Mieux vaut déclarer les modifications de locaux
Oublier de signaler des transformations peut se révéler coûteux. Les industriels ont intérêt à rester à jour auprès de l’administration.
Gare à l’amende ! Omettre de déclarer les modifications effectuées dans ses locaux industriels peut se révéler coûteux pour les redevables de la taxe foncière et de la cotisation foncière des entreprises (CFE). Ces obligations déclaratives doivent être mises à jour régulièrement. En effet, les immeubles à usage industriel étant généralement évalués par la méthode comptable (8% du prix de revient inscrit à l’actif du propriétaire et/ou de l’exploitant), cette base est amenée à évoluer chaque année.
En matière de taxe foncière, l’article 1406-I du Code général des impôts (CGI) prévoit que les propriétaires doivent informer l’administration dans les quatre-vingt-dix jours de la réalisation définitive de constructions nouvelles, additions de constructions, reconstructions, ainsi que des changements de consistance ou d’affectation des propriétés bâties et non bâties. Si les industriels ont en général conscience des obligations qui leur incombent au moment des constructions nouvelles, le cas des changements de consistance mérite d’être explicité. Ceux-ci sont des transformations modifiant le volume ou la surface d’un local préexistant. Le changement d’affectation, par exemple le basculement d’un terrain non bâti en terrain bâti, implique quant à lui un changement de méthode d’évaluation (taxe foncière bâtie au lieu de la taxe foncière non bâtie). Dans le cas de ces changements de consistance ou d’affectation, il y a lieu de déposer au cadastre une déclaration dans les quatre-vingt-dix jours de l’achèvement des travaux ou des procédures.
Risque de sanctions
Cette déclaration ne doit pas être négligée. Son inobservation entraîne la perte de l’exonération de deux ans de la part départementale de la taxe foncière (article 1406-II du CGI) et une amende fiscale de 150 euros (article 1729 C du CGI). Ainsi, une construction édifiée en 2015 non déclarée dans les délais ne peut prétendre au bénéfice de l’exonération de la part départementale de la taxe foncière pour 2017, définitivement perdue, mais également pour 2018, sauf si la déclaration a été déposée avant le 31 décembre 2015. L’administration n’hésite plus, en cas de contrôle au cours duquel elle constate une omission ou une minoration déclarative, de recourir à la procédure du rôle particulier (article 1508 du CGI). Cette dernière consiste à multiplier la base redressée par quatre au maximum (nombre d’années éludées depuis la date à partie de laquelle la construction aurait dû être inscrite au rôle) avant l’application du taux d’imposition. À ce rôle s’ajoutera l’imposition de l’année en cours. En revanche, les changements de caractéristiques physiques (modifications intérieures) ne donnent jamais lieu à déclaration et peuvent seulement être constatés d’office lors des contrôles. Depuis 2010, c’est seulement sur demande expresse que l’administration peut exiger que lui soit fournie la liste de l’ensemble des immobilisations passibles de la taxe foncière inscrites à leur actif pour le site industriel, dans un délai de trente jours. Le défaut de réponse entraîne les mêmes sanctions que celles relatives à l’application de la procédure du rôle particulier. Soulignons que la règle selon laquelle une modification de la valeur foncière n’est possible que si elle entraîne une variation d’au moins 10% a été abrogée. Ces remarques valent aussi pour la CFE, dont la base est déterminée comme en matière de taxe foncière. Ainsi, à la suite de l’achèvement d’une construction nouvelle ou d’une addition, mais également à la suite de démolitions, la société devra déposer une déclaration 1447 M l’année suivant celle du changement pour que la valeur foncière soit adaptée. Sous réserve du respect du décalage de deux ans.
Nous ne serions pas complets si nous n’évoquions pas la nécessaire gestion des déclarations des démolitions et, plus généralement, des sorties d’actifs. La valeur foncière étant déterminée d’après les immobilisations inscrites au bilan déclarées ou reprises dans le cadre d’un contrôle fiscal, il est indispensable d’informer l’administration de leurs mises au rebut comptable. De plus, si la société ne procède pas aux sorties des immobilisations anciennes consécutivement aux rénovations des immeubles, à défaut de pouvoir identifier le prix de revient des immobilisations d’origine, l’administration ne constatera que les augmentations d’actifs. Cela aura mécaniquement pour effet de majorer anormalement la valeur foncière. Il est donc primordial de veiller régulièrement, outre à l’identification des biens n’entrant pas dans les bases de la taxe foncière et de la CFE [lire « L’Usine Nouvelle » n°3447], au respect de ses obligations déclaratives liées aussi bien aux nouvelles constructions ou aménagements qu’aux démolitions et mises au rebut.
L’enjeu
La valeur foncière des usines, déterminée par le cadastre, dépend du niveau d’information dont disposent les services fiscaux, lequel est fonction des déclarations que les industriels doivent respecter.
Les risques
- Une amende fiscale
- La perte d’exonération d’une partie de la taxe foncière
- Une augmentation de la base d’imposition
Auteurs
Laurent Chatel, avocat associé en fiscalité, responsable du service impôts locaux
Stéphanie Riedel, fiscaliste, droit fiscal, impôts locaux