Les collectivités locales s’ouvrent au placement privé obligataire
Face au credit crunch, de plus en plus de collectivités locales cherchent à diversifier leurs sources de financement et procèdent à des émissions obligataires sur le marché.
Dans un premier temps, ces collectivités locales ont suivi un processus d’émission assez classique, impliquant l’obtention d’une notation investment grade auprès de l’une des principales agences de notation et la rédaction d’un prospectus visé par l’Autorité des marchés financiers pour permettre l’admission des obligations sur un marché réglementé, sésames pour répondre aux critères d’investissement de la plupart des souscripteurs. Plusieurs collectivités locales anticipant un appel régulier au marché ont même mis en place un programme EMTN (Euro Medium Term Notes), une documentation-cadre qui leur permet de réaliser des émissions obligataires dans des délais très brefs.
En matière de dette corporate, alors que le marché obligataire était traditionnellement réservé aux émetteurs disposant d’une notation financière et émettant des montants significatifs, plusieurs entreprises de taille intermédiaire (ETI) non notées ont pu récemment s’y financer, en procédant à un Euro Private Placement (Euro PP), dans le sillage notamment de l’émission obligataire de 145 millions d’euros réalisée par Bonduelle en septembre 2012, opération qui a d’ailleurs été élue « opération financière de l’année » par le Club des 30.
La tendance constatée pour les ETI s’étend désormais aux collectivités locales. Outre l’augmentation du nombre d’émissions cotées classiques, effectuées sous format stand alone ou dans le cadre de programmes EMTN, éventuellement avec une offre au public (comme a pu le faire par exemple la Région des Pays de la Loire en octobre 2012), on assiste à un développement des placements privés de collectivités locales.
Dans le cadre d’un placement privé non coté, les obligations émises par une collectivité locale font l’objet d’une documentation relativement légère. Les contrats relatifs à l’émission n’entrent pas, pour la plupart, dans le champ d’application du code des marchés publics, en vertu de l’article 3, 5° dudit code qui exclut les services financiers relatifs aux instruments financiers et aux opérations d’approvisionnement en argent. Puisqu’il n’y a pas de cotation, aucun prospectus n’est requis. La documentation consiste principalement en un contrat de placement conclu avec la banque arrangeuse, ou directement avec les souscripteurs, qui contient un certain nombre de déclarations et d’engagements de l’émetteur et auquel sont annexées les modalités des obligations. Un contrat de service financier peut par ailleurs être conclu avec une banque tenant le rôle d’agent financier et d’agent payeur pour assurer le service financier des obligations pendant la vie de l’emprunt (paiement des intérêts, voire tenue du registre des porteurs d’obligations, si celles-ci sont émises au nominatif sans admission aux opérations d’Euroclear France).
Cet essor de la désintermédiation est une bonne nouvelle pour les collectivités locales, qui accèdent, sur la base d’une documentation relativement légère, à de nouvelles sources de financement.
A propos des auteurs
Marc-Etienne Sébire, avocat responsable du servicie marchés de capitaux. Il conseille les établissements financiers et les émetteurs sur tous types d’opérations de marché, telles que les émissions de titres de dette, les introductions en bourse, les émissions de titres de capital ou donnant accès au capital et les produits dérivés structurés.
François Tenailleau, avocat associé. Il intervient en droit public des affaires et notamment en matière de marchés publics et délégations de service public, de partenariats public-privé, de domanialité publique, d’aménagement, d’aides publiques et d’institutions publiques.
Analyse juridique parue dans la revue Option Finance du 27 mai
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