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Indemnité de congés payés : comment prendre en compte les rémunérations variables?

Indemnité de congés payés : comment prendre en compte les rémunérations variables?

À l’approche de la période estivale et des congés payés qui l’accompagnent, l’attention peut se porter sur le montant de l’indemnité de congés payés. Si celle-ci ne présente pas de difficulté lorsque le salaire est fixe, elle s’avère plus difficile à déterminer en présence de primes, et notamment de rémunérations variables qui ne sont prises en compte qu’à la double condition d’être liées à l’activité même du salarié et de ne pas être maintenues durant les congés. Explications.


Un double mode de calcul de l’indemnité de congés payés

L’article L.3141-24 du Code du travail prévoit deux modes de calcul de l’indemnité de congés payés :

  • la règle du dixième consistant à fixer le montant de l’indemnité de congé payés à hauteur du dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.
    Cette période de référence peut être fixée par accord collectif ; à défaut, cette période débute le 1er juin de l’année précédente et s’achève le 31 mai de l’année en cours (articles L.3141-11 et R.3141-4 du code du travail).
    Exemple : pour calculer l’indemnité de congés payés d’un salarié prenant des congés au cours de l’été 2019, la rémunération à prendre en compte est celle perçue pendant la période de référence du 1er juin 2018 au 31 mai 2019.
  • la règle du maintien du salaire assurant à l’intéressé une indemnité minimale qui doit être égale au salaire qu’il aurait perçu s’il avait travaillé pendant sa période de congé.

Ces deux modes de calcul doivent être appliqués simultanément, le plus favorable devant être retenu par l’employeur (Cass. Soc. 1er mars 2017, n°15-26943).

De manière générale, la méthode du dixième se révèle plus avantageuse pour le salarié si, par exemple, des réductions d’horaire sont intervenues peu de temps avant le congé, ou si le salarié a perçu un certain nombre de primes pendant l’année de référence.

Les éléments de rémunération à intégrer dans l’assiette de l’indemnité de congés payés

L’assiette du dixième s’entend de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de l’année de référence, c’est-à-dire le salaire brut avant déduction des charges sociales (Cass. Soc. 5 avril 1990, n°87-45228).

En ce qui concerne la règle du maintien de salaire, le salaire à prendre en considération comprend les mêmes éléments que ceux retenus pour l’application de la règle du dixième.

À ce titre, doivent notamment être pris en compte dans le calcul de l’indemnité de congés payés :

  • la rémunération de base ;
  • l’indemnité de congés payés de l’année précédente (article L.3141-24 du Code du travail) ;
  • tous les accessoires de salaire qui ne représentent ni un remboursement de frais (Cass. Soc. 28 juin 2018, n°17-11714), ni la compensation d’un risque exceptionnel et qui constituent un élément de rémunération (Cass. Soc. 5 novembre 2014, n°13-19818) ;
  • le salaire de substitution correspondant à des périodes de repos ou d’inactivité assimilées à des périodes de travail effectif (congés de maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant et d’adoption ; jours de repos accordés dans le cadre d’un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine ; périodes de suspension du contrat pour accident du travail ou maladie professionnelle dans la limite d’une durée d’une année ininterrompue ; périodes de maintien ou de rappel au service national) ;
  • les primes d’ancienneté (Cass. Soc. 7 septembre 2017, n°16-16643), sauf lorsqu’elles sont versées au salarié tout au long de l’année (Cass. Soc. 16 juin 1998, n°96-43187) ;
  • les primes et indemnités versées en complément du salaire si elles sont versées en contrepartie ou à l’occasion du travail (Cass. Soc. 7 septembre 2017, n°16-16643).

On peut citer à cet égard :

  • les indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire en repos (article L.3141-24 du code du travail ; Cass. Soc. 23 octobre 2001, n°99-40879) ;
  • les majorations pour heures supplémentaires (Cass. Soc. 11 juillet 2000, n°98-40696) ;
  • les majorations pour travail de nuit (Cass. Soc. 25 janvier 1968, n°66-40557) ou les primes de nuit (Cass. Soc. 18 décembre 1996, n°94-41185) ;
  • les primes de soirée et de samedi ou encore les majorations pour travail les dimanches et jours fériés si elles correspondent à une servitude permanente de l’emploi (Cass. Soc. 3 juillet 1990, n°89-40340 ; Cass. Soc. 11 février 1998, n°95-44887) ;
  • l’indemnité d’astreinte (Cass. Soc. 2 mars 2016, n°14-14919) ;
  • la rémunération des temps de pause destinées à couvrir une sujétion liée à l’emploi du salarié (Cass. Soc. 5 novembre 2014, n°13-19818).

Pour les rémunérations variables, deux conditions cumulatives

Dans le silence de la loi, la jurisprudence retient que la rémunération s’entend de la contrepartie du travail effectué, qu’il s’agisse de salaires ou de commissions (Cass. Soc. 16 février 1983, n°81-41615).

Plus précisément, les primes versées en fonction des résultats sont comprises dans l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés à la double condition :

  • d’être liées à l’activité même du salarié :
    – doit ainsi être incluse dans l’assiette la prime venant récompenser l’activité déployée personnellement par le salarié (Cass. Soc. 10 octobre 2001, n°99-44300 ; Cass. Soc. 30 avril 2003, n°01-41874) ou encore la prime étroitement liée à l’activité et aux performances du salarié (Cass. Soc. 5 juin 2013, n°11-28580) ;
    – doit au contraire être exclue la rémunération variable versée au salarié et calculée, non sur son activité personnelle, mais sur le résultat global de son service, de son réseau ou de son entreprise (Cass. Soc. 16 septembre 2009, n°08-41442 ; Cass. Soc 18 février 2015, n°13-20920 et n°13-20921) ;
  • et de ne pas être maintenues pendant les congés : en décider autrement conduirait à verser deux fois les primes, au moins pour partie (Cass. Soc. 25 février 2009, n°06-46436 ; Cass. Soc. 13 février 2013, n°11-23880 ; Cass. Soc. 27 janvier 2016, n°14-20084).

Ainsi, sont exclus de l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés :

  • le 13e mois de salaire calculé pour l’année entière, périodes de travail et de congé confondues, dont le montant n’est pas affecté par le départ du salarié en congé (Cass. Soc. 1er mars 2017, n°15-16988 ; Cass. Soc. 26 septembre 2018, n°17-18453) ;
  • la prime d’assiduité et de ponctualité versée globalement sur l’ensemble de l’année, périodes de travail et de congés payés confondues (Cass. Soc. 26 mai 1999, n°97-43681) ;
  • une prime présentant un caractère discrétionnaire (Cass. Soc.1er avril 1997, n°95-40391 ; ass. Soc. 14 octobre 2009, n°07-45587).

Le casse-tête des commissions

A priori, les deux critères (être liées à l’activité même du salarié et ne pas être maintenues durant les congés) semblent faciles à appliquer pour déterminer si des rémunérations variables sont ou non à intégrer dans l’assiette de l’indemnité de congés payés.

Or, l’appréhension de la 2nde condition se révèle aléatoire dans la mesure où la Cour de cassation retient des solutions divergentes en considérant :

  • d’une part, que l’inactivité liée aux congés payés affecte nécessairement la part d’activité à prendre en considération, de sorte que les rémunérations variables doivent entrer dans l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés (Cass. Soc. 7 mars 2007, n°05-42826 ; Cass. Soc. 12 novembre 2008, n°07-41348 ; Cass. Soc. 4 mai 2011, n°10-10654 ; Cass. Soc. 24 septembre 2014, n°12-28965 ; Cass. Soc. 23 novembre 2016, n°15-19475) ;
  • d’autre part, que sont exclues de l’assiette de l’indemnité de congés payés les primes ayant le caractère de salaire dont le montant n’est pas affecté par le départ du salarié en congé (Cass. Soc. 13 novembre 1990, n°87-42193 ; Cass. Soc. 13 février 2013, n°11-23880 ; Cass. Soc. 10 avril 2013, n°12-16225 ; Cass. Soc. 23 novembre 2016, n°15-10945), et ce notamment lorsque la partie variable de la rémunération est allouée globalement pour l’année, périodes de travail et de congé confondues (Cass. Soc. 20 septembre 2005, n°03-41549 ; Cass. Soc. 21 février 2007, n°04-48259 ; Cass. Soc. 19 décembre 2007, n°05-41554 ; Cass. Soc. 25 février 2009, n°06-46436 ; Cass. Soc 18 février 2015, n°13-20920 et n°13-20921).

Cette « schizophrénie » de la Cour de cassation est telle que, le 23 novembre 2016, la Cour a rejeté le pourvoi formé contre un arrêt d’appel ayant jugé que la prime de résultat sur objectifs quantitatifs et qualitatifs définis annuellement à chaque salarié après tenue d’une entretien annuel de performance était nécessairement affectée par les périodes d’inactivité du salarié (pourvoi n°15-19475), tandis que, le même jour, la Cour a censuré un autre arrêt d’appel pour avoir jugé que l’atteinte des objectifs assignés individuellement à la salariée était affectée par la prise de congés payés qui laissaient moins de temps pour les réaliser (pourvoi n°15-10945).

Bref, un peu de clarification serait la bienvenue afin que salariés et gestionnaires de paie puissent sereinement jouir de leurs congés.

Auteur

Vincent Duval, avocat en droit social

Indemnité de congés payés : comment prendre en compte les rémunérations variables ? – Article paru dans Les Echos Exécutives le 13 mai 2019
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