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Licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle : sur l’exigence de consultation des délégués du personnel

Licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle : sur l’exigence de consultation des délégués du personnel

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, l’employeur a l’obligation de consulter les délégués du personnel sur son reclassement avant d’engager la procédure de licenciement.

Dans un arrêt du 11 mai 2016 (n°14-12.169), la Cour de cassation rappelle que les entreprises dépourvues de délégués du personnel doivent rapporter la preuve de leur impossibilité de procéder à cette consultation.

Une consultation imposée par l’article L.1226-10 du Code du travail

Dans l’hypothèse où un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, l’article L.1226-10 du Code du travail impose à l’employeur de lui proposer « un autre emploi approprié à ses capacités ».

Cet article précise toutefois que les propositions de reclassement ne doivent intervenir qu’après la consultation des délégués du personnel.

Ce n’est qu’à l’issue de cette consultation que les propositions de reclassement peuvent être adressées au salarié et qu’il peut faire l’objet d’un licenciement dans l’hypothèse où il les  refuse.

Dans l’affaire soumise à l’examen de la Cour de cassation, un salarié victime d’un accident du travail a fait l’objet d’un licenciement en 2006 pour impossibilité de reclassement en raison de son inaptitude d’origine professionnelle.
Ce dernier a ensuite contesté la régularité de son licenciement en reprochant notamment à son ancien employeur de ne pas avoir recueilli l’avis des délégués du personnel après la constatation de son inaptitude.

Sur les contours de l’obligation dans les entreprises dépourvues de délégués du personnel

L’absence de délégués du personnel au sein de l’entreprise n’exonère l’employeur de son obligation que dans la seule hypothèse où un procès-verbal de carence a été établi à la suite d’un appel à candidature resté infructueux.

C’est dans ce cadre que l’employeur, mis en cause devant les juridictions du fond, a produit un procès-verbal de carence daté du 31 octobre 2002.

Il se prévalait ensuite des dispositions de la loi du 2 août 2005 ayant porté la durée des mandats des délégués du personnel de 2 à 4 ans pour justifier de la validité de son procès-verbal au regard de la procédure de licenciement intervenue en 2006.

Censurant l’arrêt d’appel soumis à son examen (CA Pau, 25 avril 2013, n°13/01765), la Haute Cour considère toutefois que l’employeur était tenu d’organiser des élections le 31 octobre 2004 et que le procès-verbal aurait dû être établi à cette date pour pouvoir être utilement invoqué.

En effet, la chambre sociale de la Cour de cassation indique que les dispositions relatives à l’allongement de la durée des mandats ne s’appliquent qu’à compter des élections professionnelles organisées postérieurement à la publication de la loi.
Dès lors, elle constate que l’employeur ne rapporte pas la preuve de l’établissement d’un procès-verbal de carence et qu’il ne peut donc pas se soustraire à ses obligations en matière de consultation des délégués du personnel.

Les Hauts magistrats rappellent en effet, par la même occasion, que la mise en place des délégués du personnel est obligatoire dans toute entreprise employant plus de 11 salariés.

Sur les sanctions applicables en cas de non-respect de ces dispositions

L’article L.1226-15 du Code du travail prévoit qu’une consultation irrégulière des délégués du personnel ou qu’une absence de consultation autorise le salarié à solliciter une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire.

Une telle sanction est également applicable aux entreprises employant plus de 11 salariés mais dépourvues de délégués du personnel dès lors qu’aucun procès-verbal de carence aux dernières élections professionnelles n’a été établi.

Il s’avère que les incidences pécuniaires découlant de l’irrespect de ces dispositions ne peuvent qu’inciter les employeurs à la prudence dans l’organisation des élections et ce, quand bien même aucun salarié ne manifesterait son souhait de se porter candidat.

Une exigence bientôt étendue aux procédures de licenciement pour inaptitude d’origine non professionnelle ?

L’article 44 du projet de loi El Khomri propose d’unifier le régime de l’inaptitude en prévoyant également une consultation des délégués du personnel en cas d’inaptitude d’origine non-professionnelle du salarié.

Il est donc possible que la consultation des délégués du personnel devienne prochainement obligatoire quelle que soit l’origine de l’inaptitude du salarié.

 

Auteurs

Thierry Romand, avocat associé en droit social.

Virginie Séquier, avocat en droi social

 

Licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle : sur l’exigence de consultation des délégués du personnel – Article paru dans Les Echos Business le 30 Mai 2016