé le versement «santé» ?
Le versement «santé» est calculé mensuellement sur la base d’un montant de référence auquel est appliqué un coefficient venant compenser la perte de la portabilité. Ces modalités sont prévues à l’article D 911-8 du Code de la sécurité sociale.
Le montant de référence correspond à la contribution mensuelle de l’employeur au financement de la couverture santé pour la catégorie à laquelle appartient le salarié et pour la période concernée. Une circulaire DSS du 29 décembre 2015 rappelle que lorsque le montant de la contribution de l’employeur est en tout ou partie forfaitaire, il est appliqué un coefficient sur sa participation pour tenir compte le cas échéant du fait que le salarié a une durée de travail inférieure à un temps plein. Le montant de référence ne peut être inférieur à 15 euros ou, pour les personnes relevant à titre obligatoire du régime local Alsace-Moselle à 5 euros, la Direction de la sécurité sociale précisant que ces montants sont proratisés dans les mêmes conditions que lorsque le montant de la contribution de l’employeur est en tout ou partie forfaitaire.
La formule de calcul du montant de référence est la suivante:
X = montant de la contribution patronale forfaitaire X nombre d’heures de travail mensualisées du salarié
151,67
Pour les salariés mis à disposition dans le cadre de l’article L. 5132-9 du Code du travail, le calcul du versement s’effectue sur le fondement du nombre d’heures faisant l’objet de cette mise à disposition.
Une fois ce montant de référence déterminé, il est appliqué un coefficient de majoration au montant de référence, venant compenser le fait que les salariés exclus ne pourront bénéficier de la portabilité prévue à l’article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale.
Ce coefficient est de :
- 105% pour les salariés en CDI ;
- 125% pour les salariés en CDD ou contrat de mission.
Exemple (source circulaire DSS 29 décembre 2015) :
La contribution de l’employeur est forfaitaire et égale à 20 €. Le salarié a un contrat de travail de 15 jours travaillés à temps plein (journée de 7 heures). Dans ce cas, le montant de référence est égal à 13,84 € (= 20 € x 7 h x 15 j / 151,67 h). Le coefficient de majoration sera de 125% : le montant mensuel versé aux salariés sera donc de 17,30 € (13,84 € x 125%).
Régime social du «versement santé»
L’article L. 242-1 du CSS s’applique aux sommes versées au titre du versement santé instauré par l’article L. 911-7-1 du même code. En conséquence, elles sont exonérées de cotisations sociales dans les conditions et limites fixées par cet article et soumises à la CSG-CRDS, et le cas échéant au forfait social au taux de 8%, si l’entreprise emploie au moins 11 salariés.
La Direction de la sécurité sociale précise dans son questions-réponses du 29 décembre 2015 que :
« Pendant la phase d’appropriation des modalités relatives au calcul du versement santé, les organismes de recouvrement respecteront des consignes de souplesse et de bienveillance dans les contrôles. Il s’attacheront en particulier lors des contrôles de l’application du régime social afférant au versement santé à ne pas procéder à des régularisations en cas de calcul erroné des contributions versées au cours des six premiers mois de l’année 2016 et à faire preuve de pédagogie dans les observations apportées ».
Auteur
Florence Duprat-Cerri, avocat counsel en droit social.
Généralisation de la complémentaire santé : versement «santé» mode d’emploi – Article paru dans Les Echos Business le 13 avril 2016
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