Loi PACTE et réforme de l’épargne retraite : les nouveaux plans d’épargne d’entreprise
10 octobre 2019
L’article 71 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 (dite « loi PACTE ») crée, dans le Code monétaire et financier, un nouveau chapitre intitulé « Plans d’épargne retraite » (« PER »), visant à rendre plus attractifs les dispositifs d’épargne retraite. Il renvoie à une ordonnance, un décret et un arrêté, le soin de préciser le régime juridique, fiscal et social de ces nouveaux dispositifs. Explications.
L’ordonnance n°2019-766 du 24 juillet 2019, prise en application de l’article 71 de la loi PACTE, a été publiée au Journal officiel le 25 juillet 2019. Elle crée deux plans d’épargne retraite d’entreprise (« PERE ») :
-
- le PERE collectif à adhésion facultative et bénéficiant à tous les salariés (1) ;
-
- le PERE obligatoire pouvant être réservé à une catégorie objective d’entre eux (2).
Loi PACTE : quelles sont les principales caractéristiques des plans d’épargne retraite d’entreprise ?
L’alimentation de l’épargne retraite par l’épargne salariale
Les nouveaux PERE pourront être alimentés, non seulement par des versements volontaires des salariés et des versements obligatoires des employeurs et des salariés, mais également par des sommes issues de l’épargne salariale (intéressement, participation, abondement de l’employeur, droits inscrits sur un compte épargne temps (CET) ou, en l’absence de CET, jours de congés non pris (3)). Pour les PERE obligatoires, le versement de sommes issues de l’abondement de l’employeur à un dispositif d’épargne salariale sera toutefois exclu et le versement de sommes issues de l’intéressement et de la participation sera conditionné au fait que l’entreprise ait mis en place un plan d’épargne retraite bénéficiant à tous les salariés.
L’harmonisation des cas de déblocages anticipés des plans
Il sera désormais possible de débloquer les sommes avant le départ à la retraite, pour les affecter à l’achat de la résidence principale (sauf pour les droits correspondant aux sommes issues de versements obligatoires), et en cas d’invalidité 2e et 3e catégorie des enfants du titulaire du plan, de son conjoint ou de son partenaire pacsé.
La possibilité de prévoir des garanties complémentaires en cas de décès, d’invalidité, de perte d’autonomie du titulaire, ainsi qu’une garantie « plancher ».
L’assouplissement des conditions de sortie des produits au jour de la retraite
Les épargnants pourront liquider leur produit d’épargne retraite :
-
- uniquement en rente viagère pour les sommes issues de versements obligatoires des épargnants ou de leur employeur ;
-
- en capital (libéré en une fois ou de manière fractionnée) ou en rente viagère pour les sommes issues des autres versements (versements volontaires et versements issus de l’épargne salariale).
La portabilité de l’épargne retraite supplémentaire
Tous les dispositifs d’épargne retraite seront désormais transférables entre eux (sous réserve que le titulaire ne soit plus tenu d’y adhérer). Avant le départ du titulaire de l’entreprise, le transfert des droits individuels relatifs aux PERE collectifs vers un autre plan d’épargne retraite sera toutefois limité à un transfert tous les trois ans.
Dans tous les cas, les frais de transfert seront plafonnés à 1 % des droits acquis. Ils seront nuls en cas de transfert à l’issue d’une période de cinq ans après le premier versement au plan ou après l’âge de la retraite.
La possibilité de regroupement et de mise en place au niveau interentreprise
Les entreprises pourront regrouper leurs PERE collectif et PERE obligatoire en un seul produit selon les modalités de négociation prévues pour les accords de participation. Il sera également possible de mettre en place un plan interentreprises.
La gestion pilotée par défaut et la généralisation du taux réduit de forfait social
La gestion pilotée des encours est désormais généralisée, comme option par défaut (4). Il sera fait application d’un taux de forfait social réduit (16 % au lieu de 20 %) aux sommes versées par l’employeur qui seront affectées à tout PERE prévoyant que l’encours en gestion pilotée est investi par défaut à hauteur de 10 % en titres éligibles au PEA-PME.
Traitement social et fiscal selon l’origine des sommes épargnées
Les versements volontaires (sauf option contraire) et les versements obligatoires (art. 83) sont déductibles de l’assiette de l’impôt sur le revenu dans la limite de certains plafonds. L’exonération d’impôt sur le revenu des versements issus de l’épargne salariale est également plafonnée.
Le régime fiscal et social applicable aux prestations servies est complexe puisqu’il varie en fonction de l’origine des versements, de leur éventuelle exonération fiscale, de leur déduction du revenu imposable et du choix opéré par le titulaire pour une sortie en rente ou en capital.
C’est ainsi que le capital versé correspondant aux versements peut être soumis à l’impôt au barème progressif ou exonéré d’impôt sur le revenu. Quant à la part du capital correspondant aux produits, elle est selon les cas soumise à la flat tax au taux de 30 % ou exclusivement assujettie aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.
Les rentes versées relèvent du régime des pensions de retraite ou du régime des rentes viagères à titre onéreux, et sont susceptibles d’être soumises aux prélèvements sociaux sur une assiette différente de celle de l’impôt sur le revenu.
Traitement fiscal en cas de décès
Les sommes versées à raison du décès de l’épargnant par les gestionnaires d’actifs intègrent l’actif successoral. Celles versées par les assureurs sont soumises, selon que l’épargnant décède avant ou après 70 ans, à un prélèvement spécifique (20 % pour la fraction comprise entre 152 500 euros et 31,25 % au-delà) ou aux droits de succession.
Entrée en vigueur et sort des contrats en cours
-
- Les nouveaux PERE peuvent être commercialisés depuis le 1er octobre 2019.
-
- Les contrats préexistants (PERCO, contrats « article 83 ») ne pourront plus être mis en place à compter du 1er octobre 2020 mais pourront toujours accueillir de nouveaux adhérents. En outre, les droits individuels en cours de constitution seront transférables vers des plans d’épargne retraite issus de l’ordonnance. Il sera également possible de transférer collectivement les droits en cours d’acquisition sur un PERCO vers un PERE collectif, et de transformer un PERCO en PERE collectif sans transfert.
(1) Une condition d’ancienneté peut être prévue sans pouvoir toutefois excéder 3 mois
(2) Cf. art. L. 242-1, II 4° et R. 242-1-1 du Code de la sécurité sociale
(3) dans la limite de 10 jours/an, en conservant au minimum 24 jours de congé annuel
(4) La gestion pilotée est une stratégie d’investissement qui tient compte de l’horizon de placement de l’épargnant. Lorsque le départ en retraite est lointain, l’épargne est fortement investie en actions, puis progressivement investie dans des actifs sûrs et liquides (obligations, fonds monétaires, fonds en Euros des entreprises d’assurance).
Article publié dans Les Echos EXECUTIVES le 10/10/2019
A lire également
Protection sociale collective : un arrêt d’appel à suivre... 28 avril 2021 | Pascaline Neymond
Complémentaires santé «responsables» : ce qui va changer entre 2015 et 2018... 20 janvier 2015 | CMS FL
Complémentaire santé : vigilance sur la rédaction des dispenses d’adhésion... 31 juillet 2024 | Pascaline Neymond
Le PEA est-il vraiment séduisant pour les titres non cotés?... 24 mai 2019 | CMS FL
Une nouvelle circulaire sur les complémentaires santé «responsables»... 18 mars 2015 | CMS FL
La RSE ou l’ébauche d’un cadre juridique contraignant pour les entreprises... 24 décembre 2021 | Pascaline Neymond
Réforme de l’épargne retraite : la future gloire de nos plans d’éparg... 31 octobre 2019 | CMS FL Social
Retraite et prévoyance : les apports de la circulaire ACOSS du 4 février 2014... 22 avril 2014 | CMS FL
Articles récents
- Rapport de durabilité : la nouvelle obligation de consultation du CSE entre en vigueur le 1er janvier 2025
- Statut de lanceur d’alerte : le Défenseur des droits et la jurisprudence précisent ses contours
- Enquêtes internes : des règles en constante évolution
- Pas de co-emploi sans immixtion dans la gestion économique et sociale de la société : illustration en présence d’une société d’exploitation
- Fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2025
- Un salarié licencié pour harcèlement sexuel ne peut se prévaloir du phénomène «#Metoo»
- Régimes de retraite des dirigeants : prestations définies versus actions gratuites
- SMIC : Relèvement du salaire minimum de croissance au 1er novembre 2024
- Inaptitude et reclassement : c’est au salarié qu’il appartient de rapporter la preuve d’une déloyauté de l’employeur
- Conférence – Gestion des fins de carrière : que font les entreprises et quelles solutions à dispositions ?