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Les conventions réglementées et la filiale à 100%

Les conventions réglementées et la filiale à 100%

La question de savoir s’il convient dans une société anonyme de suivre la procédure des conventions réglementées alors que la convention est passée avec une filiale à 100% est classique.

On fait valoir depuis longtemps qu’il ne pourrait pas y avoir de conflit d’intérêt dans ce cas de figure, ce qui est discutable. Plus justement, on peut dire que la procédure d’approbation est inadaptée à la situation et que sa mise en œuvre est un exercice aussi contraignant qu’inutile. L’ordonnance du 31 juillet 2014 a dispensé de suivre la procédure :

«pour les conventions conclues entre deux sociétés dont l’une détient, directement ou indirectement, la totalité du capital de l’autre, le cas échéant déduction faite du nombre minimum d’actions requis pour satisfaire aux exigences de l’article 1832 du Code civil ou des articles L 225-1 et L 226-1 du présent code».

Ce texte qui semble régler la difficulté antérieurement vécue de manière simple fait naître des difficultés d’interprétation.

La déduction faite d’un nombre minimum de titres est à l’origine de possibles discussions. La filiale à 100% est-elle nécessairement une société par actions ? Le texte parle du «nombre minimum d’actions requis» ce qui incline à donner une réponse positive. Sans doute, mais outre le renvoi aux articles L 225-1 et L 226-1 qui concernent des sociétés par actions, il est fait référence à l’article 1832 du Code civil qui a une portée générale et forge un droit commun des sociétés. Dès lors il est probable qu’il faut lire «droits sociaux» derrière le mot action. La filiale peut donc être une société de personnes.

Peut-on procéder à la déduction lorsque la filiale est étrangère ? Lorsque la procédure des conventions réglementées doit être suivie dans la mère française en raison des dirigeants communs, peut-on appliquer la dispense introduite par l’ordonnance ? La déduction faite concerne ici des actions détenues en application de réglementations qui n’ont pas été établies par le droit français. Il semble que le texte doive être interprété restrictivement.

Le texte parle d’une société qui détient «directement ou indirectement». L’emploi du mot indirect fait naître un autre questionnement. Doit-on requérir une chaîne de contrôle qui, à tous les niveaux, assure un contrôle à 100% ou la détention de la totalité du capital ne concerne-t-elle que le dernier maillon de la chaîne ? Les deux options ne sont pas chacune sans argument.

Pour les uns, le texte déroge à un principe qui est celui du suivi nécessaire de la procédure des conventions réglementées : la dérogation doit donc s’interpréter strictement et l’on doit requérir la détention de la totalité sur tous les maillons de la chaîne. Pour d’autres, les éventuels minoritaires dans les sociétés intercalaires ne sont guère affectés par la situation. La Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes a retenu la position stricte qui requiert la détention totale sur tous les maillons de la chaîne.

Voici donc trois questions au moins qui peuvent appeler des réponses contradictoires selon le sentiment de l’interprète. Il est probable que le juge n’aura pas à en connaître rapidement et le texte de simplification ajoutera son lot d’incertitudes à la pratique quotidienne du droit des affaires.

 

Auteur

Christophe Blondeau, avocat associé spécialiste des opérations transactionnelles de fusions – acquisitions, de joint-venture et de private equity.

 

Analyse juridique parue dans le magazine Option Finance le 8 décembre 2014