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Individualisation de l’activité partielle : du « sur-mesure » pour la reprise de votre activité

Individualisation de l’activité partielle : du « sur-mesure » pour la reprise de votre activité

Dans le cadre d’une stratégie de déconfinement et de reprise progressive de l’activité économique, le Gouvernement a souhaité permettre aux entreprises d’individualiser l’activité partielle pour l’adapter plus finement à leurs besoins.

L’ordonnance n°2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a créé un article 10 ter dans l’ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle. Cet article 10 ter permet à l’employeur d’individualiser l’activité partielle, sous certaines conditions, en vue d’assurer le maintien ou la reprise d’activité.

Une dérogation au caractère collectif de l’activité partielle

Par principe, l’activité partielle est une mesure collective en vertu de l’article L. 5122-1 du Code du travail. La réduction ou cessation d’activité doit concerner tout l’établissement, ou une « partie d’établissement » correspondant à une unité de production, un atelier ou encore un service.

Selon le ministère du Travail, « en cas de réduction collective de l’horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d’activité partielle individuellement et alternativement afin de pouvoir autoriser la mise en place d’un système de « roulement » par unité de production, atelier, services, etc. ».

Il était donc déjà possible d’instaurer des différences de niveau d’activité partielle selon les services (ex : service Comptabilité à 80% d’activité, service Informatique à 50% d’activité, etc.). Il était aussi possible de retenir des définitions fines et pragmatiques de la notion de « service » en fonction des spécificités des postes de travail pour que le niveau d’activité partielle soit adapté au plus près de la réalité du terrain.

En revanche, il n’était, jusqu’alors, pas possible d’instaurer des différences de niveau d’activité partielle entre des salariés appartenant au même service et effectuant donc le même travail (ex : au sein du service Informatique, tous les salariés de ce service devaient avoir un même niveau d’activité de 50% à la fin de la période, y compris en étant éventuellement placés alternativement en activité partielle).

Or, grâce à l’article 10 ter de l’ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020, il est, désormais, possible de différencier les niveaux d’activité partielle entre des salariés appartenant au même service.

En effet, par dérogation au caractère collectif de l’activité partielle, l’employeur peut, « lorsque cette individualisation est nécessaire pour assurer le maintien ou la reprise d’activité » :

    • « placer une partie seulement des salariés de l’entreprise, d’un établissement, d’un service ou d’un atelier, y compris ceux relevant de la même catégorie professionnelle, en position d’activité partielle » (ex : au sein du même service, un salarié travaille normalement à 100 % tandis qu’un autre salarié est placé en activité partielle à 100 %) ;
    • « ou appliquer à ces salariés une répartition différente des heures travaillées et non travaillées » (ex : au sein du même service, un salarié a un niveau d’activité de 50%, un autre de 80% et un autre de 30%).

L’employeur doit, toutefois, respecter certaines conditions.

Une individualisation de l’activité partielle sous conditions

Cette individualisation de l’activité partielle est mise en œuvre :

    • soit par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, convention ou accord de branche ;
    • soit après avis favorable du comité social et économique (CSE) ou du conseil d’entreprise.

A la lecture du texte, l’employeur semble disposer d’un vrai choix entre ces deux modalités de mise en œuvre.

En l’absence de toute précision textuelle contraire, nous pensons que les « petits » CSE dans les sociétés de moins de 50 salariés seraient aussi compétents pour rendre un avis favorable sur cette individualisation de l’activité partielle.

En vertu de l’article 10 ter, l’accord ou le document soumis à l’avis du CSE ou du conseil d’entreprise doit notamment déterminer :

Les compétences identifiées comme nécessaires au maintien ou à la reprise de l’activité de l’entreprise, de l’établissement, du service ou de l’atelier ;

Les critères objectifs, liés aux postes, aux fonctions occupées ou aux qualifications et compétences professionnelles, justifiant la désignation des salariés maintenus ou placés en activité partielle ou faisant l’objet d’une répartition différente des heures travaillées et non travaillées ;

Les modalités et la périodicité, qui ne peut être inférieure à trois mois, selon lesquelles il est procédé à un réexamen périodique des critères mentionnés au 2° afin de tenir compte de l’évolution du volume et des conditions d’activité de l’entreprise en vue, le cas échéant, d’une modification de l’accord ou du document ;

Les modalités particulières selon lesquelles sont conciliées la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés concernés ;

Les modalités d’information des salariés de l’entreprise sur l’application de l’accord pendant toute sa durée.

Même si cela paraît, à première vue, complexe, il est donc possible d’appliquer des taux différents d’activité partielle à des salariés appartenant au même service, en fonction de critères objectifs liés aux postes, aux fonctions et/ou aux qualifications et compétences professionnelles. Cette individualisation doit faire, objectivement, sens au regard d’un objectif de maintien ou de reprise de l’activité.

Si l’employeur décide de mettre en place cette individualisation en collaboration avec le CSE, il lui soumet un document, comprenant notamment une explication des critères objectifs justifiant l’individualisation, et doit obtenir du CSE un avis favorable sur ce document. Le CSE dispose donc d’un droit de veto et il faut trouver un accord avec lui, en particulier sur ces critères objectifs.

Date d’application de la faculté d’individualisation de l’activité partielle

L’article 10 ter a été inséré dans l’ordonnance du 27 mars 2020 et est, donc, applicable à compter du 12 mars 2020 en vertu de son article 12. Néanmoins, pour appliquer l’individualisation de l’activité partielle, l’employeur doit avoir signé un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou avoir obtenu un avis favorable du CSE sur les points évoqués ci-dessus.

Enfin, les accords ou décisions unilatérales d’individualisation de l’activité partielle cessent de produire leurs effets à une date restant à fixer par décret et, au plus tard, au 31 décembre 2020. Il faudra alors s’en tenir à la philosophie traditionnelle de l’activité partielle et donc l’appliquer de manière collective.

Article publié dans les Echos Executives du 08/06/2020