Mode d’emploi du déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement
26 juin 2013
Le projet de loi définitivement adopté le 20 juin dernier prévoit un déblocage exceptionnel. Point d’arrêt sur ses principales caractéristiques.
Concrétisation d’un engagement présidentiel pris le 28 mars dernier, une proposition de loi prévoit d’autoriser exceptionnellement le déblocage de la participation et de l’intéressement. Ce texte, définitivement adopté par le parlement le 20 juin dernier, vise à redonner du pouvoir d’achat immédiat aux ménages et à orienter une partie de l’épargne salariale, aujourd’hui indisponible, vers la consommation.
Quelles sommes et pour quel usage ?
Le futur dispositif devrait permettre aux salariés de débloquer exceptionnellement et de manière anticipée :
- les droits acquis au titre de la participation et qui ont été affectés avant le 1er janvier 2013 sur un plan d’épargne salariale (plan d’épargne d’entreprise ou plan d’épargne interentreprises) ou sur un compte courant bloqué ;
- les sommes attribuées au titre de l’intéressement et affectées à un plan d’épargne d’entreprise avant le 1er janvier 2013.
En revanche, les versements individuels des salariés investis dans un plan d’épargne salariale et l’abondement éventuel de l’employeur ne devraient pas pouvoir faire l’objet d’un déblocage anticipé.
Afin de préserver les instruments d’épargne salariale de long terme pour la retraite et ne pas déstabiliser la trésorerie des entreprises solidaires, le législateur envisage également d’exclure du dispositif les droits et sommes affectés à l’acquisition de parts de fonds investis dans des plans d’épargne pour la retraite collectif (PERCO) et de fonds investies dans des entreprises solidaires.
Le montant des sommes débloquées serait plafonné à un montant global de 20 000 euros, nets de prélèvements sociaux, par bénéficiaire. Ces sommes devraient avoir pour objet de « financer l’achat d’un ou plusieurs biens, en particulier dans le secteur de l’automobile, ou la fourniture d’une ou plusieurs prestations de services ».
Les salariés devraient tenir à la disposition de l’administration fiscale les pièces justificatives attestant que les sommes débloquées ont été utilisées conformément à cet objet. Ce déblocage exceptionnel ne devrait donc pas permettre aux salariés de faire face à des dépenses courantes, de rembourser un prêt de manière anticipée ou de placer les sommes sur de nouveaux supports d’investissements (ex : assurance-vie, Livret A, etc.).
La proposition de loi n’apporte cependant aucune précision quant à la fourniture de services, ou quant aux types d’achats à réaliser, à part l’achat de biens dans le secteur de l’automobile, ni quant à leur nombre ou montant minimum ou maximum et encore moins sur le type de justificatifs acceptables pour l’administration fiscale. Le texte définitif ou les textes d’application ultérieurs devraient ne pas manquer d’apporter des précisions à ce sujet.
Quelles modalités pour débloquer ?
Le déblocage exceptionnel devrait pouvoir intervenir à la simple demande du salarié, formulée entre le 1er juillet 2013 et le 31 décembre 2013 et en une seule fois. Par exception, le déblocage des sommes affectées serait subordonné à la conclusion d’un accord s’agissant des sommes investies :
- pour la participation, à un compte courant bloqué ;
- pour la participation et l’intéressement, à l’acquisition de titres de l’entreprise ou d’une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes ou à l’acquisition de parts ou d’actions de fonds communs de placement d’entreprise (FCPE) ou de sociétés d’investissement à capital variable d’actionnariat salarié (Sicavas).
Cet accord devrait être conclu :
- pour le déblocage de la participation, selon les modalités prévues pour les accords de participation d’entreprise ou de groupe ;
- pour le déblocage de l’intéressement, selon celles prévues pour les plans d’épargne d’entreprise ou interentreprises.
L’accord pourrait prévoir que le versement ou la délivrance de certaines catégories de droits peut n’être effectué que pour une partie des avoirs en cause. L’employeur pourrait par ailleurs autoriser, sans qu’un accord soit conclu, le déblocage de l’intéressement affecté à un plan d’épargne salariale mis en place à son initiative.
Enfin, l’employeur ou l’organisme gestionnaire devrait être tenu de déclarer à l’administration fiscale le montant des sommes débloquées en application de ce dispositif, aux fins de suivi et de contrôle. Afin d’inciter à faire usage de ce dispositif, il serait prévu que l’employeur informe les salariés de ce dispositif de déblocage exceptionnel dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la loi.
Quel régime social et fiscal ?
Les sommes débloquées devraient bénéficier des mêmes avantages sociaux et fiscaux que ceux applicables à l’issue de la période de blocage « normale ». Elles devraient donc être exonérées d’imposition sur le revenu et de cotisations sociales, sous réserve de la CSG et de la CRDS sur les intérêts.
Il conviendra donc de mesurer l’intérêt porté par les épargnants à ce dispositif à l’issue de sa période d’application, soit d’ici la fin de l’année.
A propos de l’auteur
Pierre Bonneau, avocat associé. Il intervient en conseil et contentieux en droit du travail, droit pénal du travail et droit de la protection sociale. Il détient une forte expérience notamment dans le domaine de la représentation du personnel et dans la gestion des relations sociales : assistance quotidienne de nombreuses entreprises et organismes dans ce domaine, gestion de contentieux divers (délit d’entrave, discrimination…), mise en place d’accords, formations régulières (actualité sociale, négociation collective…). Son activité consiste plus généralement à conseiller au quotidien les entreprises sur les aspects juridiques des relations individuelles et collectives de travail ainsi qu’en matière de protection sociale.
Article paru dans Les Echos Business du 26 juin 2013
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