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La distribution de fonds : de nouveaux textes d’harmonisation européens

Commission Européenne

La Commission européenne a présenté le 12 mars 2018 une proposition de directive1 et de règlement2 (ensemble, les « Propositions« ) en vue de faciliter la commercialisation de parts et actions d’organismes de placements collectifs en valeurs mobilières (« OPCVM« 3) et de fonds d’investissements alternatifs (« FIA« 4) , que ces derniers relèvent ou non des statuts spécifiques (tels qu’EUSEF, EUVECA ou ELTIF) (ensemble, les « Fonds« ).


Si ces Propositions vont évoluer avant d’être adoptées, il faut noter que l’objectif poursuivi est bien de faciliter la commercialisation des Fonds à travers l’Union, la Commission ayant constaté que si le nombre de Fonds en Europe est supérieur à celui des Etats-Unis, leurs encours sont sensiblement plus faibles.

Outre leurs dispositions visant à modifier UCITSD et l’AIFMD, avec (i) la centralisation au niveau de l’ESMA des informations sur les Fonds et leurs gestionnaires ainsi que (ii) la diffusion par les autorités compétentes (ex : l’AMF) d’informations sur les normes et coûts réglementaires afférents dans les juridictions considérées, les Propositions envisagent des modifications aux directives actuelles qui s’articulent autour de quatre séries de mesures dont certaines seraient susceptibles d’impacter de manière substantielle la dynamique actuelle de commercialisation en France :

  • tout d’abord, la proposition de règlement vise à uniformiser, sur la base d’UCITSD, les conditions applicables à la documentation commerciale. S’agissant spécifiquement des OPCVM, la revue de cette documentation ne constituerait pas une condition préalable à la commercialisation dès lors qu‘elle devrait intervenir dans un délai de dix jours à compter de la notification de commercialisation. Les autorités de tutelle seraient donc contraintes, en termes de temps de revue, pour valider la documentation qui leur serait présentée ;
  • ensuite, la proposition de directive introduit un concept de pré-commercialisation qui n’est pas inconnu du droit français5 : la « pré-commercialisation [désigne] la fourniture directe ou indirecte d’informations sur les stratégies d’investissement ou les idées d’investissement par un gestionnaire ou en son nom à des investisseurs professionnels domiciliés ou enregistrés dans l’Union afin de tester leur participation dans un [Fonds] non encore établi ». Comme pour le texte français, les souscriptions éventuelles, par les investisseurs approchés seront considérées comme résultant d’un acte de commercialisation. En revanche, à la différence du texte français qui limite cette pratique à une prise de contact de cinquante investisseurs au plus, le projet européen ne fixe pas de limite. Toutefois, alors que le texte français couvre tant les OPCVM que les FIA, le concept de pré-commercialisation n’est envisagé par les Propositions que pour les FIA ;
  • par ailleurs, la proposition de directive prohibe les dispositions légales des Etats membres requérant des Fonds l’établissement d’une présence locale pour le traitement des souscriptions pour favoriser, au contraire, un régime de diffusion de traitement de ces demandes sur une base uniformisée. Cette disposition pourrait donc impacter le régime du correspondant centralisateur de droit français ;
  • enfin, les Propositions prévoient qu’un Fonds puisse cesser de commercialiser ses parts ou actions dans un Etat membre donné dès lors que moins de 10 investisseurs représentant moins de 1% des actifs sous gestion de ce Fonds sont établis dans la juridiction considérée. A l’issue de cette période, le fonds ne serait plus soumis qu’aux exigences générales d’information de ses investisseurs et non plus à celles spécifiques à l’exercice de son passeport commercialisation.

S’il est encore trop tôt pour tirer des conclusions des Propositions, la route étant encore longue avant qu’elles ne soient adoptées (et transposées), il faut toutefois se réjouir que la dynamique initiée en vue d’une harmonisation des règles de distribution des Fonds continue et que , il convient de le souligner, le régulateur français ait probablement « anticipé » ces évolutions, une démonstration de la qualité de sa réglementation dans la perspective du Brexit.

Notes

1 COM (2018)110
2COM (2018) 92
3Au sens de la directive 2009/65/UE (« UCITSD »)
4Au sens de la directive 2011/61/UE (« AIFMD »)
5 Voir Position AMF 2014-04

 

Auteur

Jérôme Sutour, avocat associé, responsable Services financiers

 

La distribution de fonds : de nouveaux textes d’harmonisation européens – Analyse juridique parue dans le magazine Option Finance le 19 mars 2018