Information des salariés sur les opérations de cession : les retouches de la loi Macron
Sans remettre en cause le mécanisme d’information préalable des salariés en cas de cession de PME, la loi Macron n°2015-990 du 6 août 2015, en a corrigé les aspects les plus critiqués en s’inspirant des recommandations formulées par Mme la députée Dombre-Coste. Point d’arrêt sur les principales évolutions.
Nouveau champ d’application
Très critiqué par l’étendue de son champ d’application, qui incluait toutes les cessions et donc notamment les opérations d’apports de titres, donations, etc., le dispositif d’information des salariés institué par la loi Hamon du 31 juillet 2014 est désormais applicable aux seuls cas de vente de l’entreprise. Le législateur a ainsi fait (tardivement) le constat que c’était «seulement en cas de vente que le salarié est vraiment en mesure de proposer une offre concurrente équivalente1». Les opérations intragroupes ne sont en revanche pas exclues par essence, comme cela avait été pourtant suggéré, mais elles devraient être moins concernées désormais du fait qu’elles interviennent plus rarement sous forme de vente. Autre modification du champ d’application, le seuil de 250 salariés est supprimé des critères d’éligibilité. Seront ainsi désormais concernées les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total de bilan ne dépasse pas 43 millions d’euros.
Une procédure mieux sécurisée
Une critique avait été également émise à propos de l’insécurité tenant à la bonne délivrance de l’information aux salariés en amont de la cession. La loi dispose que, désormais, lorsque l’information du salarié est effectuée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la date de notification de l’information au salarié n’est plus la date de la remise effective, mais celle de la première présentation de la lettre. Dès lors, le point de départ du délai est fixe, ce qui facilite considérablement en pratique l’information des salariés dispersés géographiquement ou en congés.
Une sanction allégée
Les précédentes dispositions sanctionnaient de nullité les cessions qui n’avaient pas donné lieu à une information préalable des salariés de l’entreprise. La loi Macron atténue considérablement cette sanction : le défaut d’information des salariés en cas de vente expose la société concernée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 2% du prix de vente. Cette sanction, qui peut s’avérer lourde lorsque le prix de vente est élevé, reste moins sévère que la nullité, cette dernière ayant en tout état de cause été déclarée inconstitutionnelle par une décision du 17 juillet 20152. L’amende sera prononcée par la juridiction saisie dans le cadre d’une action en responsabilité.
La question pourra cependant se poser du sort de cette sanction lorsque plusieurs contentieux individuels auront été soumis à des juridictions différentes…
Précisons enfin que cette sanction ne sera effective qu’à l’issue d’un délai de six mois suivant la publication de la loi soit à Compter du 6 février 2016. Dans cette attente, l’ancien régime s’applique et ce, sans donc être assorti d’une sanction spécifique du fait que la précédente a été, comme rappelé ci-dessus, censurée par le Conseil constitutionnel. La prudence commande cependant de continuer à respecter cette obligation d’information pendant cet intervalle afin de ne pas s’exposer à une action en responsabilité civile de la part des salariés.
Notes
1 Exposé des motifs de l’amendement ayant introduit l’article 204 de la loi Macron.
2 Cons. const. 17-07-2015 n°2015-476 QPC
Auteurs
Jean-Robert Bousquet, avocat associé en Coporate/Fusions & Acquistions
Pierre Bonneau, avocat associé en droit du travail, droit pénal du travail et droit de la protection sociale