Image Image Image Image Image Image Image Image Image Image
Scroll to top

Haut

Mobilité internationale : point d’actualité pour les employeurs étrangers détachant des travailleurs en France

Mobilité internationale : point d’actualité pour les employeurs étrangers détachant des travailleurs en France

La libre circulation et la liberté d’accès à l’emploi des salariés étrangers sur le territoire français ont concomitamment fait émerger le spectre du dumping social.


Face à cette menace, l’Union européenne et le législateur français ont construit un arsenal de mesures de nature à éviter les distorsions de concurrence induites par l’hétérogénéité des niveaux de rémunération minimum au sein des pays de l’Union.

Cependant, la libre circulation accrue et la progression des pratiques frauduleuses ont rendu indispensable, pour la sauvegarde des entreprises, l’élaboration de mesures facilitant le contrôle et les sanctions à l’égard des entreprises qui ne respectent pas les règles du détachement transnational.

C’est dans ce contexte de lutte contre la concurrence sociale déloyale, que la loi du 10 juillet 2014 a mis à la charge de l’employeur étranger qui détache un salarié en France, l’obligation d’adresser une déclaration à l’inspection du travail, préalablement au détachement.

Un système dématérialisé de déclaration des travailleurs détachés a ainsi été institué par la loi « Travail » du 8 août 2016. Ce dispositif permet, à l’entreprise étrangère, de procéder à la déclaration en ligne du travailleur détaché, et à l’administration, de contrôler la mise en œuvre du détachement.

La déclaration comporte, à cette fin, de nombreuses informations relatives à l’entreprise qui détache le salarié, au donneur d’ordre, à la prestation et aux conditions de travail du salarié détaché. Elle mentionne également le nom du représentant de l’entreprise en France, dont la désignation est obligatoire. Ce dernier doit notamment conserver les documents relatifs au détachement qui peuvent être requis à tout moment par l’inspection du travail. Pour rappel, la Cour de cassation dans son arrêt du 9 février 2017, a invalidé la désignation d’une salariée de l’entreprise étrangère résidant en France comme représentant en France de l’employeur étranger.

Le fonctionnement de ce système dématérialisé ainsi que le traitement des données recueillies engendrent des coûts pour l’administration. La question s’est alors posée de savoir comment financer le dispositif.

Ces circonstances ont conduit le pouvoir réglementaire à créer la contribution d’un montant de 40 euros, par le décret 2017-751 du 3 mai 2017. Sont redevables de cette contribution les employeurs qui détachent des salariés en France ou, en cas de manquement de ceux-ci à leur obligation de déclaration, les donneurs d’ordre (c’est-à-dire les entreprises qui accueillent les salariés détachés en France). Le décret s’inscrit ainsi dans la droite ligne des mesures qui associent le donneur d’ordre à la lutte contre la fraude.

Le décret prévoyait que cette contribution de 40 euros par salarié détaché serait due à compter du 1er janvier 2018.

L’existence de la contribution aura été de courte durée. Elle est supprimée à peine un mois et demi plus tard, à compter du 12 février 2018.

La loi habilitant le gouvernement à réformer le droit du travail par ordonnances a en effet habilité le gouvernement à prendre par ordonnance, avant le 16 mars 2018, toute mesure pour améliorer la gestion et le recouvrement de la contribution ou, à défaut, la supprimer.

Le décret du 9 février 2018 a supprimé la contribution dans l’attente de cette ordonnance.

Le gouvernement n’ayant pas adopté d’ordonnance dans le temps imparti, la suppression temporaire de la contribution recouvre désormais un caractère définitif.

Attention, toutefois, seule la cotisation est supprimée. En revanche, la déclaration préalable demeure entièrement applicable, sous peine d’être redevable d’une amende d’un montant maximum de 2 000 euros par salarié détaché (4 000 euros si le manquement se répète), étant précisé qu’il est prévu que le plafond des amendes administratives soit relevé à 3 000 euros (6 000 euros en cas de récidive).

De surcroît, il est prévu qu’une nouvelle ordonnance étende la possibilité pour la DIRECCTE de suspendre une prestation de service internationale en cas de non-paiement par le prestataire de cette amende et de manière générale, que de nouvelles mesures soient mises en place pour lutter efficacement contre la fraude au détachement.

Enfin, il convient de rappeler qu’outre cette déclaration à l’inspection du travail via le site SIPSI, l’employeur étranger intervenant au France doit toujours transmettre à son client, l’ensemble des documents et informations prévus aux articles D.8222-5 ou D. 8222-7 du Code de travail, au début de la prestation puis tous les six mois et ce jusqu’à la fin du contrat. Une obligation de vigilance à prendre à prendre très au sérieux pour toute prestation d’un montant au moins égal à 5 000 euros, puisqu’en cas de manquement le donneur d’ordre s’expose à des poursuites pénales.

 

Auteurs

Caroline Froger-Michon, avocat associée, droit social

Haiyan Cai, juriste, social

 

Mobilité internationale : point d’actualité pour les employeurs étrangers détachant des travailleurs en France – Article paru dans Les Echos Exécutives le 16 avril 2018