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Mobilité internationale : état des lieux des dernières évolutions fiscales et sociales

Mobilité internationale : état des lieux des dernières évolutions fiscales et sociales

Dans un contexte de mobilité internationale des travailleurs accrue, le législateur a récemment apporté des modifications au cadre social et fiscal existant afin d’une part, de favoriser la venue en France de salariés à haute valeur ajoutée et d’autre part, de lutter contre le travail illégal.


Le régime des impatriés après la loi de finances pour 2017 : un dispositif toujours plus attractif

Le régime des impatriés vise à attirer en France des salariés et mandataires sociaux étrangers à haute valeur ajoutée au moyen d’une exonération partielle de leurs revenus d’activité versés par l’employeur établi en France, mais également de leurs revenus passifs (intérêts, dividendes, plus-values) de source étrangère.

Depuis son instauration en 2003, le régime des impatriés a été modifié à plusieurs reprises avec le souci permanent de le rendre plus attractif, ce qui en fait aujourd’hui l’un des dispositifs d’exonération fiscale les plus avantageux en matière d’impôt sur le revenu.

A l’origine, le régime prévoyait une exonération des suppléments de rémunération versés au titre de leur impatriation à des salariés ou mandataires sociaux aux conditions de ne pas avoir été résident fiscal de France au cours des 10 années précédant leur prise de fonctions et de fixer leur domicile fiscal en France à compter de cette date. En 2005, le législateur a réduit à 5 ans cette période de non résidence antérieure et a introduit une exonération supplémentaire au titre de la rémunération versée en contrepartie de jours travaillés à l’étranger dans l’intérêt direct et exclusif de l’employeur français. En 2008, le bénéfice du régime a été étendu aux personnes directement recrutées à l’étranger et aux non-salariés. En outre, une exonération à hauteur de 50% des revenus « passifs » (revenus de capitaux mobiliers et plus-values de cession de valeurs mobilières) réalisés à l’étranger a été instaurée. Enfin, en 2015, la loi Macron a prévu le maintien du bénéfice du régime en cas de changement de fonctions au sein de l’entreprise française ou au sein d’une autre entreprise établie en France du même groupe.

Avantage pour l’employé : extension de la durée d’application de régime de 5 à 8 ans

Dans un contexte post Brexit, la loi de finances pour 2017 a encore renforcé l’attractivité du régime en portant sa durée d’application de 5 à 8 ans. Ainsi, les personnes éligibles bénéficient désormais de ce régime jusqu’au 31 décembre de la 8e année civile suivant celle de leur prise de fonctions en France.

Les conditions d’application du régime demeurent identiques : les intéressés ne doivent pas avoir été fiscalement domiciliés en France au cours des 5 années civiles précédant celle de leur prise de fonctions et doivent fixer en France leur domicile fiscal à compter de cette date.

La nouvelle durée d’application s’applique aux personnes dont la prise de fonctions en France intervient à compter du 6 juillet 2016 et porte sur tous les avantages du régime :

  • exonération d’impôt sur le revenu de la prime d’impatriation et de la fraction de la rémunération correspondant à l’activité exercée à l’étranger dans l’intérêt exclusif et direct de l’employeur, dans la limite de certains plafonds ;
  • exonération d’impôt sur le revenu pour 50% de leur montant des revenus de capitaux mobiliers et des plus-values de cession de valeurs mobilières réalisés à l’étranger ;
  • déduction des cotisations versées aux régimes de retraite supplémentaire et de prévoyance complémentaire auxquels le salarié était affilié avant son arrivée en France.

Avantage pour l’entreprise : exonération de taxe sur les salaires sur la prime d’impatriation versée

Pour les entreprises établies en France et soumises au paiement de la taxe sur les salaires, la loi de finances pour 2017 a prévu une exonération de cette taxe à raison des primes d’impatriation versées depuis le 1er janvier 2017 à des salariés ou mandataires sociaux ayant pris leurs fonctions en France à compter du 6 juillet 2016. Cette exonération n’est en revanche pas applicable à la part de rémunération afférente aux jours travaillés à l’étranger dans l’intérêt direct et exclusif de l’employeur français.

Il appartient au salarié impatrié d’informer son employeur en année N de son éligibilité à l’exonération de la prime d’impatriation, de manière à ce que ce dernier puisse déposer en janvier N+1 une déclaration de taxe sur les salaires prenant en compte les sommes exonérées. Toutefois, dans l’hypothèse où l’employeur n’aurait pas été informé en 2016, l’employeur devrait disposer d’une possibilité de réclamer la restitution de la taxe afférente aux sommes exonérées trop-payée en 2017.

Articulation avec l’avantage accordé au titre de l’ISF et l’exit tax

L’extension de la durée d’application du régime des impatriés de 5 à 8 ans ne vise pas l’avantage accordé aux personnes s’installant en France au titre de l’ISF en la forme d’une exonération des biens situés hors de France. Par conséquent, les personnes éligibles au régime bénéficieraient des avantages relatifs à l’impôt sur le revenu pendant 8 ans mais leur base taxable à l’ISF ne serait déterminée en tenant compte des seuls biens situés en France que jusqu’à l’expiration de la 5e année suivant leur prise de fonctions en France.

A titre d’exemple, une personne embauchée par une entreprise française le 15 octobre 2016 et ayant établi son domicile fiscal en France à cette date bénéficierait des avantages au titre de l’impôt sur le revenu jusqu’au 31 décembre 2024. En revanche, son patrimoine taxable à l’ISF inclurait ses biens situés hors de France à compter du 1er janvier 2022.

De même, les impatriés susceptibles d’être soumis à l’exit tax à l’occasion de leur départ de France rentreraient dans le champ d’application de ce dispositif au bout de 6 ans de présence en France.

Ces aspects pourraient, dans certains cas, inciter des impatriés à transférer leur résidence hors de France avant l’expiration du régime de faveur de l’impatriation. Ainsi, afin de parfaire l’attractivité dudit régime, il conviendrait que le législateur aligne les durées d’exonération de l’ISF et de l’exit tax sur celle du régime des impatriés.

Législation sociale : principales nouveautés concernant le détachement de salariés

Dans le cadre de la lutte menée contre le travail illégal, le législateur français est également intervenu pour faciliter les contrôles de l’Administration à l’égard des salariés détachés en France.

  • Déclaration préalable de détachement et nouvelle contribution forfaitaire

L’intervention de la loi dite « Travail » du 8 août 2016, puis l’édiction des décrets du 29 juillet 2016 et du 15 décembre 2016, ont tout d’abord apporté des modifications à la procédure de déclaration préalable qui doit obligatoirement être réalisée auprès de l’administration du travail avant tout détachement de salarié en France. Pour mémoire, en cas de violation de cette obligation, l’employeur étranger encourt actuellement une amende de 2 000 euros par salarié détaché, dans la limite de 500 000 euros.

Or, depuis le 1er octobre 2016, cette déclaration préalable doit impérativement être effectuée par voie dématérialisée et non plus par lettre recommandée ou par fax. Pour ce faire, les employeurs établis à l’étranger doivent utiliser le télé-service « SIPSI », accessible sur le site Internet du ministère du travail à l’adresse suivante : http://www.sipsi.travail.gouv.fr.

Par ailleurs, à compter du 1er avril 2017, en cas de carence d’un prestataire de service établi à l’étranger (ou de l’un de ses sous-traitants) dans l’accomplissement de cette formalité, c’est le donneur d’ordre lui-même qui devra effectuer à titre subsidiaire cette déclaration dans les 48 heures suivant le début du détachement, via le système SIPSI. A défaut, l’amende administrative due par l’employeur étranger pourra être mise à sa charge. De plus, l’agent de contrôle pourra ordonner la suspension de la prestation de service pour une durée maximale d’un mois.

Autre nouveauté instaurée par la loi Travail du 8 août 2016, les employeurs étrangers devront dans un avenir proche verser une contribution forfaitaire pour chaque salarié détaché en France. Instaurée par la loi du 8 août 2016, cette contribution est destinée à compenser les coûts liés à la mise en place et au fonctionnement du système de déclaration préalable « SIPSI ». Son montant, qui devrait être prochainement fixé par décret, n’excèdera pas 50 euros par salarié détaché.

  • Sécurité sociale : des « certificats de détachement » à conserver avec soin

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 introduit par ailleurs de nouvelles dispositions relatives aux salariés maintenus à la sécurité sociale de leur pays d’origine dans le cadre de leur détachement en France.

Ainsi, à compter du 1er avril 2017, les salariés détachés, leur employeur ou le représentant de ce dernier en France, devront tenir à disposition des agents de contrôle les documents justifiant du fait que les cotisations de sécurité sociale ne sont pas dues en France, mais dans leur pays d’origine. En cas de contrôle, l’Administration pourra ainsi demander que lui soit remis sans délai le « certificat de détachement » délivré par les institutions de sécurité sociale compétentes pour chaque salarié concerné, qu’il s’agisse d’un formulaire obtenu sur le fondement de la réglementation communautaire (certificat « A1 ») ou sur le fondement d’une convention bilatérale de sécurité sociale.

A défaut de pouvoir produire ce document lors du contrôle, l’entreprise étrangère devra s’acquitter auprès de l’URSSAF d’une pénalité fixée à hauteur du plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 3 269 € en 2017) pour chaque salarié concerné.

Toutefois, compte tenu des délais d’attente nécessaires pour obtenir le « certificat de détachement » requis, le législateur a pris soin de préciser que dans l’hypothèse où le formulaire n’aurait pas encore été délivré au moment du contrôle, l’employeur n’aura pas à payer de pénalité s’il fournit dans un premier temps un justificatif attestant du dépôt de la demande, puis dans un délai de deux mois à compter du contrôle, le formulaire délivré à la suite de cette demande.

 

Auteurs

Guillemette Peyre, avocat, en matière de droit social

Xenia Lordkipanidzé, avocat councel, département fiscalité internationale

Rosemary Billard-Moalic, avocat, département fiscalité internationale

 

Mobilité internationale : état des lieux des dernières évolutions fiscales et sociales – Article paru dans Les Echos Business le 13 avril 2017