L’intérêt à agir en annulation d’un permis de construire d’une association de défense du cadre de vie d’un quartier
L’association de défense de l’environnement et du cadre de vie du quartier « Epi d’Or » de Saint-Cyr-l’École, qui regroupe des habitants de ce quartier, a sollicité auprès du tribunal administratif de Versailles l’annulation d’un permis de construire délivré par le maire à une société civile immobilière pour la construction de trois maisons d’habitation. Le juge administratif ayant rejeté cette requête , l‘association s’est pourvue en cassation.
Il convient de rappeler que l’intérêt pour agir d’une association contre un acte administratif est apprécié par rapport au champ d’action de celle-ci, à la fois matériel, au regard des intérêts qu’elle défend, et géographique. Une association requérante doit ainsi être en mesure de démontrer le lien entre son objet statutaire et les effets de l’acte qu’elle conteste. Elle ne doit donc pas avoir d’objet social trop vaste (par exemple CE, 29 janvier 2003, n°199692) et son périmètre d’action géographique doit être défini de façon suffisamment précise.
Il a été récemment établi dans un arrêt du 29 mars 2017 (n°395419) que l’intérêt à agir d’une association dont les statuts lui donnaient pour mission « toutes études et réalisations de nature à préserver ou améliorer la qualité de vie à Garches » ne lui conféraient pas un intérêt pour agir contre les décisions d’urbanisme, au motif qu’un tel objet présentait un caractère très général.
Dans l’affaire commentée, le juge de première instance a également estimé que l’objet statutaire de l’association était « trop général et éloigné des considérations d’urbanisme pour lui conférer un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis ».
Or, le Conseil d’Etat a semblé vouloir revenir à une interprétation plus souple de l’intérêt à agir d’une association.
Il juge en effet qu’il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis « que le projet autorisé, par sa nature, le nombre de constructions autorisées, le choix d’implantation retenu et la densification qu’il induisait, était susceptible de porter atteinte au cadre de vie des habitants du quartier de l’Epi d’or, dont l’association requérante avait pour objet d’assurer la sauvegarde ». Il en déduit que le tribunal administratif a inexactement qualifié les faits de l’espèce et que l’association requérante était fondée à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée.
Ainsi, le Conseil d’Etat a considéré qu’à la fois le critère matériel et le critère géographique donnant intérêt à agir à une association étaient remplis.
Concernant le critère géographique, l’association avait pour périmètre le quartier concerné par le projet litigieux.
Concernant le critère matériel, le juge administratif, contrairement à ce qu’il a pu considérer dans son arrêt du 29 mars 2017, estime que l’objet statutaire d’une association prévoyant la défense du cadre de vie donne un intérêt à agir suffisant contre un permis de construire autorisant un projet pourtant de faible ampleur, trois maisons d’habitation. Cette appréciation du champ d’action de l’association est particulièrement souple, dans la mesure où la défense de l’organisation urbanistique du quartier n’était pas spécifiquement énoncée par les statuts de l’association. Il faut donc considérer que « la défense du cadre de vie » d’un quartier englobe tous les volets de la vie en communauté, y compris les aspects urbanistiques, comme la réalisation de maisons d’habitation, dont les désagréments auraient causé un préjudice aux riverains de ce quartier.
Auteur
Iris Pariset, avocat, en droit de la construction et droit de l’urbanisme