La présomption de démission en cas d’abandon de poste est entrée en vigueur !
19 avril 2023
La loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi a créé dans le Code du travail un nouvel article L.1237-1-1 aux termes duquel le salarié qui abandonne volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai fixé par l’employeur est présumé avoir démissionné à l’issue d’un délai dont la durée minimale est fixée par un décret en Conseil d’Etat.
Le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de la présomption de démission peut saisir le conseil de prud’hommes. L’affaire est alors portée directement devant le bureau de jugement qui statue sur la nature de la rupture et ses conséquences dans un délai d’un mois à compter de sa saisine.
Une mesure validée par le Conseil constitutionnel
Arguant de ce que cette présomption était entourée de garanties suffisantes dès lors que la jurisprudence décide que l’abandon de poste ne peut pas revêtir un caractère volontaire en cas de justification par un motif légitime, le Conseil constitutionnel a validé cette mesure (décision 15 décembre 2022 n° 2022-844 DC).
Pris pour l’application de ces dispositions, le décret en Conseil d’Etat n°2023-275 du 17 avril 2023 a été publié au Journal Officiel le 18 avril 2023.
Ainsi que l’avait annoncé le ministère du Travail, une foire aux questions a également été publiée sur ce sujet le 18 avril 2023.
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Fixation des conditions de mise en œuvre de la présomption de démission :
Le décret du 17 avril 2023 fixe au nouvel article R.1237-13 du Code du travail les conditions dans lesquelles le salarié peut se prévaloir d’un motif légitime de nature à faire obstacle à la présomption de démission énoncée par l’article L.1237-1-1 du Code du travail.
Ainsi, l’employeur :
-
- qui constate que le salarié a abandonné son poste et entend faire valoir la présomption de démission prévue à l’article L.1237-1-1 ;
-
- doit le mettre en demeure, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, de justifier son absence et de reprendre son poste.
Tirant les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 15 décembre 2022, le décret précise que :
-
- dans le cas où le salarié entend se prévaloir auprès de l’employeur d’un motif légitime de nature à faire obstacle à la présomption de démission, tel que, notamment, des raisons médicales, l’exercice du droit de retrait prévu à l’article L.4131-1, l’exercice du droit de grève prévu à l’article L.2511-1, le refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à une réglementation ou la modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur,
-
- il en indique le motif dans la réponse qu’il apporte à la mise en demeure.
L’énoncé des motifs légitimes susceptibles de faire obstacle à l’application de la présomption n’est pas limitatif.
Le délai minimal accordé au salarié :
-
- pour justifier de son absence et reprendre son poste ;
-
- et au terme duquel il est réputé avoir démissionné ne peut être inférieur à quinze jours à compter de la date de présentation de la mise en demeure.
Les principaux apports du questions-réponses
Le questions-réponses publié par le ministère du Travail le 18 avril 2024 répond à certaines questions laissées en suspens par les dispositions légales et réglementaires applicables.
Sont notamment traités les points suivants :
L’obligation pour l’employeur d’envoyer une mise en demeure au salarié en abandon de poste
L’employeur peut décider de ne pas mettre en demeure son salarié qui a abandonné volontairement son poste. Dans ce cas, l’employeur conserve le salarié dans ses effectifs. Le contrat de travail du salarié n’est pas rompu mais seulement suspendu ; la rémunération du salarié n’est donc pas due.
A contrario, si l’employeur désire mettre fin à la relation de travail avec le salarié qui a abandonné son poste, il doit mettre en œuvre la procédure de mise en demeure et de présomption de démission. Il n’a plus vocation à engager une procédure de licenciement pour faute.
Le moment à partir duquel le salarié est considéré comme démissionnaire.
Si le salarié ne répond pas à la mise en demeure et ne reprend pas le travail au plus tard à la date fixée par l’employeur ou s’il répond à la mise en demeure de son employeur qu’il ne reprendra pas son travail dans l’entreprise, le salarié sera considéré comme démissionnaire à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur dans la lettre de mise en demeure.
Le préavis du salarié réputé démissionnaire
Le fait que le salarié soit réputé démissionnaire à la suite d’un abandon de poste n’exclut pas l’existence d’un préavis.
En effet, les règles de droit commun s’agissant du préavis de démission s’appliquent. «Le salarié à qui l’employeur demande d’exécuter son préavis doit s’y conformer. […]. Il est probable que dans le cas d’un salarié en abandon de poste et qui n’a pas répondu à la mise en demeure de son employeur, le salarié refusera d’exécuter son préavis. Dans cas, le préavis ne sera pas exécuté et l’employeur n’aura pas d’indemnité compensatrice à verser au salarié.»
Les entreprises devront se montrer particulièrement vigilantes dans l’application qu’elles feront de cette nouvelle disposition dont la mise en œuvre prive le salarié du bénéfice des allocations de chômage.
En effet, dans le cas où le juge, saisi par le salarié d’une contestation portant sur la rupture du contrat de travail, déciderait que la démission est équivoque, celle-ci serait requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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