L’application de la réforme du Code civil
Nous y sommes ! Bien qu’elle doive encore être ratifiée par le Parlement, l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats est en vigueur depuis le 1er octobre.
Cette réforme procède globalement d’une volonté de modernisation et de simplification du droit. Au nom de la prise en compte des intérêts des acteurs économiques, elle modifie, codifie et édifie… non sans charrier son lot d’incertitudes.
Parmi ces dernières, la possibilité pour les parties d’échapper à la révision ou résolution pour imprévision introduite à l’article 1195 du Code civil. Dormez, braves gens ! Rétorque le rapport au président de la République : les nouvelles dispositions ne seraient, par principe, pas d’ordre public et pourraient donc être aménagées ou exclues contractuellement. En d’autres termes, il serait loisible à ceux désirant s’y soustraire de renoncer à l’application de l’article 1195. Le volontarisme souvent optimiste du Rapport ne suffit toutefois pas à lui conférer une valeur normative. Partant, la prudence invite à ne dormir que d’un Å“il. A cet effet, outre la seule renonciation à l’article 1195, on conseillera d’adjoindre une clause par laquelle les parties déclarent assumer le risque d’exécution excessivement onéreuse résultant d’un changement de circonstances imprévisible, l’aléa chassant alors l’imprévision.
Par ailleurs, l’Ordonnance procède à un vaste exercice de réécriture parfois empreint d’une maladresse pouvant faire douter de la portée de certaines de ses dispositions. Pour ne prendre que deux exemples qui concentrent l’attention des praticiens, citons :
- l’articulation du régime de droit commun de la représentation, inséré aux articles 1153 et suivants du Code civil, avec certains régimes spéciaux, en particulier ceux issus du droit des sociétés ; ou
- la référence au contrat international, critère autorisant un paiement en devise étrangère, plutôt qu’au paiement international dans l’article 1343 3.
Afin de répondre aux défis lancés par l’Ordonnance, dans une dynamique de saine émulation, des contributions de toutes formes ont essaimé : colloques, ouvrages spécialisés, petits déjeuners à thème, numéros spéciaux de revues, applications pour smartphones et tablettes1 …
Ce droit nouveau prendra sans doute un peu de temps pour être appliqué avec justesse : on ne chasse pas en quelques mois des habitudes dont certaines sont pluriséculaires.
Note
1 Celle de CMS Bureau Francis Lefebvre, CONTRALTO, est d’ores et déjà disponible gratuitement sur App Store, Google Play et Windows App Store.
Auteurs
Alexandre Bordenave, avocat au sein de l’équipe Titrisation et financements structurés
Rosalie Scholz, juriste en droit des contrats