L’épargne investie en actions ou en parts d’OPCVM : Etat des lieux
En toute période se pose la question de l’opportunité d’investir une part raisonnable de son épargne en actions ou en parts d’OPCVM (FCP ou SICAV), par un investissement direct ou en recourant à un PEA ou à l’assurance-vie. Une comparaison des règles fiscale et sociale peut être utile.
1. Régime applicable dans le cadre d’un compte-titres ordinaire
1.1 Dividendes
Les dividendes perçus par les personnes physiques supportent les prélèvements sociaux à la source, calculés au taux de 17,2% sur le montant brut, ainsi que, sauf dispense1, un acompte d’IR de 12,8% sur la même base.
L’année suivante, le dividende sera à inclure dans la déclaration des revenus du bénéficiaire, mais l’acompte s’imputera sur une dette d’IR du même montant, correspondant aux 12,8% du prélèvement forfaitaire à la source dit PFU (entré en vigueur le 1er janvier 2018). Toutefois, en cas de renonciation au PFU (elle devra porter sur l’ensemble des revenus et plus-values de la même année en relevant), l’acompte sera restitué et l’IR définitif sera calculé selon les règles du barème progressif mais sur une base diminuée d’un abattement de 40%2, des droits de garde et de 6,8 points correspondant à la CSG déductible.
Les titulaires d’un revenu fiscal de référence supérieur à 500 000 € (250 000 € s’il s’agit de contribuables vivant seuls) devront acquitter la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de 3% ou 4% sur la base des dividendes bruts. En cas de renonciation au PFU, la base de calcul de cette contribution sera réduite des droits de garde et des 6,8% de CSG déductible (mais l’abattement de 40% sera neutralisé pour cette contribution).
En résumé : Pour les contribuables les plus taxés, l’impôt pourra atteindre 34%.
1.2 Plus-values
Les plus-values de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux sont taxées seulement à la suite de leur déclaration (en année n+1), à hauteur de 30% (17,2% au titre des prélèvements sociaux et 12,8 d’IR).
En cas de renonciation au PFU, elles supportent l’IR au barème progressif sur une base réduite d’un abattement pour durée de détention qui s’élève en principe au maximum à 65% (en cas de détention excédant 8 ans)3 et des frais de courtage. Et pour l’imposition de l’année n+2 (sur les revenus de l’année n+1), le contribuable aura droit dans ce cas à une réduction de son revenu imposable à l’IR égale à 6,8% de la plus-value réalisée en année n.
On notera toutefois que l’abattement ne s’applique pas aux titres acquis à compter du 1er janvier 2018, et que renoncer au PFU n’est donc pas nécessairement intéressant.
Pour les titulaires d’un revenu fiscal de référence supérieur à 500 000 € (250 000 € s’il s’agit de contribuables vivant seuls), il faut ajouter la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de 3% ou 4%, sur une base brute (en cas de renonciation au PFU, les frais de courtage sont déductibles de l’assiette, mais pas l’abattement pour durée de détention).
En résumé : Pour les contribuables les plus taxés, l’impôt atteindra 34% en année n+1.
Nota : La détention des titres sur un compte-titre ordinaire oblige le contribuable à déclarer avec soin non seulement les éventuels abattements pour durée de détention, mais aussi et ses moins-values car celles-ci seront imputables sur les plus-values imposables des 10 années suivantes (même dans le cadre du PFU). Les moins-values permettent de réduire l’IR mais aussi les prélèvements sociaux et la contribution sur les hauts revenus.
2. Intérêt du PEA
Un PEA peut recevoir des versements en numéraire jusqu’à un maximum de 150.000 € (un couple peut ouvrir deux PEA), et un PEA-PME qui peut recevoir jusqu’à 75.000 € de versements.
Les titres achetés grâce à ces versements4 bénéficient d’une exonération d’IR portant sur les dividendes et les plus-values. En revanche, les prélèvements sociaux frappent l’accroissement de la valeur du portefeuille. Mais ils ne sont prélevés qu’à l’occasion d’un retrait ou d’une clôture du plan (en principe au taux de 17,2%, étant précisé que la loi de finances pour 2018 a réduit les effets de la règle dite des taux historiques). Par rapport à une détention directe, l’investisseur peut donc faire fructifier l’économie de trésorerie résultant du différé de taxation.
Nota : L’exonération des plus-values réalisées sur les titres portés dans le PEA a toujours présenté un intérêt, qui demeure même avec l’introduction du PFU.
Attention toutefois à avoir en tête les principales contraintes suivantes :
- tout retrait dans les 8 ans suivant le premier versement sur le plan entraînera sa clôture ;
- tout retrait avant le 5ème anniversaire entraînera de surcroît une taxation moins avantageuse.
En revanche, après huit ans, le retrait empêche seulement de faire de nouveaux versements.
Ainsi, même s’il n’a jamais vraiment fonctionné, un PEA arrivant au 8ème anniversaire du premier versement devient particulièrement attractif : tant qu’aucun retrait n’est effectué, il peut recevoir de nouveaux versements (dans la limite du plafond) et les retraits postérieurs n’entraînent pas la clôture du plan.
Avantage supplémentaire, une sortie du PEA en rente viagère est envisageable.
Attention : Au décès du titulaire du plan, les plus-values engrangées sont soumises aux prélèvements sociaux (alors que les plus-values latentes sur le compte titre ordinaire du défunt en sont affranchies).
3. Intérêt du contrat d’assurance-vie libellé en unités de compte
Toute personne (même un enfant à charge) peut souscrire un contrat d’assurance-vie.
Contrairement au PEA, cette formule n’autorise pas l’achat d’actions en direct, mais l’investisseur peut placer son épargne en unités de compte représentatives de parts d’OPCVM investis en actions. Il n’existe par ailleurs aucune limite au nombre de contrats pouvant être ouverts ni au montant des versements pouvant être faits.
Aucune imposition n’est applicable en cours de vie du contrat sur les unités de compte (ni en cas de distribution par l’OPCVM ni en cas d’arbitrage entre unités de compte) sauf demande de rachat partiel. L’imposition est en effet reportée à la date du retrait. Par rapport à une détention directe, l’investisseur peut donc faire fructifier l’économie de trésorerie résultant du différé de taxation.
Nota : Une ouverture précoce est souvent conseillée dès lors qu’à partir du 8ème anniversaire du contrat, les plus-values latentes pourront échapper dans une certaine limite à l’IR (application d’un abattement annuel), lors du retrait. Les prélèvements sociaux restent calculés sans abattement annuel.
La plus-value imposable lors du rachat est égale à la différence entre la somme obtenue au titre du rachat, d’une part, et le montant des versements effectués (englobant les frais de souscription) retenus au prorata des sommes remboursées par rapport à la valeur totale du contrat, d’autre part.
Au-delà du 8ème anniversaire, les plus-values sont effacées à hauteur d’un abattement de 9 200 € annuel pour un couple (4 600 € pour un célibataire), le solde pouvant être soumis au PFU au taux de 7,5%, sous certaines conditions, ou de 12,8%. L’abattement annuel vaut pour l’ensemble des rachats de l’année, tous contrats d’assurance-vie confondus. Pour les versements effectués depuis le 27 septembre 2017, l’application du taux de 7,5% se limite aux gains relatifs aux versements n’excédant pas 150.000 euros tous contrats confondus (sur la fraction au-delà , le taux de 12,8% s’applique).
Nota 1 : Le titulaire d’un contrat ayant atteint les 8 ans peut décider de purger son contrat d’une partie des plus-values latentes en procédant à un retrait partiel en exonération d’IR jusqu’à concurrence de l’abattement (mais en acquittant les prélèvements sociaux) puis procéder à de nouveaux versements s’il n’a pas l’utilité immédiate des sommes.
Nota 2 : Le contrat d’assurance-vie offre l’avantage, en cas de décès, de garantir au bénéficiaire du capital-décès le transfert des fonds sous déduction en principe d’un prélèvement de 20% qui ne s’applique que sur la fraction excédant 152.500 € des sommes qui lui reviennent et de 31,25% sur la fraction excédant 700 000 €5.
Attention : Au décès du souscripteur, les plus-values engrangées sont assujetties aux prélèvements sociaux (comme dans le cas du PEA).
Notes
1 Les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence de l’avant-dernière année a été de moins de 50 000 euros (ou 75 000 euros pour un couple) peuvent demander à en être dispensés de l’acompte d’impôt sur le revenu (IR).
2 Sauf exclusion, notamment pour les dividendes reçus des SIIC et des Sppicav.
3 Un abattement de 50% s’applique en cas de détention comprise entre 2 et 8 ans. Un régime encore plus favorable, dit d’abattement renforcé, s’applique dans certaines hypothèses.
4 Des exclusions s’appliquent : notamment pour les titres de SIIC.
5 Toutefois, en lieu et place du prélèvement, les capitaux-décès alimentés par des primes versées après l’âge de 70 ans sont soumises aux droits de succession (sur la base des primes versées abattues de 30 500 €). Et un régime particulier vise les contrats dits vie-génération.
Auteur
Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale