Les rectifications du résultat fiscal impactent-elles la valeur ajoutée ?
Dans une décision du 6 juin 2018 (n°409645, SCS General Electric Medical System), le Conseil d’Etat vient confirmer qu’il y a lieu de tirer les conséquences des rectifications notifiées en matière d’impôt sur les sociétés dans le cadre du calcul de la valeur ajoutée servant à l’encadrement de la taxe professionnelle, et désormais à la base d’imposition à la CVAE.
Dans sa rédaction alors applicable, l’article 1647 B sexies du CGI fixait pour le calcul de la valeur ajoutée une liste limitative d’éléments comptables et renvoyait expressément aux normes comptables pour leur application.
Il était ainsi légitime de considérer que seules les écritures comptables impactant réellement le résultat comptable pouvaient servir de référence pour déterminer la valeur ajoutée, et cela indépendamment du traitement fiscal adopté en matière d’impôt sur les revenus ou sur les sociétés.
Cependant, la Haute Assemblée vient aujourd’hui considérer que même si l’article 1647 B sexies du CGI renvoyait expressément aux éléments de la comptabilité de l’entreprise, il ne fait pas obstacle à ce que l’administration puisse remettre en cause le bien-fondé d’une écriture comptable, ou son absence, et par voie de conséquence, réintégrer dans le calcul de la valeur ajoutée de l’entreprise des sommes qui s’analysent soit comme des produits qui à tort n’ont pas été comptabilisés, soit comme des charges qui ne relèvent pas des charges externes engagés dans l’intérêt de l’entreprise ou à caractère exceptionnel.
Cette décision vient confirmer la position déjà adoptée par plusieurs cours administratives d’appel qui avaient considéré que le résultat fiscal participe aussi à la détermination de la valeur ajoutée imposable (V. CAA Versailles, 12 mai 2015, n°12VE02023, Sté CGI France).
Cette solution nous semble transposable par analogie au calcul de la valeur ajoutée servant de base à la CVAE, l’article 1586 sexies du CGI renvoyant également à des postes comptables devant être mouvementés conformément au Plan Comptable Général ou aux Plans Comptables Professionnels auxquels certains doivent faire référence.
Espérons désormais qu’une analyse symétrique soit adoptée par le Conseil d’Etat dans l’hypothèse où une charge avérée, mais non comptabilisée, sera admise comme devant minorer la valeur ajoutée imposable. Ainsi, le redressement (en IS et en CVAE) d’une holding à raison de managements fees qu’elle aurait dû facturer à ses filles devrait justifier la constatation d’une charge minorant la valeur ajoutée de ces dernières, quand bien même elles ne les ont pas comptabilisés.
Auteur
Laurent Chatel, avocat associé, fiscalité locale
Les rectifications du résultat fiscal impactent-elles la valeur ajoutée ? – L’actualité fiscale en bref parue dans le magazine Option Finance le 16 juillet 2018.