Mandat des agents immobiliers : revirement sur les sanctions de la loi Hoguet
Par un arrêt remarqué du 24 février 2017 (n°15-20 411), la Chambre mixte de la Cour de cassation revient sur une jurisprudence ancienne aux termes de laquelle les dispositions de la loi Hoguet n°70-9 du 2 janvier 1970 relatives à la forme du mandat sont d’ordre public, prescrites à peine de nullité absolue et, dès lors, invocables par toute partie qui y a un intérêt1.
En l’espèce, un agent immobilier était titulaire d’un mandat d’administration et de gestion d’un appartement, comportant le pouvoir de « donner tous congés ». A l’approche du terme du bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989, le bailleur avait informé l’agent immobilier qu’il le mandatait pour vendre l’appartement et pour délivrer un congé au locataire. Ce dernier avait alors assigné le bailleur en nullité du congé en invoquant la violation des prescriptions formelles de la loi Hoguet. Il faisait valoir que l’agent immobilier ne justifiait pas d’un mandat spécial pour délivrer un congé pour vendre, et qu’en toute hypothèse, la lettre le mandatant ne mentionnait pas la durée du mandat et ne comportait pas le numéro d’inscription sur le registre des mandats en violation des articles 6 et 7 de la loi Hoguet et de l’article 72 de son décret d’application.
La cour d’appel d’Aix-en-Provence avait rejeté les demandes du locataire pour défaut d’intérêt à agir. C’est dans ces conditions que le locataire avait formé un pourvoi en se prévalant de la jurisprudence antérieure. L’analyse des objectifs de chaque réglementation, comme y invitent les textes issus de la réforme du droit des obligations2, a conduit la Chambre mixte à considérer que, d’une part, les dispositions de la loi du 6 juillet 1989 contiennent un « juste équilibre » entre la protection des intérêts du locataire et ceux du bailleur et que, d’autre part, les formalités que doit respecter le mandat, prescrites par la loi Hoguet visent à « la seule protection du mandant dans ses rapports avec le mandataire ».
La Cour de cassation en a déduit que rien ne justifie d’accorder au locataire une protection supplémentaire alors qu’il bénéficie déjà d’une protection spécifique offerte par la loi du 6 juillet 1989 et, dès lors, de lui octroyer le pouvoir d’anéantir un contrat auquel il est tiers. La méconnaissance des règles relatives au formalisme du mandat doit désormais être sanctionnée par une nullité relative.
Un tel revirement permet de garantir l’effet relatif des contrats et la sécurité juridique.
Notes
1 Cass., 1re civ., 25 février 2003, n°01-00.461 – Cass., 3e civ., 8 avril 2009, n°07-21.610.
2 Ordonnance du 10 février 2016.
Auteur
Charlotte Félizot, avocat en droit des contrats de l’entreprise et droit immobilier