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Lois de finances de fin d’année : que doivent retenir les entreprises ?

Lois de finances de fin d’année : que doivent retenir les entreprises ?

Les lois de finances de fin d’année comportent de nombreuses mesures, mais quelques-unes seulement méritent une attention particulière.

A première vue, les lois de fin d’année sont aussi denses que celles des années précédentes : 160 articles pour la loi n°2016-1917 de finances pour 2017 (LF), 149 pour la loi n°2016-1918 de finances rectificative pour 2016 (LFR).

Mais les mesures fiscales susceptibles d’avoir un impact significatif sur la vie des entreprises sont relativement peu nombreuses. En voici les principales.

1. Baisse des prélèvements : taux de l’IS et taux du CICE

La loi (LF) prévoit tout d’abord deux mesures qui vont dans le sens d’une baisse de charges pour les entreprises :

  • une baisse progressive du taux normal de l’IS de 33,1/3% à 28%, avec des effets à anticiper notamment pour les groupes intégrés et pour les impôts différés (pour plus de détails, voir Option finance du 9 janvier 2017, p. 36),
  • pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2017, le taux du crédit d’impôt compétitivité-emploi passe de 6% à 7% (il reste fixé à 9% dans les départements d’outre-mer).

2. Une bonne nouvelle concernant la contribution de 3% sur les distributions

En attendant une décision sur la conformité de la contribution au droit de l’Union européenne, la loi (LFR) prévoit que les distributions au sein de certains groupes de sociétés sont exonérées de contribution soit parce que les sociétés « remplissent les conditions » pour être membres d’un groupe (que ce soit le cas ou non), soit parce qu’elles les rempliraient si elles étaient établies en France.

3. Des mesures impactant négativement la trésorerie

La loi (LF) prévoit trois nouveautés pour anticiper les recettes fiscales.

Les entreprises (ou les groupes intégrés) dont le chiffre d’affaires a atteint au moins 250 millions d’euros au titre du dernier exercice clos doivent verser un dernier acompte d’IS majoré en fonction de l’IS estimé dû au titre du « nouvel » exercice. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017, et donc pour l’acompte du 15 décembre 2017 (s’agissant en particulier des entreprises dont l’exercice est calé sur l’année civile), le dernier acompte sera calculé de sorte que l’entreprise aura versé à cette date, en fonction de son chiffre d’affaires, au moins :

  • 80% de l’IS estimé (pour les entreprises qui relevaient jusque-là de la base de 75%),
  • 90% de l’IS estimé (pour celles qui relevaient de la base de 85%),
  • 98% de l’IS estimé (pour celles qui ont réalisé un chiffre d’affaires dépassant les 5 milliards d’euros).

Les établissements financiers doivent verser pour le 15 octobre un acompte d’impôt sur le revenu pour les intérêts imposables des plans d’épargne logement versés au titre du mois de décembre, la régularisation s’opérant en principe sur la déclaration au titre du mois de décembre. A l’avenir, de nouvelles catégories de revenus mobiliers seront soumises à cet acompte (égal à 90% du montant des prélèvements à l’impôt sur le revenu ou des retenues à la source dus au titre du mois de décembre de l’année précédente).

Quant aux entreprises redevables de la majoration de TASCOM (qui s’applique, rappelons-le, lorsque la surface de vente est supérieure à 2 500 m2) elles seront soumises à un nouvel acompte égal à 50% de cette majoration, qu’elles devront verser pour le 15 juin 2017. A cette date, elles verseront donc 150% de la majoration 2017, dont 50% (l’acompte) s’imputera sur la majoration 2018 (l’éventuel trop-perçu étant restituable).

4. Modifications concernant les titres bénéficiant du régime des sociétés mères (participations représentant au moins 5% du capital)

Pour tenir compte deux décisions du Conseil constitutionnel (en dernier lieu la décision n°2016-553 QPC du 8 juillet 2016 Natixis), la loi est modifiée pour prévoir que le régime d’exonération d’IS des sociétés mères peut s’appliquer aux titres sans droits de vote.

En sens inverse, les titres bénéficiant du régime des sociétés mères ne continueront à être présumés constituer des titres de participation dont les plus-values relèvent du régime des plus-values à long terme (que les titres revêtent ou non cette qualification au sens comptable) qu’à condition que la société détienne au moins 5% des droits de vote. Cette limitation s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017.

5. Plafond d’amortissement des voitures de tourisme

La loi fiscale prévoit que les sociétés ne peuvent amortir qu’une fraction du prix d’acquisition des voitures de tourisme : 18 300 € (ou 9 900 € pour les véhicules émettant plus de 200 g de CO2 au km). La LF revoit progressivement les plafonds, fixés à 30 000 € pour les véhicules électriques, 20 300 € pour les véhicules hybrides rechargeables, 18 300 € pour les véhicules thermiques (émettant entre 60 et 155 grammes de CO2 par kilomètre), et 9 900 € pour les véhicules polluants dont le taux d’émission de dioxyde de carbone est supérieur à 155 grammes par kilomètre (seuil qui sera progressivement abaissé).

6. Période d’application du suramortissement

La LFR étend le « suramortissement » créé par la « loi Macron » (possibilité donnée aux entreprises de pratiquer une déduction exceptionnelle supplémentaire de 40% lorsqu’elles investissent dans certains biens d’équipement) aux biens éligibles qui auront fait l’objet, avant le 15 avril 2017, d’une commande assortie du versement d’acomptes d’un montant égal à 10% du montant total de la commande et dont l’acquisition intervient dans un délai de 24 mois à compter de la date de la commande. En principe, le régime s’appliquait seulement aux biens acquis ou fabriqués entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2017 inclus.

7. Attributions d’actions gratuites

La LF aggrave la fiscalité de ces attributions. Pour les sociétés, la hausse portera sur la contribution patronale, dont le taux (appliqué au gain d’acquisition) passera de 20% à 30%, sauf si l’attribution a été autorisée par une décision de l’assemblée générale extraordinaire postérieure à la loi Macron mais antérieure au 30 décembre 2016 (pour plus de détails, voir Option Finance du 9 janvier 2017, p. 38).

8. Régime des impatriés

La LF crée une exonération partielle de taxe sur les salaires sur les rémunérations versées aux impatriés qui ont pris leurs fonctions en France à compter du 6 juillet 2016, sous les mêmes conditions de domiciliation fiscale et de durée que celles prévues pour l’exonération d’impôt sur le revenu (les impatriés en bénéficieront pendant une durée d’application que la même loi proroge de 5 à 8 ans). L’exonération sera prise en compte pour le calcul de la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2017.

9. Déclaration IFU

Pour les revenus perçus à compter de l’année 2017, à déclarer l’année suivante donc en 2018, la LFR supprime la possibilité d’effectuer sous forme papier les déclarations IFU, qui incombent aux sociétés versant des revenus de capitaux mobiliers.

On rappelle que pour la déclaration d’IFU de février 2017, l’obligation de télédéclarer (par les procédures habituelles, à savoir en principe EDI ou bien EFI) ne s’applique qu’aux seules sociétés qui ont souscrit au moins 100 déclarations au titre de l’année précédente, ou qui ont souscrit des déclarations IFU pour un montant global supérieur à 15 000 euros.
La LF supprime, à la même échéance, l’obligation de produire l’état dit « directive épargne » lorsque des revenus sont versés à des personnes établies dans un autre Etat membre de l’Union européenne. Cette suppression d’explique par l’abrogation de la directive épargne et son remplacement par la mise en place de l’échange automatique de renseignements.

10. Nouvelle procédure d’examen de comptabilité (LFR, art. 14)

La LFR prévoit que l’administration peut désormais procéder à une vérification de comptabilité sans visite sur place du vérificateur. L’administration entend y recourir sauf « à l’égard des entreprises qui présenteraient des risques élevés ou dont la taille ou la complexité des sujets nécessiteraient un contrôle sur place ».

Dans un délai de quinze jours suivant la réception de l’avis d’examen de comptabilité, le contribuable doit adresser à l’administration le fichier des écritures comptables (FEC) du (ou des) exercice(s) concerné(s) sous peine de voir l’administration substituer à cette procédure une vérification de comptabilité et appliquer une amende de 5 000 euros.

Deux aspects de la mise en œuvre de cette procédure mériteront une attention particulière.

Le premier concerne les investigations de l’administration qui pourra non seulement procéder aux tris, classements et calculs à partir des données du FEC comme c’est le cas en cas de vérification de comptabilité, mais aussi effectuer des traitements informatiques sur les fichiers autres que le FEC transmis par le contribuable. Or, ni les conditions de remise de ces fichiers ni les modalités de réalisation des traitements dont ils pourraient faire l’objet ne sont encadrés par la loi (le vérificateur est uniquement tenu d’informer le contribuable quant à la nature et au résultat des traitements au plus tard avant l’envoi de la proposition de rectification) alors que les opérations de cette nature sont encadrées par la loi lorsqu’elles sont effectuées dans le cadre d’une vérification de comptabilité.

Le deuxième point d’attention porte sur le fait qu’aucune visite du vérificateur dans les locaux de l’entreprise n’est prévue, même si le contribuable en fait la demande. Un appauvrissement nuisible des échanges est à craindre même si l’on peut espérer que l’administration recommandera à ses agents de veiller à les préserver.

11. Contrôle des comptabilités informatisées

La LFR prévoit que les entreprises qui font usage de la faculté d’effectuer elles-mêmes les traitements informatiques envisagés par l’administration devront désormais lui fournir l’ensemble des données nécessaires à la réalisation de ces traitements pour permettre aux vérificateurs d’y procéder eux-mêmes.

12. Demandes de remboursement de crédits de TVA

La nouvelle procédure complète, en ce qui concerne les demandes de remboursement de crédits de TVA, les moyens qui peuvent être mis en œuvre pour instruire une réclamation contentieuse (demande de communication ou examen sur place des justificatifs, voire vérification ciblée de comptabilité sur la période et l’impôt concerné).

Cette procédure d’instruction est encadrée par l’envoi d’un d’avis d’instruction sur place et s’achève par la notification de la décision de l’administration sur la demande au plus tard 60 jours après la première intervention sur place sans que le délai écoulé depuis la notification de l’avis d’instruction sur place ne puisse excéder quatre mois (la demande de remboursement est réputée admise par l’administration en l’absence de décision dans ces délais).

L’administration conserve la possibilité d’engager ultérieurement une vérification ou d’un examen de comptabilité portant sur la même période que l’instruction de la demande de remboursement de crédits de TVA.

13. Droit d’audition

La LFR prévoit que les agents de l’administration pourront désormais auditionner toute personne, à l’exception du contribuable lui-même, susceptible de détenir des informations utiles dans le cadre de la lutte contre la fraude fiscale internationale. L’audition peut se dérouler dans tous locaux à l’exception de locaux d’habitation, au moins 8 jours après que l’administration ait adressé une demande précisant l’objet de l’audition. La demande précisera la faculté de se faire assister d’un interprète et celle de refuser l’audition, mais il n’est pas prévu qu’elle fasse mention de la faculté de se faire assister d’un conseil.

14. Autoliquidation de la TVA à l’importation

La LFR soumet à de nouvelles conditions la possibilité pour les assujettis d’acquitter la TVA due à l’importation par autoliquidation sur la déclaration périodique de TVA (article 1695 II du CGI). Une note du 3 janvier 2017 précise aux opérateurs la procédure d’autorisation prévue par les nouvelles dispositions.

L’autorisation d’autoliquider est valable pendant trois années civiles au-delà de l’année en cours et elle est renouvelable par tacite reconduction sauf dénonciation par l’entreprise ou remise en cause par le service des douanes.

Les options pour l’autoliquidation exercées sur le fondement des dispositions (article précité) issues de la loi sur l’économie bleue (loi n°2016-816 du 20 juin 2016) demeurent valables jusqu’à l’expiration de la première période triennale de validité.

AuteurS

Elisabeth Ashworth, avocat associé, responsable des questions de TVA et de taxe sur les salaires au sein de l’équipe de doctrine fiscale.

Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale

Lois de finances de fin d’année : que doivent retenir les entreprises ? Article paru dans le magazine Option Finance le 16 janvier 2017